La correction immobilière est en cours. Elle sera saine ou douloureuse, selon l’ampleur de la hausse des taux d’intérêt que commandera la Banque du Canada. Les ventes ont poursuivi leur recul ressenti dans la région métropolitaine de recensement de Montréal en juin, avec un nombre de transactions en baisse de 11 % par rapport au mois correspondant de 2021. Les données de l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ) font également ressortir une augmentation des inscriptions en vigueur pour un sixième mois d’affilée. Elle se chiffrait à 15 % par rapport à juin 2021. Ce qui n’a pas empêché le prix médian de croître de 12 %.
La mise en vente de nouvelles propriétés commence à avoir des répercussions sur le nombre de propriétés à vendre « et se traduit donc par une légère hausse du temps nécessaire pour écouler l’inventaire, une première depuis 2015 ». L’APCIQ parle de conditions de marché demeurant à l’avantage des vendeurs, mais entrevoit un essoufflement de la hausse soutenue des prix par rapport à 2021 au cours des prochains mois. « Globalement, une stabilisation des prix se dessine depuis mai dernier, annonçant l’atteinte du pic du marché à Montréal, notamment dans un contexte où la qualification pour obtenir un prêt hypothécaire s’avère de plus en plus ardue. »
La correction immobilière demeure donc « saine ». Elle suit une année 2021 qui a vu la dette hypothécaire croître de 9 %, précise la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) dans son rapport sur le secteur des prêts hypothécaires résidentiels du printemps 2022.
On y lit que cette accélération « est attribuable à l’augmentation des prêts hypothécaires non assurés, tant pour l’achat de propriétés que pour le refinancement ». De plus, malgré la tendance à la hausse des rapports prêt-valeur (RPV) des nouveaux prêts hypothécaires non assurés au premier semestre, l’année 2021 s’est terminée avec une proportion plus élevée dont le RPV est de 65 % ou moins. « Ces résultats indiquent qu’au deuxième semestre, les emprunteurs ont été beaucoup moins endettés. Cette tendance a également été observée lors de l’examen des nouveaux prêts hypothécaires assurés. » Le pourcentage des nouveaux prêts hypothécaires non assurés affichant un RPV de 65 % ou moins atteignait 38,2 % à la fin de 2021, contre 44,2 % pour celui se situant entre 75 et 80 %.
Autre constat d’intérêt, 72,5 % des emprunteurs hypothécaires non traditionnels — s’en remettant à des prêteurs parallèles moyennant un taux plus élevé — ont été en mesure d’obtenir un prêt auprès d’un prêteur traditionnel au terme de leur prêt (64 %) ou de se départir de leur propriété sans que le prêt tombe en souffrance ou que la propriété soit saisie (8,5 %). Cette proportion pouvait atteindre 80 % entre 2006 et 2015, mais était descendue à environ 70 % en 2019, sous le coup du resserrement des critères d’octroi des prêts.
En revanche, avec l’augmentation de l’écart entre les taux variables et les taux fixes, 53 % des emprunteurs ont opté pour des taux variables au deuxième semestre, comparativement à 34 %. « Bien que cette tendance se soit poursuivie au cours des premiers mois de 2022, elle semble s’être stabilisée en raison des récentes hausses des taux hypothécaires », note la SCHL.
Ce rééquilibrage du marché immobilier résidentiel s’effectue avec des ménages disposant, dans l’ensemble, d’une marge de manoeuvre. Dans leur Point de vue économique portant sur les finances des ménages, les économistes du Mouvement Desjardins ont donné le portrait de ménages canadiens abordant 2022 avec des finances en « très bonne santé » et un revenu augmentant rapidement en raison d’un marché du travail très serré.
Par ailleurs, le taux d’épargne est demeuré élevé par rapport à sa moyenne prépandémique et continue d’abriter de l’épargne excédentaire accumulée lors de la crise sanitaire. « Et la richesse des ménages restait importante en début d’année, même si les marchés immobiliers et boursiers ont entamé un recul sous l’effet du resserrement de la politique monétaire. »
Il est souligné que le crédit à la consommation a fortement chuté pendant la pandémie et, malgré une légère hausse récemment, il reste toujours à 4,8 % plus faible que son sommet du quatrième trimestre de 2019. À l’opposé, l’encours du crédit hypothécaire se situait au début de 2022 à un niveau 20 % plus élevé que celui de la fin de 2019.
Les ménages ayant un lourd fardeau hypothécaire seront donc frappés plus sévèrement par la progression du loyer de l’argent. Les 20 % des Canadiens composant le quintile des revenus inférieurs, qui ont connu la plus forte augmentation en pourcentage de leur passif au cours de la pandémie, sont aussi particulièrement vulnérables, ce qui laisse entrevoir une augmentation des cas d’insolvabilité.
Mais selon le scénario de base esquissé par les économistes de l’institution, la croissance du revenu disponible des ménages devrait demeurer robuste, ce qui, combiné à une progression plus lente de la consommation, ne se traduirait que par une diminution graduelle du taux d’épargne pendant la période couverte par les prévisions. Sur le marché résidentiel, le prix moyen des maisons existantes diminuerait d’environ 15 % d’ici la fin de 2023 à l’échelle canadienne (de 12 % à l’échelle québécoise) par rapport à son niveau de février 2022. « Nous ne prévoyons pas que le prix moyen des propriétés diminuera sous son niveau d’avant la pandémie dans aucune province. »
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