Alors que les coûts de la santé explosent, Stefan Meierhans déplore la lenteur avec laquelle l’Office de la Santé publique fait avancer certains dossiers
Lors de sa conférence de presse annuelle, le surveillant des prix, Stefan Meierhans, a une nouvelle fois thématisé les coûts de la santé, mais cette fois-ci avec plus de pathos dans la voix que par le passé. «Le temps de la résignation face à l’explosion de ces coûts est passé. Il est grand temps d’agir», a-t-il souligné en énumérant plusieurs mesures: «Il faut appliquer le principe d’économicité lors de la fixation des prix et accorder un droit de recours aux assureurs et aux associations de patients.» Il a aussi plaidé pour une intervention sur les «prix surfaits» de la Liste des moyens et appareils (LiMA).
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C’est l’exemple qui tue, que cite toujours Monsieur Prix. Dans une droguerie ou une pharmacie, une paire de béquilles coûte entre 20 et 40 francs pour un consommateur normal. Mais lorsqu’un assuré muni de son ordonnance médicale s’en procure une, elle est facturée 80 francs à sa caisse maladie. Comment est-ce possible?
La réponse se situe précisément dans la LiMA, une liste créée en 1996 et dont les prix sont fixés par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). Sur quels critères exactement, on l’ignore. Une partie de l’explication réside dans la législation, qui accorde une grande importance à la sécurité du patient. Lorsqu’une personne qui s’est foulé la cheville va de son propre chef s’acheter une paire de béquilles, elle peut choisir son article entre plusieurs fournisseurs soumis à un régime de concurrence.
En revanche, le patient au bénéfice d’une ordonnance médicale devra se rendre dans une pharmacie homologuée par le canton, dans laquelle travaillent des employés à la formation reconnue. Cela suffit-il à justifier l’énorme différentiel de prix? Pas aux yeux de Felix Schneuwly, responsable des affaires publiques du comparateur de primes Comparis.ch, qui soutient le surveillant des prix dans son combat: «Les prix des articles de la LiMA sont trop élevés. Je suis persuadé que la question de la sécurité du patient prend trop d’importance dans ces prix», déclare-t-il.
A l’issue de sa conférence de presse, Stefan Meierhans s’est montré très critique envers l’OFSP. «Il manque dans cet office un management efficace dans ce dossier. La liste LiMA existe depuis vingt ans et n’a encore jamais été révisée totalement à l’heure où les prix évoluent constamment», déplore Monsieur Prix. Celui-ci fait remarquer qu’il a attiré l’attention sur ce problème en 2009 déjà et qu’il a fallu qu’il alerte l’émission des consommateurs de la TV alémanique Kassensturz pour que les choses commencent à bouger.
Selon une estimation faite par l’association des caisses Santésuisse, il y a là un potentiel d’économies de plus de 100 millions par an. Stefan Meierhans réclame désormais que les prix de ces produits fassent l’objet d’une comparaison internationale ainsi que d’un réexamen annuel.
De son côté, l’OFSP relativise les choses. «Le produit figurant sur l’ordonnance ne doit pas être facturé plus cher que ce qu’il coûte en vente directe. C’est le prix du marché qui est déterminant», assure-t-il. Une réponse dont ne se satisfait pas Monsieur Prix: «La réalité est différente. Le système de valeur plafond fixée par la liste incite les pharmaciens à proposer des béquilles à leur prix maximal.»
Quant aux économies à réaliser, l’OFSP les juge largement surévaluées. Selon lui, le prix des articles les plus vendus de la liste a été plusieurs fois abaissé. «Le potentiel d’économies encore à réaliser est minime, d’environ 10 millions», estime l’office, dirigé depuis huit ans par Pascal Strupler et relevant de la responsabilité politique d’Alain Berset.
Quoi qu’il en soit, l’OFSP a réagi. En décembre 2015, il a mis sur pied un groupe de travail qui a pour but de procéder à une révision totale de la LiMA d’ici à 2019. Il envisage aussi la possibilité d’un réexamen «périodique» des prix. C’est une victoire teintée d’amertume pour Monsieur Prix. Il aura fallu attendre plus de dix ans pour qu’une réforme se réalise.
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