Le maître de l’angoisse à la française surprend avec son nouveau roman, une enquête sans flic dans laquelle il joue sur les peurs communes. Un huis clos en plein air où les apparences sont trompeuses.
On le sait, dans sa jeunesse, Maxime Chattam s’est abreuvé des récits de Stephen King (entre autres), se forgeant une imagination où suspense et terreur règnent en maîtres. Alors, quand il met en scène un écrivain raté qui part chercher l’inspiration dans une station de ski isolée et fermée pendant la belle saison, on sent l’ombre du King planer sur les montagnes. Bien sûr, on pense à Shining et Chattam ne s’en cache pas : la station de Val Quarios a des airs d’hôtel Overlook, jusque dans certains éléments du décor. Une idée qu’il avait en tête depuis longtemps, mais à cause du roman du roi de l’horreur, il n’y parvenait pas, tant cette œuvre est une référence.

Finalement, l’envie a été plus forte. Et Maxime Chattam s’est servi de ces ressemblances pour en faire de subtils clins d’œil, incorporés à son récit. Les fans apprécieront. Les points communs s’arrêtent là, car pour ce qui est de l’histoire, elle prend une tournure bien différente de celle dans laquelle Jack Torrance (1) se laisse emporter…

L’horreur peut revêtir de multiples formes. Celle dissimulée dans ces pages est particulièrement terrifiante…

L’autre tour de force du roman, c’est l’ambivalence des genres. Captivé par le récit, ballotté d’un fait étrange à une explication qui n’a rien de surnaturel, sans pour autant dissiper les soupçons, il est difficile de se faire une idée précise du caractère du roman. Thriller réaliste ou enquête fantastique ? Le doute subsiste jusqu’au dénouement, instillant une forme de terreur psychologique. Réellement bluffant !
L’horreur peut revêtir de multiples formes. Celle dissimulée dans ces pages est particulièrement terrifiante…
Maxime Chattam joue avec ses lecteurs. Il les promène dans des lieux abrités des regards, les confronte à des peurs communes, celles qui surgissent dans les endroits sombres, isolés… Il fait monter la tension avec de petits phénomènes, troublants, dérangeants. Mais comme dans ces films où le détail le plus insignifiant finit par révéler son importance à la fin, il parsème son récit d’indices, de preuves. Patiemment. Et lorsque vient le dénouement, tout s’imbrique, tout est clair. Le lecteur avait les bonnes cartes en main pour comprendre. Aucun subterfuge, aucune triche. L’illusion est parfaite.

Éd. Albin Michel, 464 p., 22,90 €. 1. Dans « Shining », Jack Torrance est un écrivain qui part garder un hôtel, accompagné de sa femme et de son fils, en plein hiver, espérant trouver l’inspiration grâce à l’isolement.
Lire un extrait du livre ici.

Les habitués ne seront pas surpris, Maxime Chattam propose au début de L’Illusion des albums de musique pour accompagner la lecture. Une habitude qui remonte au Sang du temps (2005) et qu’il prend plaisir à partager. Une façon d’aider à l’immersion dans un autre monde, à l’écoute de mélodies qui posent le décor, l’ambiance. Maxime Chattam lui-même lit et écrit en musique. Lors de la rédaction du chapitre 75,
il a écouté en boucle, jusqu’à la dernière ligne, le morceau We Go on, tiré de la bande originale du film Doctor Sleep. Un morceau avec des passages touchants, graves ou inquiétants. Idéal pour la fin.
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