La chronique économique hebdomadaire de Bernard CHAUSSEGROS
Pour les trajets courts, privilégiez les transports en commun ou le covoiturage, préférez le vélo ou la marche à pied !
Cette mention que les pouvoirs publics ont imposée aux constructeurs automobiles qui font la promotion de leurs derniers modèles hybrides ou électriques et cherchent à en vanter les performances en termes de consommation d’énergie, a tout de la provocation. Cette façon d’infantiliser les consommateurs ou de les culpabiliser est aussi une hypocrisie ! C’est prendre les Français pour des idiots qui ne réfléchiraient pas aux conséquences du réchauffement climatique !
Voilà des années que les automobilistes attendent pour leurs voitures chéries des moteurs qui fonctionneraient avec des sources d’énergie moins onéreuses, comme l’huile végétale, l’électricité, l’hydrogène, ou pourquoi pas, l’énergie nucléaire ! Et voilà que l’on met enfin sur le marché des véhicules à moteur électrique dont le fonctionnement va coûter plus cher que les moteurs thermiques et qui plus est, dans une période où le prix de l’électricité est en train d’exploser.
Les Français n’ont pas attendu ces mentions publicitaires ridicules pour prendre les mesures d’économie nécessaires, et pour certains, obligatoires. Personne ne prend sa voiture pour aller chercher sa baguette de pain (même inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco) chez le boulanger du coin de la rue ! Mais il ne faudrait pas oublier que la « construction » de notre société s’est totalement organisée autour de l’usage quotidien de l’automobile, symbole de la liberté retrouvée après la seconde guerre mondiale.
C’est d’ailleurs l’essor économique fulgurant des 30 glorieuses, combiné à l’ère du pétrole et de l’automobile largement accessibles, qui ont fait sortir de terre des banlieues pavillonnaires de plus en plus distantes au fur et à mesure que les prix de l’immobilier et que la population augmentaient. Par cercles concentriques successifs, les Français se sont d’autant plus éloignés que des zones commerciales et des hypermarchés de plus en plus vastes se sont installés à leur tour sur d’anciennes terres agricoles excentrées, très loin des centres urbains, ce qui rendu de facto l’usage de la voiture absolument indispensable.
Pour les provinciaux et surtout les ruraux, point de salut sans voiture ! Et pour les Franciliens, encore faudrait-il que les transports collectifs soient à la hauteur de leurs attentes ! Il suffit de se déplacer en bus et RER entre la banlieue et la capitale pour friser la crise de nerfs !
Ainsi, à défaut de rêver de « 30 nouvelles glorieuses » qui viendraient décupler notre capacité à produire sans cesse des habitats individuels excentrés, on appelle déjà à la rescousse le numérique pour télétravailler plus, donc pour moins se déplacer, et demain, on compte sur le développement du métavers qui limitera finalement notre horizon de mouvements aux quelques centimètres de nos casques à réalité virtuelle, laissant alors à nos hologrammes idéalisés le soin de « tisser du lien ». D’autres encore, comme les Saoudiens, imaginent la ville de demain, THE LINE, comme une « oasis » de 9 millions d’habitants, étendue entre deux murs de 170 kilomètres de long, 500 mètres de hauteur et 200 mètres de large, dans le désert, sans voitures et sans émissions de CO². Tout le monde, dans une succession de « pôles », aura accès à l’ensemble des installations en moins de 5 minutes de marche à pied, et on ira d’une extrémité à l’autre de cette « ville » par un TGV souterrain en un temps record de 20 minutes.
C’est ainsi que le royaume du pétrole mise donc tout sur l’énergie… électrique !
C’est à croire que l’on vit dans « le monde de l’absurde » ! Et il faut surtout s’étonner de cette obsession du tout électrique ! Plus de véhicule à moteur thermique à partir de 2035. On se demande comment cette profession de foi pourra être satisfaite ! En effet, un peu de calcul basique permet de constater que pour recharger en même temps 1 million de voitures électriques, il faudra pouvoir fournir l’équivalent de la moitié de la consommation électrique de la France.
Cela étant dit, qui plus est sous nos contrées, le prix de l’électricité, risque, on le craint, de provoquer un effet « domino » qui peut faire « sauter la banque ». Formule familière pour souligner que la précarité des ménages et des entreprises, déjà fortement exacerbée par les crises sanitaires et les conséquences économiques et psychologiques de la guerre en Ukraine, évolue vers une aggravation inquiétante.
Les dominos ! Tout le monde y a joué, un jour ou l’autre ! Avec ces 28 petites pièces rectangulaires faites de bois noir et d’os blanc, aujourd’hui moulées en matière plastique… mais tout le monde connait ce jeu … sans doute d’origine chinoise ! Mais on parle aussi d’effet domino. Comme avec ces constructions parfois complexes où des dominos ou des morceaux de sucre sont alignés les uns à la suite des autres, selon un dessin né de l’imagination de leurs auteurs, dans le but esthétique de créer une réaction en chaîne. Il suffit de faire vaciller le premier domino pour que le suivant tombe et ainsi de suite. Quelle que soit la longueur de la chaîne ou son organisation, les dominos continueront de tomber avec la même régularité, de bout en bout, sans qu’on puisse les arrêter.
La mise en action d’un tel phénomène qui demande inventivité et patience, illustre plutôt bien la théorie qui veut qu’un événement mineur puisse provoquer un autre événement plus lourd de conséquence, lequel provoquera d’autres changements, et ainsi de suite au cours d’une séquence qui semble ne plus jamais pouvoir s’arrêter. Cette théorie a été développée dans le cadre géopolitique de la guerre froide quand les USA craignaient de voir se propager l’idéologie communiste à travers le monde, tant dans les pays limitrophes de la Russie qu’en Asie au contact de la Chine.
Cette théorie a connu un regain d’intérêt dans les années 2010, lors de la succession de bouleversements que le monde moyen-oriental a pu connaitre avec les différents « printemps arabes » qui n’ont d’ailleurs pas forcément débouché sur les libertés espérées. Cette théorie, en fait, peut caractériser tout événement en apparence anodin qui provoque des conséquences parfois révolutionnaires.
L’inflation
C’est ce qui pourrait survenir dans notre environnement proche et dans un avenir immédiat, du fait de la crise qui frappe la France depuis 2021 et qui se perpétue de mois en mois sans que l’on puisse apparemment la stopper. L’Insee publie des données sur le taux de l’inflation en France pour chaque année, ce taux étant calculé à partir de la moyenne de l’évolution des prix à la consommation en année glissante.
L’inflation s’établissait ainsi à 1,6 % en 2021, mais il faut avoir à l’esprit qu’il s’agit d’une moyenne, les augmentations de certains secteurs étant largement supérieures à ce taux moyen officiel qui est présenté comme un chiffre satisfaisant par les pouvoirs publics. C’est d’ailleurs ce qui se dit ces derniers jours, le taux de novembre n’ayant pas augmenté par rapport aux taux d’octobre. Et chacun de dire que l’inflation ralentit !
 Sans doute une grave erreur de trop tôt crier victoire, car, parallèlement on sait que le pouvoir d’achat des Français a diminué d’environ 2 % du fait des hausses notoires de l’alimentation. Un peu à l’instar de la météo où les températures affichées peuvent très significativement différer du froid ressenti, les Français regardent avec suspicion et défiance ces chiffres officiels de l’inflation où la décimale semble peser tellement dans le discours politique, alors qu’au quotidien, le sentiment de déclassement et de privations enfle inexorablement.
Les données de l’Insee sont publiées chaque année en janvier au titre de l’année précédente. Rappelons que le taux de l’inflation étaient de 0,5 % en 2014, 0 % en 2015, 0,2 % en 2016, 1,0 % en 2017, 1,8 % en 2018, 1,1 % en 2019 et 0,5 % en 2020 ! Le dernier taux annoncé s’élève maintenant à 6,2 % pour novembre 2022, mais dans la réalité, les disparités sont importantes, les augmentations les plus fortes subies par les ménages étant de 11,80 % pour l’alimentation, de 16,9 % pour les produits frais, et de 19,20 % pour l’énergie.
Si l’on s’arrête au simple coût de l’énergie, on voit qu’en moyenne, les Français vont subir une hausse globale de leurs charges de l’ordre de 20 %. Néanmoins, en se limitant au seul coût des carburants nécessaires aux Français très nombreux qui se déplacent, on peut constater que le litre d’essence SP95 était à 1,32 € en novembre 2020 et qu’il est désormais en moyenne de 1,80 €, compte tenu de l’aide de l’État de 10 cts qui doit disparaitre en fin d’année. Au-delà des chiffres officiels, en deux ans, le prix du carburant SP95 aura donc augmenté de 37 % en moyenne, sachant que d’un mois à l’autre les prix du pétrole varient très vite et ne sont pas toujours répercutés sur le prix à payer à la pompe. Et si l’on ne tenait pas compte de l’aide de 10 cts octroyée par l’État, l’augmentation supportée par les consommateurs serait de près de 44 % ! Est-il besoin de rappeler que c’est notamment à cause du prix des carburants que les manifestations des Gilets jaunes ont débuté en 2019.
Les chiffres concernant le prix de l’électricité sont encore plus inquiétants. Et on peut trouver relativement indécent que les pouvoirs publics ne cessent de culpabiliser les Français en leur suggérant de diminuer leur consommation et donc en laissant entendre qu’ils sont responsables à la fois des coûts et des risques de pénurie.
Mais l’inquiétude touche sans doute encore plus les professionnels, artisans, agriculteurs, commerçants et entrepreneurs pour lesquels les hausses du prix de l’électricité risquent d’entraîner la faillite. Et des informations plus ou moins fiables se propagent sur le net à ce sujet. Les reportages publiés sur les chaines de télévision ne manquent pas d’exemples d’entrepreneurs, petits ou grands, qui évoquent des augmentations faramineuses du prix de l’électricité, cause possible de leur « mort ».
Le Ministère de l’Economie lui-même s’en inquiète et sait déjà que certaines entreprises françaises vont sans doute devoir « mettre la clé sous la porte » cet hiver, incapables de faire face à la flambée des coûts de l’énergie. Ces sociétés, mais c’est aussi le cas de nombreux commerçants, comme les bouchers qui manifestaient cette semaine à Paris devant l’Assemblée Nationale, ont alerté l’exécutif ! Les effets conjugués de la pandémie de 2020 et de la crise énergétique liée à la guerre que mène la Russie en Ukraine, risquent de pousser à la faillite de nombreuses entreprises, et encore plus de commerçants, dans des difficultés qu’ils ne pourront pas surmonter. Il convient de préciser que ces derniers, pour ceux qui doivent passer commande, le prix du MWh a dépassé 1.000 euros cet été pour redescendre aujourd’hui à 600 euros, c’est-à-dire à un prix 12 fois plus élevé qu’en 2021.
N’oublions pas non plus que la volonté de tout faire « en même temps » du président de la République pour aider les entreprises à passer le cap de la crise sanitaire et les périodes de confinement, a facilité l’obtention de prêts garantis par l’État (PGE) et que le moment est venu de les rembourser. L’État ne pourra pas éternellement assurer la survie des PME car on sait qu’à la fin du deuxième trimestre 2022, la dette publique s’établissait déjà à 2 916,8 Md€, après avoir été de 2 910,7 Md€ au premier trimestre, soit une augmentation de +6,2 Md€.
Récemment, le FMI a d’ailleurs alerté la France sur ses dérives budgétaires. Son analyse est fondée sur le fait que la hausse attendue des taux d’intérêts, et donc du poids du remboursement de la dette dans notre budget, pourraient nous amener plus vite que l’on n’aurait jamais pu le croire ou le prédire, dans une spirale infernale telle que la Grèce l’a connue. Mais cette fois, l’effet domino d’un défaut de paiements de la France serait d’une ampleur cataclysmique telle, que ni l’Euro, ni l’Europe, ne s’en remettraient. Et quand l’Europe vacille, elle se divise, avant de se déchirer et de vouer aux gémonies les prédicateurs populistes avec qui le spectre de la guerre refait surface.
Le retour du chômage attendu
Les Français voient leur pouvoir d’achat fondre comme neige au soleil. Ceux qui sont déjà dans la précarité n’auront bientôt plus les moyens de se chauffer ou de se nourrir, quand ce n’est pas de se loger, même ceux qui ont encore la chance d’avoir un emploi, même mal payé. Mais le pire est à venir, car de nombreux commerces de bouche, bouchers, boulangers, restaurateurs, notamment ceux qui travaillent dans des petites niches (salades, sandwiches, bowls, etc.) et des restaurants de quartier, en proposant des repas simples et rapides pour les déjeuners, n’auront pas les moyens de rembourser les prêts garantis par l’État, surtout si pendant les mois de pandémie, ils ont omis de faire des déclarations sociales et fiscales obligatoires.
La conséquence de multiples faillites, en cascades tel un effet domino, ce sera l’augmentation du nombre de personnes perdant un emploi dans un secteur déjà compliqué. On sait, en effet, que ces petites entreprises rencontrent de grandes difficultés pour recruter du personnel compétent, disponible, et stable. Ainsi que je l’ai déjà écrit, notre pays a cette particularité que près de 2 millions d’emplois sont disponibles sur le marché alors que près de 3 millions de personnes sont au chômage et ne font jamais un acte de candidature.
À quelles extrémités faudra-t-il en arriver pour conserver un équilibre entre le devoir de solidarité dans les aides sociales et la lutte contre les abus de ceux qui profitent de la loi et vivent aux crochets de la société ? On ne peut pas perpétuellement demander des efforts, même en invoquant le principe de solidarité, à ceux qui travaillent envers et contre tout, malgré les difficultés qu’ils rencontrent comme tout un chacun, et observer sans aucun contrôle ce qui profitent purement et simplement du système.
Ce ne serait sans doute pas très compliqué de mettre en place une organisation imposant la réalisation d’un travail d’intérêt général au profit de la collectivité, en échange d’un salaire minimum garanti aux chômeurs dont il serait prouvé qu’ils ne font aucun effort pour trouver un emploi durable.
Les enfants gâtés
Parlons peu mais parlons clair ! D’abord parce que les disparités existant au sein de notre société ne sont pas tranchées entre des positions extrêmes, les chômeurs volontaires d’un côté et les chômeurs victimes de l’autre. Ensuite parce que l’État a un rôle prioritaire à jouer pour garantir les équilibres et la justice sociale. On a toutefois l’impression que ce dernier ne joue pas toujours son rôle, et qu’à tout le moins, il n’est pas, lui-même, à l’abri de diffuser des approximations populistes et des jugements de valeur simplistes, malheureusement trop souvent court-termistes, quand elles ne sont pas purement clientélistes ou électoralistes.
On a parfois l’impression que, pour l’exécutif, les Français sont un peu comme des « enfants gâtés », qu’ils se plaignent pour un rien, mais que, globalement, tout va bien, les gens vont s’adapter à la hausse du coût de la vie, ils vont adopter des habitudes de vie plus simples, apprendre à ne plus gaspiller et accepter de porter la responsabilité du changement de logiciel sociétal. L’électricité augmente : enfilez un pull. Le gasoil augmente : achetez une voiture électrique. Les taux d’intérêt augmentent : épargnez sur le Livret A.
Mais en fait, c’est oublier purement et simplement que la pauvreté touche près de 20 % de la population française. En 2019, 9,2 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté monétaire Le seuil de pauvreté est fixé par convention à 60 % du niveau de vie médian de la population. Il correspond à un revenu disponible de 1.102 euros par mois pour une personne vivant seule et de 2.314 euros pour un couple avec deux enfants âgés de moins de 14 ans.
En 2022, en l’absence de statistiques Insee et au dire des associations caritatives, le nombre de Français se trouvant sous le seuil de pauvreté serait passé de 9 à 12 millions de personnes, soit un ratio de 18.46% de la population française. La crise économique engendrée par la pandémie du COVID a fait exploser le nombre de pauvres en France et, par conséquent, le nombre de demandes d’allocations RSA (+14 % depuis la mi-2020 par rapport à 2019). Il s’agit, rappelons-le, d’allocations attribuées aux personnes n’ayant pas ou très peu de ressources financières.
On sait déjà que les classes moyennes vont être confrontées à des difficultés inattendues pour subvenir à leurs besoins de base en nourriture et en énergie, que ce soit pour chauffer leur domicile, ou pour mettre du carburant dans leur voiture. Mais la situation sera bien pire pour ceux qui sont déjà en-dessous du seuil de la pauvreté.
Les associations d’aide aux plus démunis s’alarment depuis plus d’un an des ravages de la crise sanitaire et de la crise économique qui s’en est suivie. Les effets de l’inflation brutale de 2022, dont certains prétendent qu’elle ne serait due qu’à la guerre en Ukraine, ce qui est en grande partie faux, viennent se surajouter à une situation de grande précarité que l’on a peine à imaginer dans une démocratie moderne. Les associations mettent en garde l’exécutif contre une flambée sans précédent de la pauvreté, telle qu’on en n’a pas connue depuis la Seconde Guerre mondiale, qui, après les confinements successifs, a fait se multiplier le nombre de nouveaux précaires. Simplement entre mars et mai 2020, 1.270.000 personnes ont sollicité l’aide des associations caritatives, contre 3,3 millions pour l’ensemble de l’année 2019.
La situation, déjà fort inquiétante dans l’absolu, devrait malheureusement empirer compte tenu des effets que les crises et l’inflation auront à termes, sur l’emploi, et, par conséquent sur le taux de chômage, la précarité et le nombre de personnes en situation de précarité. Car les entreprises sont, elles-mêmes, frappées par les mêmes risques, et de façon sans doute plus lourde. Un autre effet démultiplicateur va considérablement peser sur cette dynamique délétère, la pyramide des âges ! Car la retraite de nos Boomers, dont par ailleurs l’espérance de vie augmente, va créer des abysses entre actifs et inactifs, voire dépendants, et ce n’est pas la réforme des retraites qui va d’un coup tout régler.
Le gouvernement a dévoilé les détails du dispositif d’aide aux entreprises qui rentrera en vigueur le 1er janvier 2023 pour faire face à l’augmentation des prix de l’électricité des entreprises. La principale action sera une prise en charge par l’État d’une partie de leur facture à la place des PME, selon une procédure quasi automatique. Le remboursement sera directement effectué auprès du fournisseur d’énergie. Ce dispositif baptisé « amortisseur d’électricité » devrait concerner les petites entreprises (de moins de 250 salariés et de moins de 50 M€ de chiffre d’affaires et 43 M€ de bilan). Il devrait toucher aussi les très petites entreprises qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire comme les particuliers parce qu’elles ont besoin d’une puissance supérieure à 36 KWh, ce qui est le cas, par exemple, de nombreux commerçants dépendant de la chaîne du froid comme les bouchers, les charcutiers ou les boulangers. Il bénéficiera aussi à tous les établissements publics sans activité concurrentielle comme les universités, quel que soit leur statut, y compris les collectivités.
Cet amortisseur électricité vise à couvrir très largement l’ensemble des TPE et PME face au choc énergétique. Tout cela est intéressant, mais est-ce la bonne réponse ? On peut en effet s’étonner du « retard à l’allumage » d’un État qui ne semble pas s’être préparé en amont à la survenance d’une crise de la production électrique qui survient. Il faut tout de même rappeler que la France était au XXe siècle le principal pionnier européen en matière de production électrique moderne, centrale hydraulique d’une part et centrale nucléaire d’autre part. On ne peut que s’étonner des annonces quotidiennes diffusées par la presse faisant état des possibles coupures qui pourraient survenir dans la fourniture d’électricité en France cet hiver.
C’est à mettre en « abîme » avec le sort des Ukrainiens dont les installations électriques sont quotidiennement bombardées chaque jour et qui vivent dans le froid, sous la neige et dans le noir !
Les prix de l’électricité
Les tarifs réglementés de l’électricité couvrent les coûts de :
En résumé, la facture d’électricité d’un particulier se divise en trois tiers, le prix de production, le coût de l’acheminement et les taxes. Les industriels, de leur côté, bénéficient de frais d’acheminement et de taxes moindres.
Depuis le début de la Ve République, le prix de l’électricité dans le « marché de gros » était calculé selon la théorie du « coût marginal ». En clair : c’est le coût de la dernière centrale retenue pour satisfaire la consommation qui fait le prix pour toutes les autres. Qu’il soit issu d’un panneau solaire, d’un barrage hydraulique, d’une centrale nucléaire à gaz importe peu : tous les KWh sont vendus selon la valeur du coût marginal. La création de l’Union Européenne a rebattu les cartes, puisque désormais le prix est calculé selon une péréquation européenne
Et depuis 2010, la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité) a instauré « l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique » (ARENH) qui contraint EDF à vendre à ses concurrents un certain volume d’électricité produite par son parc nucléaire à un tarif fixe, et non plus indexé sur le marché de gros.
 Comme, par ailleurs, l’Europe a ouvert le marché à la libre concurrence, EDF vend à ses concurrents une électricité peu chère que ces derniers vendent avec beaucoup de profits, manque à gagner qui affaiblit EDF dont les infrastructures ne sont pas correctement entretenues, ainsi qu’elle le devrait, d’où les arrêts à répétition des centrales nucléaires trop souvent en maintenance, ce qui explique pourquoi cet hiver EDF devra sans doute acheter de l’énergie à l’étranger, comme elle l’a d’ailleurs fait le 2 décembre dernier ! Hallucinant !
Mais là n’est pas la seule hérésie de notre système. Pour satisfaire, là encore, aux obligations imposées par l’Europe consistant à amener à plus de 30 % la part du renouvelable dans notre mix énergétique, les pouvoirs publics ont subventionné à outrance des installations de parcs photovoltaïques qui grignotent nos terres agricoles, et des forêts d’éoliennes largement décriées, en achetant systématiquement du matériel et des équipements produits généralement à l’étranger… maxi profits et rentabilités à courte vue obligent !
Alors que le nucléaire est, par excellence, une énergie décarbonée, nous n’avons ainsi pas su tordre le bras à nos amis Allemands qui ne nous ont pas autorisé à le comptabiliser dans l’assiette des 30%. Alors qu’avons-nous fait ? Des appels d’offres en cascades, sous l’égide de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) pour permettre à des opérateurs privés de bâtir des parcs et toitures solaires, et d’ériger des éoliennes, en leur garantissant sur 20 ans un prix de rachat bonifié de toute l’énergie produite. Cet effet d’aubaine a couté très cher à la collectivité, et a amoindri notre capacité à investir sur le nucléaire de seconde génération, mais aussi sur l’hydrogène, les batteries, la fusion, etc.
Et pour compléter ce tableau par une dernière touche ubuesque, alors que nos industriels, nos artisans, nos commerçants et nos concitoyens basculent dans le monde de l’électricité hors de prix, et que l’État intervient pour amortir ce choc en nous assurant que cela coûte très cher et ne saurait perdurer sans fléchage des aides, nous jurant au passage que le surcroît de taxes est largement réalloué à ces aides, il convient de faire savoir que la CRE vient de publier que les recettes que procurent à l’État les énergies renouvelables se monteront au total à 31 milliards d’euros sur 2022 et 2023.
Comment cela se fait-il ? La CRE évalue chaque année les « charges de services publics de l’énergie », à savoir les aides liées au soutien aux énergies renouvelables, en l’occurrence le « delta » entre le prix de l’énergie sur le marché de gros, et ce qui fut longtemps le surcoût de celui lié aux contrats de rachats bonifiés garantis sur 20 ans offerts aux opérateurs solaires et éoliennes.
Or comme aujourd’hui le prix de gros de l’électricité a explosé, surpassant largement, de fait, le prix de rachat bonifié, et que les contrats déplafonnés prévoient que, dès que le prix garanti aux opérateurs devient inférieur aux prix de marché, ce sont alors ces derniers qui doivent payer à l’État la différence au lieu que ce soit lui qui « complète » leur rémunération. Les éoliennes sont ainsi devenues de véritables « cash machines » puisqu’à elles seules, elles contribuent pour près de 22 Mds € aux 31 Mds € attendus par l’État. Bien entendu, les opérateurs alternatifs qui n’investissaient dans la création de parcs solaires et éoliens que dans la perspective confortable d’une manne financière sur 20 ans (avec en moyenne 8% de rentabilité), commencent à fermer par anticipation les plus vielles installations (ce que les contrats leur permettent de faire) et tardent à ouvrir celles prévues par les récents appels d’offres de la CRE…
La CRE s’en émeut en rappelant que « ces installations n’ont pu être développées que grâce au soutien financier de l’État dont elles ont bénéficié sur des durées généralement supérieures à dix ans » et jugeant dès lors « tout à fait anormal que les producteurs concernés sortent des contrats garantis par l’État à quelques années de leur échéance pour profiter des prix de gros élevés ».
Au final, cela va ralentir le déploiement des installations et donc affecter notre Mix énergétique, et surtout faire que l’Europe nous pénalisera en nous condamnant à payer des amendes. Décidément, l’effet domino est à multiples bandes.
Selon l’exécutif, le bouclier tarifaire serait reconduit en 2023 ce qui permettra de limiter la hausse des prix de l’électricité à 15 % (tout comme celui du gaz) pour « tous les ménages, les copropriétés, les logements sociaux, les petites entreprises et les plus petites communes ».
Certes, le gouvernement donne l’impression de prendre en considération les difficultés des Français et la précarité de certains d’entre eux, et avancent que les mesures de plafonnement des tarifs de l’électricité coûteront 10,6 Md€ à l’État pour 2022. En 2023, selon le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, le dispositif coûtera aux finances publiques « 11 Md€ pour le gaz et 5 Md€ pour l’électricité ».
Le gouvernement annonce aussi le versement d’un nouveau chèque « énergie » qui sera versé de manière « exceptionnelle », « d’ici la fin de l’année », aux « 12 millions de foyers les plus modestes », c’est-à-dire à quatre foyers sur dix.
C’est très bien, mais il faut tout de même s’interroger sur cette série de mesures dont on nous annonce le coût pour les finances publiques, soit donc pour nos impôts, alors que depuis des années le prix de l’énergie est excessivement taxé et que ce sont déjà les impôts qui permettent à l’État et au fournisseur historique (jusqu’à l’ouverture à la concurrence) d’engranger des profits conséquents dont on se demande quelle a été leur destination, alors qu’on se rend copte de l’état désastreux de notre appareil productif.
Alors, bien-sûr, aujourd’hui, avec l’alibi de la guerre en Ukraine, qui nous prive du gaz russe (dont on pouvait se passer), avec la bonne conscience d’avoir à lutter contre le gaspillage des énergies savamment favorisé par l’État depuis 70 ans, après n’avoir jamais géré cette question en « bon père de famille », c’est-à-dire en prévoyant l’avenir et les lendemains qui déchantent, on doit faire face à la crise climatique et on en revient à cette rengaine assez peu entendable : si on en est là, c’est parce que les Français, consommateurs compulsifs, se comportent mal et abusent des ressources de la planète.
Alors, quand il est trop tard, il est trop tard, les Français devront se priver et payer encore plus d’impôts, de taxes, et rien ne sera dit des dépenses et des gaspillages de l’État, de son impréparation et de son absence de vision !
L’Histoire aurait dû alerter nos dirigeants ! Pas une décennie sans que l’on fasse le constat de ce qui aurait dû être fait ! Et pourtant, les décennies sont passées sans que rien ne change, protection de l’environnement, lutte contre le gaspillage, isolation des bâtiments, tant contre le froid que la chaleur, développement des énergies de substitution aux hydrocarbures, diminution des rejets de CO², etc.
L’anthropologiste George Grant Mc Curdy fait, quant à lui, le lien direct entre énergie et civilisation quand il écrit que : « Le degré de civilisation de n’importe quelle époque, peuple ou groupe de peuples, est mesuré par la capacité à utiliser l’énergie pour l’avancement ou les besoins humains. ».
L’institution cherche des solutions alternatives, en relançant la production d’électricité nucléaire transportable, des éoliennes et du photovoltaïque le long des voies ferrées et des champs agricoles en jachères. Sans aucun doute les voies dans lesquelles il faut s’engouffrer au plus vite sous peine de voir notre économie en grande souffrance 
Bernard Chaussegros
« Crise de l’énergie : à quoi joue le gouvernement ? » Que voulez-vous, lorsque le cœur de nos sociétés est technique et scientifique nos autorités sont d’une culture juridique, financière et encore avec nos 3000 milliards de dette j’en doute. Il faudrait se poser des questions sur la formation de nos autorités par exemple ce De Gaulle n’était pas formaté par le moule..

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