«Jamais je n’aurais osé le demander !» C’est avec ce cri du cœur que Patrick Lusson, responsable études et data chez LDLC, a accueilli l’annonce faite par son patron cet été. Laurent de la Clergerie, fondateur de cette société lyonnaise de vente en ligne de matériel informatique, a promis à 800 de ses salariés de les faire passer dès 2021 à la semaine de quatre jours, sans perte de salaire. Une décision à contre-courant du «travailler plus» ambiant et «indépendante de la pandémie», assure le PDG. «L’idée a germé dans mon esprit l’année dernière après avoir lu un article sur Microsoft.» En août 2019, le géant américain de l’informatique a en effet testé la semaine de quatre jours pour les salariés de sa filiale japonaise.
Résultat de l’expérience : une hausse du bien-être des salariés et une augmentation de la productivité de 40%. «Je m’en suis inspiré, persuadé que donner un jour de plus aux équipes, afin qu’elles puissent faire tout ce qu’elles n’ont pas eu le temps de faire dans la semaine, leur permettra de souffler un peu et de se ressourcer», argumente le dirigeant qui va mettre en place un mode de roulement pour que toutes les deux ou trois semaines les salariés puissent poser leur vendredi, jour évidemment très demandé.
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En interne, l’annonce de cette réduction du temps de travail a été très bien accueillie, en dépit de la crainte de certains cadres de ne pas parvenir à tout boucler en 32 heures de travail hebdomadaire. «Je les ai rassurés en leur disant qu’ils y arriveront s’ils délèguent davantage et responsabilisent leurs collaborateurs. C’est un cercle vertueux : les cadres travailleront moins, et les équipes monteront en compétences», note ce dirigeant éclairé.
Cette initiative a bien sûr un coût pour l’entreprise, environ 1 million d’euros, mais Laurent de la Clergerie est prêt à en payer le prix. «Il n’y aura pas de baisse de salaire pour les collaborateurs, ils seront payés 35 heures pour 32 heures travaillées. En contrepartie, l’entreprise embauchera une trentaine de personnes pour pallier le trou d’horaires généré par la journée libérée», s’engage le PDG, qui n’exclut pas l’idée de passer, un jour, à 28 heures travaillées par semaine.
Un bâtiment de plus de 8.000 mètres carrés entouré de murs végétaux, avec un rooftop, des jardins, une salle de sport, un dinner’s à l’américaine, des espaces de détente, des bureaux flex… Cet été, en plein cagnard aoûtien, 700 des 1.400 salariés du groupe Leboncoin – les équipes commerciales, ressources humaines, finance, publicitaire – ont déménagé pour investir UFO (Unique Flexible offices), nouveau siège du site de petites annonces. L’implantation choisie en plein cœur du 2e arrondissement de Paris, dans le Sentier, a été actée de façon collégiale. «Nous avons calculé un barycentre à partir des adresses des collaborateurs pour déterminer une zone cible. Il était important que le site ne soit pas trop éloigné du domicile des équipes», explique Alexandre Collinet, directeur général adjoint de l’entreprise.
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Car au Bon Coin, on ne plaisante pas avec les conditions de travail, saluées et approuvées par 90% des salariés. Pas question de les décevoir ou de voir fondre cette cote d’amour avec un déménagement, considéré bien souvent comme une source de stress et d’inquiétudes. «Nous avons monté une équipe projet avec une dizaine de membres du personnel pour qu’ils participent à l’aménagement des espaces et se sentent impliquées dans le projet.»
Résultat de ces consultations : des dizaines d’idées créatives, comme notamment la création de 12 «cabinets de curiosités», sorte de salles de travail décorées avec des ambiances voitures, musique, bibliothèque… le tout dans un esprit vintage. «Nos effectifs ont une moyenne d’âge de 33 ans, il est important d’attirer les talents et de les fidéliser avec des conditions de travail optimales. C’est un levier essentiel aujourd’hui, il faut savoir donner envie pour recevoir», assure le dirigeant. Pari réussi : le taux d’absentéisme n’est que de 2% contre 5% en moyenne en France.
Un dimanche après-midi, en rase campagne et, soudain, le besoin impérieux de voir un médecin pour un enfant malade ! C’est ce qui est arrivé à ce salarié d’Oracle, qui, en moins d’une heure, a obtenu une téléconsultation avec un professionnel de santé. Comme les 1.400 collaborateurs du groupe informatique, il s’est simplement connecté à Concilio, un service de consultations santé mis en place par son employeur. «Il s’agit d’une plateforme médicale qui donne accès 24 heures sur 24 à des téléconsultations ou des prises de rendez-vous avec des généralistes ou des spécialistes», explique Isabelle Quaak, responsable rémunérations et avantages sociaux chez Oracle France.
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Déployé juste avant le confinement, le service fait déjà des émules : 515 salariés inscrits et plus de 630 demandes de téléconsultations et/ou de RDV. «Cette solution offre une vraie valeur ajoutée au personnel : pas de déplacement, pas d’attente, pas de délais de rendez-vous à rallonge… C’est un gain de temps pour eux et, au final, un gain de productivité pour nous», estime Isabelle Quaak. Un échange gagnant-gagnant !
Chez Dataiku, spécialiste du traitement de la data, une cinquantaine de salariés s’est convertie à… l’ikigaï ! Cette philosophie japonaise qui consiste à trouver un sens à sa vie et une raison d’être se répand comme une traînée de poudre dans le monde des start-up. Dataiku, créée en 2013, n’échappe pas à la tendance et s’est emparée de ce levier d’épanouissement personnel. Elle offre à l’ensemble de ses salariés la possibilité de poser 2,5 jours (payés bien évidemment) par année d’ancienneté pour se consacrer à de bonnes causes. «C’est une volonté des fondateurs de l’entreprise, ils veulent partager leur réussite avec les collaborateurs en leur permettant de s’investir dans des actions à impact qui donnent du sens.
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Les salariés peuvent ainsi s’engager auprès d’associations comme les Restos du cœur, Action contre la faim, Vaincre la mucoviscidose, Girls in Tech… et donner soit de leurs temps, soit de leurs compétences», explique Emilie Stojanowski, manager du programme Ikig-Ai en interne. Depuis le lancement de l’initiative début 2019, plus de 265 jours de bénévolat ont été débloqués par les salariés de l’entreprise. «L’opération a du succès, car elle permet aux salariés de s’investir dans des actions utiles qui les valorisent.
Nous sommes heureux de les aider à trouver leur ikigaï au travail», poursuit la manager qui reçoit régulièrement des retours positifs des «Dataiker». Comme celui d’Ina, du service marketing : «J’ai participé pour la première fois à une collecte de nourriture pour les Restos du cœur. J’ai pu aider et cette expérience m’a apporté beaucoup de joie.» Ou encore d’Alexandre, formateur : «Je suis fier que ma boîte encourage ses salariés à faire ce genre d’actions. C’est rare !» Tellement inhabituel que Dataiku a reçu pour cette innovation RH un Awards du bien-être au travail, décerné par le cabinet Bloom at Work.
Travailler sérieusement sans se prendre au sérieux ! Avec la communication, l’équité et la reconnaissance, le «fun» est l’un des quatre piliers fondateurs de L’Olivier Assurance, filiale du groupe britannique Admiral. Depuis la création de l’entreprise en 2011, les 370 salariés français répartis sur deux sites à Marseille et Paris sont à tour de rôle invités à devenir membres du MOF (Ministry Of Fun), comprenez le ministère du fun. «Chaque mois, le temps d’une journée, les équipes d’un département animent les bureaux avec des activités ludiques. Il peut s’agir de concours de danse ou de chant, de braderies, d’ateliers, de jeux sous forme de quizz…
L’objectif est de développer et de renforcer la cohésion d’équipe en s’amusant», explique Aude Cousin, la directrice des ressources humaines. A Paris, 100% des salariés (principalement des cadres et des fonctions support) jouent le jeu et participent aux événements du MOF. A Marseille, où travaillent plus de 300 téléconseillers, le taux d’adhésion est moins élevé, avec une petite centaine de participants chaque mois. «Nous n’imposons rien, les salariés s’inscrivent s’ils le veulent, mais 88% apprécient ces événements qui favorisent la convivialité et, surtout, sortent de l’ordinaire», reprend la DRH.
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Du «samedi pyjama» au «vendredi tout est permis» en passant par des concours inspirés des émissions de télé «Top Chef» ou de «La France a un incroyable talent», les salariés sont libres d’exprimer à leur guise leur créativité. «Cela impose de nous renouveler et de trouver des activités qui changent pour ne pas lasser les collaborateurs. Mais nous en sommes convaincus : les gens qui font ce qu’ils aiment avec le sourire le font mieux.» Cette ambiance décontractée est complétée par un ensemble de petits bonus : actions gratuites attribuées à l’ensemble des salariés, primes indexées sur la performance mais aussi sur des indicateurs de qualité…
En 2016, quand Henry Engelhardt, le fondateur du groupe, a annoncé sa retraite, il a offert 1.000 livres sterling à chacun des employés en signe de gratitude et de reconnaissance. Cette philosophie du partage et du fun semble porter ses fruits : le turn-over de 15% est bien en deçà des 25% observés dans le secteur et l’entreprise est passée, en six ans, de la 39e à la 11e place du palmarès Great Place To Work.
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Laurent était directeur d’un centre auto dans le Sud, il est aujourd’hui cadre au siège de Norauto France, à Sainghin-en-Mélantois, près de Lille. Il a suivi le programme Zig Zag proposé par son employeur nordiste. «Nous facilitons les parcours de mobilité interne et offrons la possibilité à nos 6.500 collaborateurs de passer d’un poste à l’autre selon leurs envies et leurs aptitudes», explique Louise Baert, leader recrutement chez Norauto. Pour leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires à leurs évolutions de carrière, le spécialiste de l’entretien et de la réparation auto met le paquet sur la formation.
En 2019, 105.000 heures ont été dispensées dans son école interne, L’Institut, et ses 34 centres de formation répartis dans toute la France. «7.600 collaborateurs ont été formés l’année dernière dans nos différents sites, et 113 ont obtenu un certificat de qualification professionnelle (CQP). Ce diplôme valide leurs compétences et leurs acquis. Il est reconnu, c’est un plus à ajouter à leur CV», souligne Louise Baert. Bilan de ce retour sur les bancs de l’école : une note de 4,03/5 concernant la satisfaction des salariés et surtout 3% de turn-over en moins en 2019. «C’est un indicateur précieux pour nous, il permet d’avoir une photographie concrète de la fidélisation des équipes et de l’attachement des salariés à l’entreprise.» Une loyauté visiblement bien ancrée: chez Norauto, l’ancienneté moyenne des collaborateurs est de quinze ans.
On connaissait le congé maternité, paternité et parental en cas de naissance ou d’adoption d’un enfant. Les salariés d’Aviva peuvent y ajouter le congé parentalité, un concept précurseur inventé de toutes pièces par l’assureur français en 2017. «C’est un congé pour le second parent, de dix semaines, à prendre dans les six mois qui suivent l’arrivée ou l’accueil de l’enfant. Il est payé normalement, la rémunération de base est maintenue», détaille Sylvie Chartier-Gueudet, directrice inclusion et bien-être au travail. Proposé depuis plus de deux ans, le dispositif progresse d’année en année en interne : il a séduit 80% des nouveaux pères et mères de l’entreprise en 2018 et 98% en 2019. Il a même fait des émules à l’extérieur.
Début 2020, 100 entreprises comme Blablacar, L’Occitane ou Big Mama se sont elles aussi engagées sur le terrain de la parentalité. Elles ont signé la charte «Parental Act» proposant au moins quatre semaines de congé entièrement rémunérées au deuxième parent. «La parentalité a sa place dans les trajectoires de carrière, qu’on soit un homme ou une femme. La société évolue, nos collaborateurs aussi, ils ont de nouvelles attentes en matière d’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, et d’égalité professionnelle», insiste Sylvie Chartier-Gueudet. La directrice bien-être, également initiatrice de nombreuses actions en direction des salariés en situation de handicap ou appartenant à la communauté LGBT, est persuadée des avantages de ces mesures d’inclusion : «Quand un collaborateur sait qu’il peut prendre du temps pour se consacrer à sa vie de famille, il est aussi plus présent et enclin à donner en retour à l’entreprise.»
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Pendant la période du confinement, le groupe a ainsi instauré une nouvelle organisation pour accompagner les parents d’enfants scolarisés ou en bas âge. Outre la généralisation du télétravail, passé de 40% à 98% de l’effectif, les collaborateurs ont eu la possibilité de réduire leur temps de travail (de 10 à 50%) sans réduction de salaire. “«Nous avons aussi accompagné la scolarité. Dans certaines régions, les écoles ont été fermées, les parents ont pu se sentir démunis, je pense notamment à ceux qui avaient des enfants qui passaient le bac ou le brevet, mais aussi des plus petits qui se retrouvaient à faire l’école à la maison. Nous avons mis en place ce que l’on appelle le Campus de la Parentalité, une offre de cours à distance. Plus de 180 parents l’ont utilisée.» Une enquête post-confinement a indiqué que 91% des salariés ont apprécié les mesures de bien-être mises en place par leur employeur pendant la période.
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