L’immobilier, un moyen de s’enrichir en dormant ? Rien n’est moins sûr. Le poids de l’impôt, la multiplication des normes et les travaux de mise aux normes énergétiques compliquent la donne.Et un patrimoine locatif, il faut le gérer ! Le marché immobilier est à un tournant, la hausse des taux d’intérêt ampute le pouvoir d’achat des investisseurs, les prix se stabilisent et les transactions s’étiolent. Mais certains ne baissent pas les bras. Pour une raison toute simple : la pierre conserve un atout unique, elle permet de se constituer un patrimoine conséquent en profitant de l’effet de levier du crédit.
« L’immobilier reste une des meilleures protections contre l’inflation pour les investisseurs. En Europe, les banques financent toujours les projets à des taux raisonnables », estime Thibault de Saint-Vincent. Pour le président de Barnes, « hospitality et immobilier sont très complémentaires ». Il va d’ailleurs lui-même faire un pas dans cette direction : son groupe doit reprendre la gestion d’appartements avec services hôteliers début 2024 pour en faire des « Maisons Barnes » à Paris.
Gestion au cordeau. Il n’est pas le seul entrepreneur à regarder du côté de l’hôtellerie. Certains en font leur métier et n’hésitent pas à investir dans la pierre et à chercher à rentabiliser de nouveaux lieux. Le crédit, devenu plus cher et plus rare, rendra les aventures entrepreneuriales un peu plus délicates à lancer. Mais avec un concept qui tient la route, un positionnement bien pensé et une gestion au cordeau, immobilier et hôtellerie peuvent faire bon ménage. Des investisseurs privés et professionnels (plusieurs fonds de private equity) achètent et y croient.
Exemple près de Rambouillet avec l’hôtel Barn ouvert en 2018. Edouard Daehn a choisi un concept bien précis. « Nous avons créé le Barn, qui veut dire grange en anglais, en imaginant dès le départ un concept d’hôtel auberge qui puisse être exploité la semaine comme les week-ends. La semaine, nous accueillons en séminaires et en team building des entreprises pour un ou plusieurs jours, les grands noms du CAC 40 sont nos clients. Le week-end, nous recevons les familles qui recherchent un lieu qui leur ressemble à la campagne », détaille Edouard Daehn. Il en est persuadé, pour redonner vie aux bâtiments désertés de nos campagnes, il faut trouver un second usage aux lieux. « Et pas seulement pendant le week-end ou les vacances, sinon ce n’est pas rentable » prévient-il.
A 43 ans, il affiche une vingtaine d’années d’expérience dans le secteur et a finalement créé un hôtel qui lui ressemble. « Le client type est le même la semaine et le week-end, la quarantaine, curieux, des enfants ». Le concept devrait être dupliqué ailleurs. « Nous avons trois nouvelles opérations en développement : une dans le Vexin, les autres près de Compiègne et en Champagne. La première ouverture est prévue dans un an et demi », annonce celui qui possède déjà une longue expérience du secteur de l’hôtellerie et qui est épaulé par un fonds de dette.
« Je voulais créer un lieu qui réponde aux nouveaux usages. Beaucoup ne se reconnaissent pas dans l’offre de château, avec toile de Jouy, spa, service suranné et dîner gastronomique. Mon idée était de proposer un lieu simple et convivial où être plus proche de la nature. En 2014, j’ai trouvé le terrain idéal pour le faire, 200 hectares dans le parc naturel de Haute Vallée de de Chevreuse. Il appartenait à un propriétaire privé, qui est devenu mon associé », explique Edouard Daehn. Ce propriétaire privé, c’est l’entrepreneur franco-américain William Kriegel, fondateur du Haras de la Cense, pionnier en matière d’éthologie.
Cible identifiée. Le positionnement de cet hôtel auberge de 69 chambres est précis et pensé pour un certain type de clientèle. « Il ne faut pas essayer de plaire à tout le monde, ce n’est pas possible », résume Edouard Daehn. La cible a été bien identifiée. La carte de visite de l’hôtel en donne un avant-goût … « A 45 minutes de Paris en voiture. 1h30 à vélo. Départ chaque vendredi soir de l’équipe cycliste du Barn (rendez-vous Porte Maillot). Le Barn cultive son propre potager. Ostéopathe et masseur ayurvédique à demeure. Diversité des tarifs : À partir de 45 € la nuit en dortoir et de 180 € en chambre ». Familles, tribus, bobos, urbains en quête de nature sont donc bienvenus !
Derrière cette convivialité affichée, de vrais professionnels sont à la manœuvre. Le restaurant, ouvert aux clients de l’extérieur, mise sur la simplicité. « La restauration représente 40% de notre chiffre d’affaires. Le fait d’avoir des clients en semaine comme pendant les week-ends nous permet d’avoir une équipe suffisante, 50 personnes travaillent au Barn », explique le patron de l’établissement.
Offre originale. Ceux qui rêvent grand leurs projets immobiliers ont encore moins le droit à l’erreur que les autres. L’investissement du premier hôtel Barn représentait 20 millions d’euros. Un budget consacré à l’achat des terrains, à la construction et à la rénovation des lieux (3500 m² de bâti) afin d’en faire des espaces cozy, la maison de campagne de ceux qui n’en ont pas. L’architecture, pensée pour respecter les paysages, s’inspire d’ailleurs des hangars agricoles qui se trouvaient sur le site. « Ce n’est pas plus compliqué de faire grand que petit. L’hôtellerie, c’est un vrai métier, un métier de chien. C’est pour cela que beaucoup s’y brûlent les ailes. Il faut se donner de vrais moyens de développement et de marketing et proposer une offre originale », estime Edouard Daehn.
Quand ils investissent, les particuliers fortunés, les chefs d’entreprise qui cherchent à réemployer le produit de leur vente, le font de moins en moins la fleur au fusil. « Nous voyons arriver des projets qui ont mûri depuis le confinement de la part d’investisseurs qui recherchent une diversification patrimoniale et qui ont des budgets de 5 à 15 millions d’euros. Ce qui est nouveau, c’est que ce sont des projets dans lesquels il y a un vrai business plan », observe Olivier Brunet chez Barnes.