Après la présentation des dessins d’exil de Josep Bartoli, le Mémorial du camp de Rivesaltes crée à nouveau l’événement en prêtant ses salles au "Rapport W". L’histoire vraie d’un espion polonais infiltré à Auschwitz, magnifiquement illustrée par Gaétan Nocq. Le dessinateur a par ailleurs bénéficié cet été d’une résidence à Rivesaltes afin d’exposer aujourd’hui son travail sur les deux camps.
Du tragique et de la délicatesse. Les dessins présentés au Mémorial du camp de Rivesaltes (plus proches de pastels ou de sanguines que de bulles de fanzine) bouleversent par le réalisme et l’effrayante douceur de trait qui s’en dégagent. Car Gaétan Nocq a choisi des couleurs pastel pour raconter l’histoire folle de Witold Pilecki («W»), officier polonais prisonnier volontaire à Auschwitz pour y organiser un réseau de résistance et un soulèvement. "Il ne mesure pas l’enfer qui l’attend", prévient l’auteur, qui s’est donc fixé comme objectif ambitieux d’en rendre compte dans un superbe roman graphique de 265 pages (*).

L’équipe du Mémorial a choisi avec l’auteur 80 planches originales magnifiquement présentées, dans des jeux de couleurs, de lumières et de formats dont cette frise de visages qui courent sur 8 mètres.
La présentation soignée, articulée en trois parties (l’arrivée dans le camp, l’arrivée des déportés juifs et leur extermination et le réseau d’espions), est à la hauteur du sujet, grave, "sérieux", dit l’auteur, mais jamais glauque. Et qui a amené Gaétan Nocq deux fois à Auschwitz, "dans le ventre du monstre".
"J’y suis allé avec mes carnets de voyage et dès que j’ai commencé à dessiner, je me suis trouvé à cheval entre l’approche scientifique du documentaire et l’artistique, explique-t-il. J’ai aussi été intéressé par le hors-champ : la nature dans le camp aujourd’hui, les arbres, ça symbolise la résilience, et ce sont aussi des témoins".

Gaétan Nocq a eu carte blanche cet été à Rivesaltes et s’est beaucoup inspiré des photos de Paul Senn pour ranimer des dizaines de silhouettes.
Il a aussi entrepris l’émouvante réécriture des 2 289 prénoms des Juifs déportés du camp vers Auschwitz, et cadré les paysages, en particulier le Canigou, à travers ce qui reste des bâtis des baraquements.
(*) Éditions Daniel Maghen, en vente au Mémorial. Exposition jusqu’au 29 janvier 2023 (accès avec le billet d'entrée, 9,50 euros, 6,50 euros tarif réduit, gratuité moins de 18 ans, bénéficiaires de minima sociaux, enseignants). Infos : memorialcamprivesaltes.eu
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