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Spécialiste du patrimoine, cet architecte parisien a brillament restauré une maison de maîtres mauricienne. Le fruit d’une enquête de longue haleine.
C’est simplement une question de méthode. Pour restaurer le Château de Bel-Ombre, une demeure de maître posée au milieu d’une vaste propriété mauricienne, Florent Richard a fait comme d’habitude. Ce qui n’a rien de banal pour ce professionnel dont les chantiers se nomment Sainte Chapelle, Grand-Palais, collège des Bernardins, Comédie Française, Palais Royal, piscine Molitor, Lutétia, Ritz…
Comment rénover un lieu, rester fidèle à son passé tout en le projetant vers le futur? Spécialistes de la restauration du patrimoine, Florent Richard et son partenaire Alain-Charles Perrot ont mis au point une technique qui serait à mi-chemin entre l’archéologie et les méthodes d’investigation des détectives privés. Un vrai travail de fourmi, fouillant les archives, faisant appel à leurs connaissances de l’histoire de l’architecture, des mœurs, de l’art, enquêtant sur les techniques de travail des architectes et des artisans de l’époque qui les concernent. Tout cela en gardant à l’esprit cette phrase qu’ils ont reçue de Viollet-le-Duc, le grand rénovateur de notre patrimoine médiéval au XIXème siècle: «Restaurer un édifice, ce n’est pas l’entretenir, le réparer ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut n’avoir jamais existé à un moment donné.»
Dans la grande salle de réunion de son cabinet parisien, entre des plans de châteaux bretons et des photos de couvents, sous un vaste rayonnage de beaux livres, l’architecte revient sur la longue enquête qui l’a conduit à redonner vie à cette ancienne maison.
L’objectif de cette opération? Accorder à cette demeure construite au XIXème siècle par un riche entrepreneur indien la place qu’elle méritait dans le domaine de Bel-Ombre. Cette propriété de 2500 hectares, située au sud de l’île, au bord de l’océan Indien, est composée d’une vaste réserve naturelle et de champs de canne à sucre. Dans ce grand ensemble, on trouve 2 hôtels de luxe: l’Heritage le Telfair, dont le nom est un hommage au botaniste qui fonda la propriété au début du XIXème siècle, et l’Heritage Awali ; mais aussi un golf de 18 trous à la renommée internationale, des villas de luxe, 12 restaurants, 8 bars, 2 spa et 2 centres sportifs, une école de kitesurf. Pas évident, pour l’ancien «château», de trouver sa place dans un tel dispositif. Florent Richard a su convaincre le propriétaire qu’elle devait être au cœur du domaine.
«Nous voulions offrir à un visiteur de passage un mode de vie qui persiste à Maurice même s’il n’est généralement pas offert comme un service commercial à des étrangers.» En clair, rendre accessible à tous l’art de vivre perpétué par quelques grandes familles qui règnent sur la vie sociale et économique de l’île.
Pour y parvenir, il a fallu beaucoup de patience et d’acharnement: le Château de Bel Ombre a rouvert en septembre dernier après une rénovation de 3 mois mais le résultat qui est donné à voir aux clients de ce restaurant gastronomique désormais doté, à l’étage, d’un appartement, est le fruit de 2 années de travail. «Le Château de Bel Ombre a été construit au XIXème siècle par Hajee Jackaria, qui n’y vécut jamais: l’endroit n’a pas été totalement abouti. Il raconte une histoire que nous avons choisi de poursuivre», explique Florent Richard.
Il a donc fallu partir à la recherche de ce que fut, autrefois, cette demeure. Dans la liste d’un inventaire après décès réalisé en 1841, l’architecte relève la composition exacte de tous les meubles de la maison: un jeu d’échecs, une boîte à thé, des lampes, des carafes, des fauteuils… «De ce constat précis, nous avons tiré une analyse de ce qui existait, de ce qui était identifié et nous sommes partis à la recherche de ces objets.» Florent Richard et son équipe mobilisent alors tout leur réseau: antiquaires, connaissances, pour retrouver sur l’île ou en France des meubles et des objets de la maison: des fauteuils, des vases, des consoles regagnent ainsi leur ancienne demeure.
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«Mais certains ont aussi été retrouvés, avoue l’architecte, grâce à ma culture du navet…» Il se trouve en effet que le Château de Bel Ombre a servi au tournage, en 1978, d’une comédie de Georges Lautner, «Ils sont fous ces sorciers», avec Jean Lefebvre, Henri Guybet: la fine fleur du nanar… «Regardez, s’amuse Florent Richard en allumant sa tablette, sur ces scènes, on retrouve des fauteuils, de l’argenterie qui étaient présentes dans la maison à l’époque. Eh bien c’est grâce à ce film que je les ai retrouvés et qu’ils y ont repris place!»
Pour le reste, il a fallu travailler sur le mode de vie dans une demeure du XIXème siècle, s’appuyer sur les origines anglo-indiennes du fondateur du lieu, rappeler l’histoire de l’île. C’est ainsi que des papiers-peints de la maison Zuber, l’un illustrant des scènes indiennes, l’autre, racontant l’histoire de Paul et Virginie, ont trouvé place assez naturellement dans la maison. «Vous avez là, en résumé, l’histoire de cet endroit», se réjouit Florent Richard.
Si, lors de vos prochaines vacances à l’île Maurice, vous avez l’occasion de dîner au Château de Bel Ombre, prêtez donc un œil attentif à ce qu’il y a autour de vous. Regardez bien le costume du maître d’hôtel avec ses passementeries compliquées ; admirez sur les murs les portraits des propriétaires et les vieux miroirs réfléchissant les scène naïves, éléphants cornaqués, maharadjas enturbannés arpentant le papier peint de la salle à manger ; prêtez l’œil aux bouquets de fleurs coupées, à l’argenterie et aux vases de porcelaine, aux lustres vénitiens et aux rideaux de rafia qui, sous la varangue, vous protègent du soleil tout en laissant passer la brise marine…
On se croirait dans une vieille demeure encore habitée par une famille qui perpétuerait un art de vivre ancien et raffiné, maintenant en usage toutes sortes d’objets. Des vieilleries charmantes et désuètes qui, ailleurs, prendraient la poussière au fond de vieilles armoires fermées, sont ici bien à leur place. Tout semble aller de soi? Vous savez désormais que rien n’est dû hasard.
Le Château de Bel Ombre (00.230.605.50.00), est l’adresse gastronomique du domaine de Bel-Ombre. Le restaurant est ouvert à tous mais l’expérience de la nuit dans l’appartement est réservée aux clients de l’hôtel Heritage le Telfair. La nuit plus le dîner à partir de 180 € par adulte. Le repas au restaurant à la carte.
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Florent Richard, restaurateur du Château de Bel-Ombre, à Maurice : « Nous avons mené une véritable enquête »
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