Réunis en conseil municipal le 28 juin dernier, les élus municipaux devaient se prononcer sur la vente d’un patrimoine communal conséquent, en l’espèce l’ancien hôpital. Un bâtiment acquis en 2001 par la collectivité suite à la création du CHIVA à St-Jean de Verges. Et c’est désormais dans les mains du groupe Eiffage Immobilier que la destinée du lieu se trouve, avec l’idée de créer une « résidence services seniors  » de quelque 110 logements. Mais tant sur la forme que sur le fond du dossier, les oppositions ont trouvé matière à redire à propos de ce projet de 20 M€.

 
« Vous cherchez quoi ? A faire échouer le projet ? » A plusieurs reprises, Xavier Fauré s’est montré agacé par le flot des nombreuses questions que les conseillers d’opposition avaient à poser sur le dossier étudié ce 28 juin. Au maire-adjoint en charge de l’urbanisme et de la stratégie foncière, Daniel Mémain (Pamiers Citoyenne) répondait que « on cherche à comprendre pourquoi vous n’avez jamais parlé de ce projet – sur lequel vous travaillez visiblement depuis longtemps – en commission ni dans les réunions publiques, avant que la Dépêche n’annonce la vente le 7 juin ». Quand pour sa part Gérard Legrand (Union pour Pamiers) regrettait « qu’on apprenne la vente du patrimoine des Appaméens dans le journal local. Où est la démocratie participative ? » Michèle Goulier (Pamiers Citoyenne) résumait le sentiment général partagé par les bords minoritaires : « on ne va pas nous reprocher de poser des questions ! Ce n’est pas une boîte d’allumettes, c’est un site patrimonial sur un emplacement exceptionnel. Il y a un problème de méthode, on aurait pu créer une commission municipale pour avoir une réflexion sereine et collective… On découvre le projet là, c’est normal qu’on pose des questions… »
Sur le papier, le projet est assez simple : considérant que l’offre de logements sur la commune « ne comprend pas d’habitat avec services, étape éventuelle pour les séniors peu dépendants », et voyant Eiffage Immobilier proposer de réaliser une résidence services seniors dans un quartier en pleine transformation (avec la récente découverte du canal à Loumet), la ville va vendre « l’ancien hôpital » situé place St-Vincent.« Le projet prévoit la démolition et la reconstruction de l’ensemble immobilier formant un U s’ouvrant sur la place Saint-Vincent. Environ 5.000m² seront démolis, 7.000m² construits, précise Xavier Fauré en présentant la délibération municipale. Le projet prévoit la construction denviron 110 logements adaptés, destinés à un public sénior, comportant environ trente places de stationnements réservés aux résidents, des espaces de bien être, une piscine, une conciergerie active en permanence et des services associés« . L’ensemble représenterait un investissement de 20 millions d’euros, et pourrait être géré par le groupe vendéen Villas Ginkgos.
Il est précisé que l’implantation et la volumétrie de l’immeuble actuel seront conservées afin de « maintenir un espace urbain de qualité » face à la place St-Vincent. De même, l’escalier monumental et son fronton, le jardin et la clôture seront conservés. A noter par ailleurs que le projet prévoit la création d’un espace muséal et mémoriel en rezdejardin de l’immeuble projeté. Cet espace recevra notamment l’ancienne pharmacie de l’hôpital et les plaques des «donateurs». « Une véritable opportunité pour la ville, quand on voit les statistiques sur le vieillissement », estime la maire Frédérique Thiennot. Qui par ailleurs n’entend pas recevoir de leçon sur l’aspect patrimonial : « qu’a-t-il été fait pendant 20 ans, de ce patrimoine qui est toujours plein de mercure et d’acide chlorhydrique ? La concertation a eu lieu, avec l’Architecte des Bâtiments de France qui a toute autorité en la matière ».
Clarisse Chabal Vignoles (Union pour Pamiers), en charge des politiques pour les aînés sous la mandature précédente, évoque, pour sa part, « un projet hors sol. Je crains que ce projet ne s’adresse pas à des investisseurs appaméens. Et puis, qui va y habiter ? Ce type de résidences, ce sont des loyers de 1500 € par mois minimum ». Le premier adjoint Alain Rochet les estime davantage « à 900 € pour les premiers prix, en fonction de la qualité de service souhaitée. Et les APL peuvent être sollicitées ». Frédérique Thiennot insiste, elle, sur la localisation : « on est entre deux quartiers prioritaires de la ville. L’objectif de la réhabilitation, c’est la mixité sociale vers le haut, c’est intégrer dans ces quartiers des gens qui ont un certain revenu. C’est aussi une façon de trouver des clients pour les commerces du centre-ville ».
Vient encore la question du prix de vente. Fixé à 300.000 €, somme correspondant à ce qu’Eiffage Immobilier a proposé à la mairie. « Pour un bien que la commune a acheté 1 million d’euros en 2001, et dans lequel plus de 700.000 € ont été investis depuis, pointe Mme Goulier. Comment expliquer cela ? » Mme Thiennot rappelle en réponse que le dossier a fait l’objet d’une évaluation par le service des Domaines de la DDFIP, qui visiblement ne trouve pas la somme scandaleuse. Alain Rochet ajoute que « ce prix de 300.000 € ne concerne qu’une partie de l’ancien hôpital. Cela n’inclut pas les bâtiments du conservatoire et de la crèche, qui sont en bien meilleur état que le reste, et qui vont rester dans l’actif communal ».
Au final, la délibération, et donc l’acceptation de la vente, a été adoptée par la majorité du conseil, malgré les neuf voix contre des deux groupes d’opposition.
Reste une question, d’ordre juridique celle-là : la délibération évoque une « décision municipale n° 22069 du 22 juin 2022 formant désaffectation et déclassement par anticipation du domaine public de l’immeuble dénommé «ancien hôpital» ». Or pour Daniel Mémain, ce déclassement par anticipation aurait dû faire l’objet d’une délibération préalable et séparée du conseil municipal, la chose ne relevant pas à ses yeux des attributions confiées à la première magistrate de la commune. Frédérique Thiennot, de son côté, est formelle : « nous avons demandé l’avis du contrôle de légalité de la préfecture. Il s’agit d’une compétence du conseil municipal qui est déléguée au maire. Le contrôle de légalité nous a dit d’agir en ce sens ». On ne peut donc exclure que le dossier finisse prochainement devant le tribunal administratif de Toulouse…
A. C.

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