Le leader de la Nupes et LFI, Jean-Luc Mélenchon, le 10 septembre 2022 à Brétigny-sur-Orge, près de Paris.
afp.com/Thomas SAMSON
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Après la gestion désastreuse de l’affaire Quatennens qui a montré un Jean-Luc Mélenchon à rebours par rapport à son propre camp, la marche organisée par le mouvement le 16 octobre dernier devait être l’occasion de lui donner un nouvel élan. Que ce soit au départ ou à l’arrivée, cette marche a davantage réveillé les divisions de l’extrême gauche. Les encouragements de Jean-Luc Mélenchon à “faire mieux” que 1789 n’ont pas été du goût de tous et la faible mobilisation n’a pas permis de redorer l’image du leader. Pour certains commentateurs, il n’en faut pas plus pour voir dans cette manifestation le dernier tour de piste de la Nupes et de son meneur. Quelle erreur ! Ne nous méprenons pas : si Mélenchon est à contretemps ce n’est pas parce qu’il a un temps de retard mais bien parce qu’il a un coup d’avance. Si 1789 est dans le rétroviseur, c’est le début de l’année 2023 qui est en ligne de mire. Les mouvements sociaux d’octobre n’étaient qu’une répétition d’un spectacle qui, dès le début de l’année prochaine, mêlera art de la rue et théâtre parlementaire. 
En effet, à défaut de pouvoir imposer son agenda politique à l’Assemblée cet automne, La France insoumise s’est concentrée sur la rue. Pour ce faire, hologrammes et autres meetings immersifs ont été remisés en coulisses au profit d’une scénographie plus classique. Les fondamentaux de l’extrême gauche ont signé leur grand retour : blocage des raffineries et des dépôts pétroliers ; manifestations ; grèves générales dans les services publics, dans les transports en commun et dans les organisations étudiantes. Il faut dire que le souvenir des gilets jaunes est encore dans tous les esprits. En 2018, le mouvement s’était défait de la tutelle des partis et des syndicats. Pour 2023, les Insoumis veulent éviter toute contre-programmation et s’imposer non seulement comme l’unique vecteur de la contestation sociale, mais aussi comme le point de convergence de toutes les agitations. Ainsi, lors de cette première “étape de la mobilisation” pour reprendre les mots d’Alexis Corbière au micro d’Europe 1, les thèmes sont pour le moins consensuels et couvrent à dessein toutes les colères. Mi-octobre, les manifestants pouvaient marcher pour défendre le pouvoir d’achat ou bien pour dénoncer l’inaction climatique, ou encore pour rappeler que “[la vie vaut] plus que [les] profits”. 
L’Assemblée non plus n’a pas été en reste en termes de répétitions cet automne. Le vote du budget a permis aux députés d’extrême gauche d’entrer dans leurs personnages et de réviser leurs textes. Car avant de laisser place à la rue, c’est sur les fauteuils rouges du Palais-Bourbon qu’auront lieu les premières parties d’un spectacle qu’on devine déjà : des milliers d’amendements pour ralentir les débats et des interventions outrageantes pour les attiser (Acte I), jusqu’à ce que le gouvernement n’ait pas d’autre choix que de passer en force en utilisant le 49.3 (Acte II) et enfin les cris d’orfraie de l’extrême gauche face à l'”absence de débat” et à la “violence” et l'”irresponsabilité” du gouvernement (Acte III). Le dépôt d’une motion de censure restera lettre morte car non votée avec les autres oppositions, mais la rue, elle, pourra prendre le relais avec l’onction parlementaire et assurer la seconde partie d’un navrant spectacle (Acte IV). Car, à en croire les propos tenus dans le cortège du 16 octobre par certains députés de la Nupes comme Sandrine Rousseau : la rue est désormais la seule option pour “renverser le gouvernement” (Acte V). 
Comédies en trois actes ou tragédies en cinq, les prochaines réformes proposées par le gouvernement seront autant d’occasions d’assurer cette convergence entre les deux extrêmes gauches du pays : celle qui siège au Parlement et celle qui bat le pavé. La réforme des retraites prévue pour le début de l’année 2023 marquera la première représentation d’un cirque qui risque de se produire non seulement cet hiver mais bien de s’installer pour plusieurs saisons. En dépit d’une crise économique et énergétique qui nécessite la mobilisation de tous les Français et la réforme rapide de notre pays, chaque nouveau texte s’annonce d’ores et déjà pour la Nupes comme autant d’opportunités pour rejouer ce même numéro et ainsi déstabiliser l’exécutif. Le gouvernement déjà affaibli risque d’être, comme la majorité des Français d’ailleurs, le spectateur impuissant de cette mascarade.  
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