La France demande à l'UE de se prononcer sur l'attitude du gouvernement Meloni dans la gestion de l'accueil du navire de migrants « Ocean Viking ». Le ministre italien des Affaires étrangères a présenté ce lundi à ses homologues des pistes pour trouver une solution commune.
Par Olivier Tosseri
« L'Italie ne peut pas être la seule porte d'entrée en Europe des migrants », martèle Giorgia Meloni, la nouvelle Première ministre italienne. C'est ce que ne cesseront de répéter ses ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur à leurs collègues européens cette semaine, et cela devait commencer lors d'une réunion à Bruxelles des chefs de la diplomatie des Vingt-Sept ce lundi soir. Rome demande à ses partenaires une solution commune pour « défendre » les frontières extérieures de l'UE et élaborer un plan de redistribution des migrants efficace et équitable. « La solidarité sur ce dossier ne doit pas être un simple slogan », avertissent les autorités transalpines.
La France a demandé à « l'Europe de se prononcer très rapidement sur les suites à donner » au refus d'accueillir le navire « Ocean Viking » et ses 230 migrants à bord. Un ton jugé « agressif, excessif et incompréhensible » par l'Italie, tout comme la suspension par Paris de l'accueil prévu de 3.500 migrants actuellement dans la péninsule, ou encore le renforcement des contrôles policiers français à la frontière.
« Nous n'avons aucun problème avec la France et personne ne veut jeter de l'huile sur le feu », a tenté de temporiser Antonio Tajani, le ministre italien des Affaires étrangères, face à ces mesures de rétorsion. Mais la confiance est bien rompue entre Emmanuel Macron et Giorgia Meloni. Aucune rencontre bilatérale n'est prévue en marge du G20 de Bali et le chef de l'Etat français ne communique pour l'instant qu'avec le président de la République italienne, Sergio Mattarella.
« L'Europe doit intervenir dès aujourd'hui avec un plan Marshall pour l'Afrique et élaborer une stratégie commune sans quoi nous devrons bientôt gérer des millions de migrants », prévient Antonio Tajani. Devant ses homologues à Bruxelles, il exige l'abolition pure et simple du « règlement de Dublin » qui responsabilise jusqu'à présent les pays où les migrants font leur première entrée dans l'UE.
« L'exemple à suivre est celui de l'accord signé avec la Turquie », invoque Giorgia Meloni, qui a abandonné sa promesse électorale de « blocus naval des côtes nord-africaines ». Elle veut désormais que l'UE établisse en Algérie, en Libye et en Tunisie des centres de migrants pour les identifier et évaluer les demandes d'asile. Ils seraient pris en charge par du personnel humanitaire européen, avec la présence de forces militaires en Libye, toujours en proie aux affrontements entre milices.
L'Italie demande aussi un règlement européen pour les navires des ONG en Méditerranée qui ont secouru 16 % des 90.000 migrants arrivés cette année sur les côtes de la péninsule. Elle souhaite que les migrants soient pris en charge par l'Etat auquel chaque bateau qui les sauve est rattaché par son pavillon. Le ministre de l'Intérieur italien, Matteo Piantedosi, envisage de faire preuve d'autant de fermeté que son prédécesseur Matteo Salvini. Les ONG devront démontrer qu'elles ont sauvé des migrants sur une embarcation en difficulté, sans quoi elles seront soumises à une lourde amende et à la saisie de leurs navires.
« Les ONG sont des taxis des mers », fustige Antonio Tajani, s'appuyant sur un document de l'agence européenne Frontex selon lequel « la présence des ONG en Méditerranée serait un 'pull factor' » (un facteur d'attraction des migrants). L'ONU préfère évoquer un « push factor », celui des conditions inhumaines des centres de détention de migrants en Libye. Un avis partagé par l'ambassadeur d'Allemagne à Rome. « Les navires des ONG sauvent des vies là où manque l'aide des Etats, a-t-il tweeté. Leur engagement humanitaire mérite notre reconnaissance et notre soutien. » Le gouvernement allemand a annoncé à cette occasion une aide de 8 millions d'euros.
Giorgia Meloni ancre l'Italie dans le camp occidental
Olivier Tosseri (Correspondant à Rome)
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