Avec la fermeture de l’hôtel Le Moderne et du restaurant L’eau vive, Espalion perd un pan de son patrimoine mais aussi neuf emplois.
Dimanche dernier, l’hôtel Moderne et le restaurant L’Eau vive ont fermé leurs portes, comme chaque début novembre. Mais à l’inverse des autres années, il n’y aura pas de réouverture en décembre.
Cette année 2013 met un terme à cette maison, véritable institution appartenant au patrimoine d’Espalion et qui aurait fêté ses deux cents ans d’existence en 2024. Victime de la concurrence outrancière d’une hôtellerie rapportée, de la crise économique mais aussi des directives draconiennes pour mettre le bâtiment aux normes européennes, la sauvegarde d’un établissement qui n’a bénéficié d’aucun soutien en dehors de celui de la famille Raulhac s’investissant financièrement et affectivement sans compter.
Aujourd’hui disparaît l’un des plus beaux fleurons espalionnais et aveyronnais mais aussi neuf emplois!
Aurait-il pu être sauvé?
Peut-être avec d’autres orientations: projet immobilier reprenant cet hôtel de 75 chambres grâce aux possibilités d’une vaste construction et de ces espaces. Et le restaurant L’Eau vive à la renommée bien assise aurait lui aussi pu continuer.
C’est en 1824 que la famille Mirabel ouvrait une auberge à l’angle de la route d’Estaing. Au début du XXe siècle, à la suite du mariage d’une des filles, naissait l’hôtel-restaurant Berthier.
Dans les années 1930, une série de travaux (sur des dessins de Numa Ayrinhac, le célèbre peintre-architecte-artiste franco-argentin) transformait l’établissement dans sa forme actuelle côté boulevard de Guizard. Le 5 novembre 1960, Auguste Raulhac et son épouse succédaient à leur ami Jean Berthier qui, en accueillant des peintres de renom, avait contribué à doter Espalion «de cité des peintres».
Aux cuisines, après des études hôtelières à Thonon-les-Bains, s’installaient leurs deux fils, André et Roger. Puis André revenait à Paris à la direction de l’établissement de Montmartre La Reine blanche et Roger, qui avait épousé l’Espalionnaise Raymonde Roux en 1961, prenait en charge l’hôtel Moderne. En 1994, un an après son père, Roger décédait, son fils Jérôme (études à Toulouse où son référent était l’ami de la famille, l’ancien international treiziste Vincent Cantoni) prenait le relais en cuisine et Raymonde continuait à se charger de l’accueil. Aujourd’hui, presque jour pour jour, après 63 ans dans le giron de la famille Raulhac, Raymonde et Jérôme n’ont pu que fermer l’établissement à leur grand désarroi mais aussi de tous les Espalionnais et d’une fidèle clientèle ou ceux de passage, comme le temps d’un film, Simone Signoret, Jeanne Moreau…
La réputation de l’hôtel Moderne, son accueil incomparable, la cuisine recherchée du restaurant devenu L’Eau vive, titre choisi plus tard par le chef Jérôme, pescofi hors pair, s’est bâtie au fil des temps. La clientèle enchantée de l’accueil d’Auguste Raulhac et ses histoires et celui inégalable de Raymonde, de la chaleur rétro de son bar à la peinture du pont Vieux agrandie par les glaces, le charme désuet mais agréable de son salon arborant les toiles d’Ayrinhac, Désiré Lucas, Chauviac, Markowitch… ont contribué à ce renom, tout comme sa cuisine. écrevisses à l’américaine, délices de Mathilde (entrée créée par Roger pour la naissance de sa fille), aujourd’hui les poissons de Jérôme et depuis toujours ces merveilleuses assiettes de multiples pâtisseries. Banquets de classes, d’anciens combattants, communions, mariages au pays, réveillons courus par les Ruthénois, emplissaient la salle de restaurant alors que juillet et août voyaient l’hôtel affichant complet où s’affairaient jusqu’à vingt employés. Puis c’était les rendez-vous annuels des CHR que les firmes en concurrence Suze-Pernod (et son fameux rallye terminé par un repas servi par le Moderne au Foiral à 1 300 convives sous un chapiteau au Foiral), Ricard, Pepsi, Perrier, venaient divertir avec des joutes sportives autour du lutteur Daniel Robin, du coureur Michel Jazy, du rugbyman Christian Carrière ou du pistard Claverie ( M. Quart Perrier du Tour de France). En début des années 1970, c’était aussi l’école hôtelière qu’avait créée Roger et qui, faute de soutien, prit fin au bout de cinq années. Toute une époque dans une ville bien différente aussi!
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