Sans attendre la présentation, à la rentrée, du projet de loi d'urgence sur les énergies renouvelables, le gouvernement vient de prendre plusieurs mesures réglementaires. Une accélération dictée par la hausse du coût des matériaux.
Par Joël Cossardeaux
En attendant de servir sur la table du Conseil des ministres, à la rentrée, le projet de loi d'exception pour amplifier le déploiement des énergies renouvelables, Agnès Pannier-Runacher fait passer les hors-d'oeuvre sous la forme de dispositions de nature réglementaire . La ministre de la Transition énergétique a annoncé jeudi soir une série de mesures d'urgence destinées à accélérer le mouvement sans attendre.
Cet empressement n'est pas directement dicté par la crise due à la guerre en Ukraine et à la flambée du prix des énergies fossiles. C'est surtout le renchérissement du coût des matériaux de construction des équipements des parcs éoliens et photovoltaïques qui pousse le gouvernement à vouloir agir vite et à éviter, autant que possible, les hausses à venir.
D'ores et déjà, pas moins de 7 gigawatts pour les projets solaires et 5 à 6 gigawatts pour l'éolien risquent de subir des retards ou tout simplement de ne pas démarrer, « leurs coûts réels n'étant plus couverts par le prix d'achat de l'électricité ou du biométhane garanti par l'Etat », indique-t-on au ministère de la Transition énergétique (MTE). Pour faire en sorte que ces nouvelles capacités puissent sortir dans les temps, le gouvernement a pris, par voie réglementaire, des mesures applicables dans les prochains jours.
La première joue sur les délais. Elle consiste à « autoriser les projets de production d'énergie renouvelable électrique sous le régime des compléments de rémunération à vendre leur électricité sur les marchés durant 18 mois avant la prise d'effet de leurs contrats ». Autres dispositions, plus classiques : la hausse du coût des matériaux sera prise en compte pour tous les futurs projets de production d'énergie renouvelable électrique (y compris celle à base de biométhane), tandis que la baisse des tarifs pour les projets photovoltaïques développés sur des bâtiments sera gelée pour l'année 2022.
Par ailleurs, tous les projets déjà lauréats d'appels d'offres pourront, sans justification, « augmenter leur puissance jusqu'à +40 % avant leur achèvement ». Enfin, le délai de mise en service pour les installations de production de biométhane ayant obtenu leur autorisation environnementale, va être allongé.
Agnès Pannier-Runacher a également annoncé le prochain lancement d'un nouvel appel d'offres photovoltaïque en Outre-Mer, en Corse, et dans les Îles du Ponant (zones non interconnectées), au large de la Bretagne. Façon d'accélérer les procédures de développement des projets, avant que le futur projet de loi d'urgence ne permette de le faire frontalement, un nouveau guichet tarifaire va être mis en oeuvre au niveau du « petit photovoltaïque ».
Sont visés les projets solaires développés à même le sol de moins de 1 mégawatt, situés sur des terrains dégradés, urbanisés ou à urbaniser, ainsi que les « traqueurs solaires ». Ces appareils, à l'encombrement relativement faible, suivent en temps réel le mouvement du soleil.
L'annonce de ces mesures en a précédé une autre, faite de concert ce vendredi matin par Agnès Pannier-Runacher, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et Hervé Berville, secrétaire d'Etat à la Mer. Les zones pour l'implantation du projet de parcs éoliens en Sud Atlantique ont été retenues. D'une capacité d'environ 1.000 mégawatts, ses installations posées au large d'Oléron, à plus de 35 km des côtes, pourront être complétées ultérieurement d'un second parc d'une puissance équivalente, éventuellement flottant.
L'enjeu énergétique est élevé. Le projet devrait permettre de satisfaire l'équivalent de la consommation électrique de 1,6 million d'habitants, soit plus du double de la population de Charente-Maritime. Après le débat public, organisé cet hiver et dont le gouvernement indique avoir tenu compte des conclusions, va s'ouvrir un dialogue concurrentiel pour la désignation du lauréat du premier parc. Celui-ci devrait être connu début 2024 en vue d'une mise en service au début des années 2030.
Joël Cossardeaux
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