L’aigle royal, le plus noble des rapaces, connaît des difficultés dans l’Aude. Le département est riche en espèces menacées. Faut-il préserver leur territoire qui est aussi le nôtre, ou laisser libre court au développement ?
Il impressionne par son allure, la perfection de son « armement », ses vols de parade qui font le bruit d’un obus de gros calibre quand il fend l’espace en piqué à 200 km/h, par sa puissance aussi. L’homme l’a couronné roi des airs, c’est pourquoi on le retrouve dans l’héraldique, sous forme d’aigle bicéphale chez les Habsbourg, aigle prussien ou napoléonien, emblème des États-Unis…
« L’aigle royal est une espèce sous perfusion »
Dans l’Aude, une quinzaine de couples se sont installés dans les Corbières, le Piémont pyrénéen et la montagne Noire. Le département a toujours été une terre de passage et d’accueil pour les humains comme pour les oiseaux. Il est, avec les Pyrénées-Orientales et les Alpes-Maritimes, un territoire privilégié de la faune et de la flore en France. Jusqu’à présent son caractère exclusivement agricole permettait la cohabitation des deux mondes. Mais de plus en plus l’empreinte de l’homme fragilise cet équilibre.
Perché sur le plateau de Sault, à Espezel, Christian Riols, retraité de l’Office national des forêts (ONF) venu de Champagne il y a une quinzaine d’années, est fasciné par le manège des rapaces, utilisant le territoire audois à leur façon, loin des hommes, même si ce dernier aurait plutôt tendance à lui couper les ailes. Il peut y avoir les éoliennes, mais aussi les travaux envisagés de lignes ferroviaires très grande vitesse, les lignes à haute tension, la malveillance. « De nombreux cas de mortalité sont à déplorer, suite à des contaminations chimiques : cela concerne le vautour percnoptère, le vautour fauve et l’aigle royal », regrette Christian Riols. Pour se débarrasser de chiens errants attaquant régulièrement son troupeau, un éleveur aurait ainsi (en 2004) « farci une bête morte (un mouton) de poison, puis un autre a fait de même avec un renard ».
Le trône menacé
« L’aigle royal est une espèce sous perfusion, certains quittent le département lassés par les empoisonnements, les piégeages, les tirs, les éoliennes, la réduction des espaces ouverts, la diminution des lapins de garenne, de nourriture…», explique l’animateur de groupe de travail rapaces au sein de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et l’un des quelques spécialistes en France des régimes alimentaires des rapaces carnivores. Résultat : « Quatre jeunes élevés par un couple en 16 ans… ça ne fait pas beaucoup, alors que dans les Corbières, il y a 25 ou 30 ans, naissait un jeune par couple et par an…».
Espaces sensibles
Le 17 mars 2016, le cadavre d’un aigle royal a été découvert par des promeneurs à Nébias, décédé « d’une électrocution suite à un concours de circonstances, notamment climatiques », comme l’expliquait la LPO. Dans la foulée, en juillet, ERDF installait plusieurs dispositifs de protection des oiseaux de grande envergure à Nébias et Peyrolles, dans le cadre d’un plan d’investissement dans la protection avifaune de 100 000 €.Depuis 2012, mille points à risque auraient été traités, essentiellement par l’enfouissement de lignes.
Les risques que représentent les éoliennes ne seraient pas suffisamment pris en compte « Dans l’Hérault, grâce à des balises GPS et à la capture d’oiseau, les collègues sont en train de démontrer qu’un projet éolien va faire disparaître le couple observé », témoigne Christian Riols. Dans la montagne Noire, un couple d’aigles royaux ne se reproduit plus depuis 7 ou 8 ans, et l’autre vit sur un site vulnérable, ou seuls deux jeunes ont été élevés en 6 ans. « Pour nous, l’espèce est en danger dans la montagne Noire, surtout qu’on ne cesse de densifier le parc éolien, quasiment sur l’espace de ces aigles, sur leur couloir de vol. » Dans la forêt des Fanges (commune de Puilaurens), un projet de six éoliennes grand format est à l’étude… à proximité « d’un nid d’aigle royal, d’une colonie de vautours fauves, d’un site d’installation de gypaète barbu, et de quinze espèces de chauve-souris, soupire Christian Riols. Il existe des plans nationaux d’action pour ces espèces… mais ça ne les arrête pas. »
J’ai déjà un compte
Je n’ai pas de compte
Vous souhaitez suivre ce fil de discussion ?
Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?
oh m..de! Un aigle qui parle ?
On lit, écœuré, dans cet article : "Pour se débarrasser de chiens errants attaquant régulièrement son troupeau, un éleveur a, en 2014, farci un mouton mort de poison, puis un autre a fait de même avec un renard…"
Résultat des courses, un aigle royal empoisonné retrouvé mort !
Mais comment peut-on être aussi c.. !!!