Ce projet à l’échelle d’une commune de 10 000 habitants est un cas d’école. Un concentré de l’ensemble des sujets que soulève le développement urbain. De quoi parle-t-on ? De la construction par les sociétés Erilia et Edelis d’un ensemble immobilier de 97 logements, dont 41 logements locatifs sociaux. Ce programme immobilier va voir le jour le long du chemin du Four à Chaux, sur un terrain de 23 372 m²acquis auprès d’un privé et environné de maisons individuelles. Un secteur où l’urbanisation se conjugue encore à la nature. La phase de démolition,…
Ce projet à l’échelle d’une commune de 10 000 habitants est un cas d’école. Un concentré de l’ensemble des sujets que soulève le développement urbain. De quoi parle-t-on ? De la construction par les sociétés Erilia et Edelis d’un ensemble immobilier de 97 logements, dont 41 logements locatifs sociaux. Ce programme immobilier va voir le jour le long du chemin du Four à Chaux, sur un terrain de 23 372 m² acquis auprès d’un privé et environné de maisons individuelles. Un secteur où l’urbanisation se conjugue encore à la nature. La phase de démolition, défrichement et terrassement vient de commencer. Le coup d’envoi des travaux de construction sera donné au premier trimestre 2023, pour une livraison prévisionnelle au troisième trimestre 2024. Rien de bien original jusqu’ici.
Sauf que la zone du projet immobilier a fait l’objet d’une expertise naturaliste en 2020. Car elle se compose de prairies, de zones humides et de boisements. Deux espèces végétales communes mais protégées en Aquitaine ont été inventoriées : le lotier grêle et le lotier hispide. Ces plantes herbacées occupent 5 600 m². Leur présence va donner lieu à une mesure de compensation visant à réduire l’impact du chantier.
La question était au menu du conseil municipal du 6 octobre. Une délibération portait sur la mise à disposition par la mairie d’un terrain de 7 000 m² pour y recréer des conditions favorables aux lotiers. De quelle manière ? « Il s’agit de prélever une épaisseur de terre avec racines et graines du foncier du Four à Chaux pour la transporter jusqu’à la parcelle de compensation. Un suivi sera assuré sur 30 ans », détaille Valérie Kociemba, adjointe en charge de la transition écologique. La parcelle de compensation est située à 2,6 kilomètres du projet immobilier. Erilia et Edelis s’engagent à verser une redevance de 80 000 euros à la commune pour finaliser l’opération. « Le suivi des plantes sera réalisé par CdC Biodiversité, après accord de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et sous les directives de l’assistant à maîtrise d’ouvrage Ecosphère », confirme-t-on chez Erilia.
« Au-delà des lotiers, on a imposé aux promoteurs le respect des zones humides et le maintien des arbres remarquables. De plus, un espace laissé en nature sera accessible à la population du quartier », souligne Valérie Kociemba.
Le sujet fait débat. Trois élus d’opposition ont voté contre cette délibération. « Nous pensons que les compensations écologiques vont à l’encontre de l’urgence climatique. Ces dispositifs servent souvent à justifier des projets immobiliers et à masquer les effets négatifs sur la biodiversité », selon Laetitia Mauhé-Berjonneau, du groupe Le Taillan Autrement. Le projet des 97 logements pose plus largement le problème de la densification urbaine, et de son acceptation par des riverains soucieux de préserver leur cadre de vie.
Si l’on excepte la déviation routière qui ne relève pas du champ communal, la maire Agnès Versepuy rappelle qu’il s’agit seulement de la deuxième compensation acceptée en 8 ans au Taillan. En outre, le terrain dédié aux lotiers « est et restera en zone naturelle inconstructible », affirme-t-elle.
Quant à la bétonisation excessive, elle s’en défend. « On essaie toujours de négocier une réduction au plus bas de la densité avec les promoteurs. Dans le cas présent, il y a eu cinq plans de masse. Les 97 logements seront implantés sur une immense parcelle. En l’occurrence, 75 % des espaces en pleine terre sont conservés », avance-t-elle, satisfaite du compromis trouvé. Une application à la lettre du Plan local d’urbanisme aurait autorisé une multiplication par trois du programme. « Tout le monde doit y trouver son compte. Refuser tout permis de construire, c’est prendre le risque de finir au tribunal, de perdre et de se retrouver 10 ans plus tard avec 300 logements au même endroit. Il vaut mieux verrouiller avant », considère Agnès Versepuy, confrontée comme d’autres à l’attractivité de la métropole bordelaise.
Avec une part de 41 logements sociaux sur 97, ce projet met aussi en lumière les carences du Taillan en la matière. Les raisons ont beau être historiques, la sanction s’applique. Loin de satisfaire à la règle des 25 % de logements sociaux, la Ville paye chaque année une pénalité comprise en 150 000 et 160 000 euros pour ce manquement à la loi. Avec le risque de voir un jour les contraintes se durcir. Comme chez le voisin de Saint-Aubin-de-Médoc où Bordeaux Métropole dispose désormais de la prérogative d’user du droit de préemption pour imposer du logement social.

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