C’est enfin le bout du tunnel pour un château dont les premières traces remontent au XIIème siècle et qui a accueilli de nombreux souverains de François Ier à Louis XIII en passant par la régente Catherine de Médicis. A travers la lourde grille en fer fermée par une chaîne et un cadenas, le spectacle est navrant : de hautes herbes partout et une bâtisse au toit effondré dont les quelques ouvertures ont été murées avec des parpaings pour des raisons de sécurité. Cette vision sera bientôt un mauvais souvenir.
Après la signature du compromis de vente, le 18 novembre dernier, les travaux préliminaires de réhabilitation et de réaménagement du château et de son parc vont commencer ces prochains jours. Des entreprises vont venir sonder le terrain et faire des relevés des mesures à l’intérieur du château.
A la tête du projet, l’opérateur immobilier Atland, coté à l’Euronext, qui sera maître d’ouvrage. Les plans ont été conçus par le cabinet Francilienne d’architecture et d’urbanisme, situé en région parisienne et dirigé par Guy Difftot. Ce dernier avait déjà tenté de racheter le château en 2017 pour y aménager des logements adaptés aux handicapés. Un temps évalué à 800 000 euros, le château abandonné avait vu sa valeur chuter et Guy Difftot avait pu l’obtenir pour 300 000 euros. Mais à l’époque, la préfecture n’avait pas suivi.
Six ans plus tard, les choses sont bien différentes et le projet bien avancé. “Sur les 6000 mètres carrés de parc, le projet est de construire une résidence multigénérationnelle”, précise Guy Difftot. “Il y aura d’une part, 80 logements T2 et T3 pour des personnes âgées, et d’autre part, 30 maisons T3 et T4. Il y aura aussi 3 parkings représentant 188 places et un espace commun de 100 mètres carrés. Pour le château, il est prévu de reconstituer la façade extérieure à l’identique, avant l’incendie de 2017 et de réaménager l’intérieur en appartements en accession à la propriété.”
Le chiffrage pour le château n’est pas encore connu. Pour le parc, Atland va investir pas loin de 12 millions d’euros. “Entre l’obtention du permis de construire et les travaux, nous tablons sur un calendrier de 26 mois, château inclus.”
Ce n’est pas la seule bonne nouvelle pour le château. Il y a un mois, une demande a été déposée auprès de la DRAC (direction régionale des affaires culturelles) pour le classer aux monuments historiques. Une décision jugée “essentielle” par l’investisseur car ce dernier pourrait bénéficier d’aides de l’Etat pour la réhabilitation. Si elle était favorable, le château rejoindrait la chapelle, la croix de chemin et les deux églises de la ville, Saint-Martin de Montigny et Sainte-Marie-Madeleine de Maignelay, à l’inventaire.
De 1965 à 2022, six propriétaires se sont succédé au château. En 1972, Ladislas Szabo, un sculpteur hongrois avait essayé d’en faire une résidence d’artistes, mais le projet avait tourné court. Les trois suivants, deux Allemands et une Polonaise avaient le projet d’en faire un hôtel-restaurant de luxe ou un lotissement de haut standing, mais rien n’a abouti, au contraire.
“Le château a fini par être complètement abandonné à partir des années 80“, se rappelle le maire Denis Flour. “Il a été régulièrement pillé et un incendie s’est déclaré, fragilisant l’édifice. Dans les années 90, la maire , Jacqueline Girardeau a pris deux arrêtés municipaux pour obliger le propriétaire de l’époque, Günther Knahl, à prendre des dispositions pour mettre le bâtiment en sécurité.”
Petit à petit, le château a perdu de sa splendeur. La végétation a commencé à manger la façade. A l’été 2017, un énième incendie l’a achevé en faisant s’effondrer une partie du toit déjà fragile. Des stigmates toujours visibles aujourd’hui.
Entre-temps, en 2007, le château est finalement vendu à Francesco Marini. “Un homme très sympathique issu d’une famille italienne installée en Belgique“, précise Denis Flour. “C’est un homme d’affaires dans le secteur de l’immobilier d’entreprise qui partage sa vie entre l’Oise et le nord de l’Italie. Son père, qui habite également l’Oise, a tenu une boutique d’antiquités près du Louvre.”
A son tour, Francesco Marini veut faire du parc un lotissement d’habitations de standing et rénover le château pour en faire un hôtel-restaurant qui pourrait aussi accueillir des entreprises pour des séminaires résidentiels ou des journées d’étude. “Il a déposé un permis de construire pour le parc. Il l’a obtenu en 2012. Rien ne s’est passé et quelques mois plus tard, j’ai eu la surprise de découvrir notre château en vente sur le Bon Coin. J’ai téléphoné à Francesco Marini qui m’a confirmé qu’il voulait vendre.”
Après l’échec de rachat par Guy Difftot en mai 2018, la situation paraissait désespérée. Le 18 novembre dernier, la signature du compromis de vente avait quelque peu rassuré Denis Flour. “Nous n’avons jamais été aussi loin dans la négociation et c’est la première fois qu’un compromis est signé.“
Le château et son parc envahi par les herbes semblent en passe de connaître une nouvelle vie. L’inauguration du nouvel ensemble pourrait avoir lieu dans un peu plus de deux ans. En attendant, place aux premiers relevés.
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