Romuald Peronne, vigneron à Banyuls-sur-Mer, est aussi le président du syndicat du vignoble de la Côte-Vermeille. Il a démarré les vendanges le 8 août, le degré étant déjà au rendez-vous. Sécheresse et chaleur ont fait évoluer les raisins, ce qui va compliquer la tâche des producteurs du secteur.
Les années se suivent entre Banyuls et Collioure mais ne se ressemblent pas. "L'an passé, se remémore Romuald Peronne du Clos Saint-Sébastien, on a eu du mal  à faire des vins au-dessus des 15 degrés. Cette année à la mi-août on est déjà à 14. On est dans l'obligation de rentrer les raisins alors que la maturité des peaux n'est pas faite. Mais autant pour les blancs que pour les rosés, on ne peut plus attendre. Maintenant, c'est à la vinification et au travail de cave que tout va se jouer. Pressurage avec grappes entières, séparation des jus, première, seconde et troisième presses, choix des levures, travail du froid, tout devra se faire avec attention et précision. Ce millésime, pour les vins secs, va être très technique." Pour ce qui est des rouges, qui ne seront rentrés que dans une semaine ou plus, selon les producteurs, il est encore trop tôt pour estimer la qualité finale. "Je pense que leurs typicités peuvent se révéler très intéressantes, avec de la puissance et de la concentration", estime cependant Romuald Perrone.
La chaleur, la sécheresse, le manque de fraîcheur nocturne, ont fait souffrir les vignes. Alors qu'en juin la récolte s'annonçait des plus belles, depuis plus d'un mois les ceps ont commencé à perdre leurs feuilles, la maturité des raisins s'est ralentie, l'eau des grains s'est évaporée, les baies se sont desséchées, le degré alcoolique s'est affolé par concentration sans richesse des tanins et des polyphénols des peaux. De plus, le rendement ne sera pas celui des années précédentes. "Ce sera, en tout état de cause, une belle année pour les vins doux naturels", constate encore le patron du clos Saint-Sébastien. Le vignoble de la Côte-Vermeille, soit trois caves coopératives et 47 indépendantes, commercialise entre 8 000 et 9 000 hl de banyuls (VDN) et entre 16 000 et 18 000 hl de collioure sec dans les trois couleurs. On sera cette année en dessous de la moyenne.
Même constat de précocité à l'ouest du département, sur le terroir de Maury. Les premières vendanges ont été réalisées le 9 août (muscat sec) et le muscat doux a commencé à être cueilli le 11. "C'est exceptionnel autant pour le premier que le second cépage, constate Aurélie Pereira la présidente de la cave coopérative de Maury. La vendange est saine, mais les baies sont petites, à cause bien sûr du manque d'eau. L'évolution de la concentration en sucre a été rapide, le souci c'est que le rendement qui est prévu sera en dessous de la moyenne." Comme leurs collègues de la Côte-Vermeille, on s'attend aussi à un travail en cave délicat afin de trouver les bons équilibres, autant pour les vins doux que les vins secs. De l'avis de la présidente, "les vieilles vignes ont moins souffert que les plus récentes", qui, elles, n'ont pas encore un enracinement profond leur permettant d'aller trouver l'humidité. Les parcelles taillées pour les vendanges mécaniques ont aussi été plus sujettes à la sécheresse. "Mais il suffit que l'on bénéficie, ces jours-ci, de grosses pluies, pour que les choses évoluent favorablement, assure de son côté Bernard Rouby, vigneron sur le terroir. Avec une belle précipitation les récoltes se referont une santé. Ce qui est certain c'est que ce millésime sera particulier. Mais tout peut encore évoluer en quelques jours si la pluie venait à tomber."
La canicule, qui de l'avis général va devenir récurrente d'années en années, fait évoluer le paysage viticole. Les parcelles situées plein sud, deviennent moins prisées que celles plus en altitude, plus au frais, et qui font face à la mer, leur garantissant ainsi une certaine humidité. De l'avis des spécialistes du cru, il faudra faire évoluer dans les années à venir au moins un tiers du vignoble du secteur, quitte à abandonner les vignes dont le rendement est trop faible. "À moins de 15 hl/ha, confie un vigneron, il vaut mieux arrêter de la travailler. Les terres à 400, 500 mètres d'altitude, ont de l'avenir, c'est certain. Et il y en a à foison." Des terrasses qui ont été souvent laissées à l’abandon, car inaptes à produire des banyuls à la grande époque des VDN il y a 30 ans. Il va falloir investir, pour les défricher, les travailler, les replanter. Donc plusieurs années à patienter avant d'y faire entrer les premiers vendangeurs. Mais la viticulture c'est aussi penser à l'avenir et investir pour les générations suivantes.
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