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Enfin, le nouveau classement des propriétés de l’appellation de Saint-Émilion est révélé. Pour la plupart des domaines, c’est une délivrance, la conclusion d’un travail de plusieurs mois passés à compléter les centaines de pages d'un dossier de candidature plus dense et fourni que la barbe de Bacchus. Ce fut un pensum pour des propriétaires déjà bien occupés par les vignes, la bonne marche de leur entreprise dans un contexte difficile et la commercialisation de leurs vins. Mais la démarche administrative était aussi fastidieuse qu’incontournable pour tous ceux prétendant maintenir leur rang ou évoluer. 
Pour les propriétés qui changent de rang, accèdent à la catégorie des grands crus classés, des premiers grands crus classés ou, mieux encore, des premiers grands crus classés A, la récompense est à la hauteur de la lourdeur de la démarche. Certains verront dans leur nouvelle position dans l’ordre des vins de l’appellation phare de la rive droite bordelaise une garantie de prix records, tant pour le foncier que pour la bouteille. Pour les autres, plus bas dans le classement, c’est parfois une indispensable assurance de prix plancher.  
Au sein de l’appellation Saint-Émilion – 5 400 ha et un peu plus de 500 viticulteurs –, le classement établit trois catégories : les grands crus classés, les premiers grands crus classés et les premiers grands crus classés B ou A, la fine fleur. Accéder au rang de premier grand cru classé A, c’est s’installer sur l’Olympe de la rive droite. 
Dans le petit monde du vin, ce nouveau classement n’est pas vraiment une surprise. Il consacre l’évolution d'une seule propriété de premier plan – Château Figeac –, et confirme la position de Château Pavie, qui avait rejoint la super catégorie en 2012.  
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La qualité des vins de Château Figeac (41 ha) est au plus haut, et ont obtenu la note de 99/100 de la part de notre équipe de dégustatrices sur les millésimes 2018, 2019 et 2020. En outre, la propriété de la famille Manoncourt s’est dotée il y a deux ans d’un nouveau chai conforme à ses convictions environnementales. Les architectes bordelais Caroline Marly et Guy Y-Troprès en charge de sa réalisation, suite à un concours organisé par le cabinet d’ingénierie chargé de définir les besoins en production de la propriété, ont pris en considération la philosophie de la famille, où on est ingénieur agronome de père en filles. 
Aujourd’hui, Marie-France Manoncourt et ses filles Hortense Idoine-Manoncourt et Blandine de Brier-Manoncourt veillent à l’avenir de la propriété. Thierry Manoncourt, disparu en 2010, donna au vin du domaine son style. Une forme d’expérience esthétique dans des registres de douceur et de légèreté, indissociable d’une approche scientifique qu’il poussa au-delà de ce qui se faisait dans la plupart des châteaux après la guerre. Il mit au point un engrais naturel à partir du broyage de sarments. En 1945, il inaugura le concept de second vin, expérimenta la thermorégulation, l’élevage en barrique neuve, l’approche parcellaire… Une approche qui perdure aujourd’hui, avec notamment la sélection massale.  
En 1972 déjà, les Manoncourt inauguraient un chai en avance sur son époque. L’édifice a tenu ses promesses pendant presque cinq décennies. Celui qui est sorti de terre il y a deux ans engage lui aussi la propriété sur le long terme. «Nous manquions de place pour réaliser une vinification telle que nous la souhaitions, en infra parcellaire, c'est-à-dire en vinifiant séparément les raisins issus de chaque sous-parcelle, pour que la précision de notre travail dans la vigne trouve sa traduction dans le chai», insiste Hortense Idoine-Manoncourt. «Pour y parvenir, il a fallu tripler la surface des installations», explique Frédéric Faye, le directeur général, un autre ingénieur agronome.
Château Figeac
Quarante-huit cuves sur mesure y ont été installées, mais aussi un laboratoire de recherche. Le nouveau site devrait donner un plus grand confort de travail aux équipes. D’ingénieux systèmes de contrepoids permettent d’ouvrir les lourds capots des cuves sans effort. Un acousticien a travaillé l’univers sonore du chai pour limiter la fatigue auditive. Si les hommes sont pris en compte, tout a aussi été pensé afin que la faune locale, des rongeurs aux chauves-souris, ne soit pas dérangée.
«Tout ce travail a été fait pour renforcer la typicité de notre vin», explique Marie-France Manoncourt. Ces dix dernières années, le vignoble a été restructuré, mais l’encépagement qui mixe à parts quasi égales le cabernet sauvignon, le cabernet franc et le merlot, a été conservé. C'est sans doute la proportion importante – et inhabituelle – de cabernet, qui donne à Figeac une saveur unique en son genre. Ainsi, le cabernet sauvignon apporte structure et longévité, mais aussi des notes de fruits noirs assorties de pointes poivrées. Le cabernet franc lui donne ses notes florales et sa fraîcheur. Le merlot enrobe l’ensemble et lui apporte douceur et rondeur. Il suffit de remonter un peu dans le temps pour comprendre le potentiel de garde de Figeac avec, par exemple, le millésime 2009 à l’équilibre irréprochable, le 2000 emblématique de la propriété avec ses notes poivrées, le 1970 et sa fraîcheur sensuelle ou le 1959, toujours aussi vaillant, puissant, vibrant.
Pour s’adapter à l’air du temps et à des consommateurs dépourvus de cave qui consomment des jus récents, la propriété a tout de même ajusté sa vinification «en travaillant avec des cuves en bois qui permettent de gagner en douceur, d’amener de l’amabilité sur les vins jeunes», explique Frédéric Faye. Le 2015 en est un bel exemple, déjà fort charmeur malgré sa jeunesse. Tous ces efforts, ces adaptations, viennent d’être récompensés. 
Château Pavie
Le nouvel arrivant forme désormais un duo de champions avec Château Pavie (37 ha), propriété de Gérard et Chantal Perse. Les Perse sont gâtés par un terroir superbe : la tension et la fraîcheur des vins issus des parcelles calcaires du plateau est compensée par la rondeur de ceux des pieds de milieu et du bas de côte, plus ronds.
Gérard Perse et son épouse Chantal comptent indiscutablement parmi ceux qui ont contribué au rayonnement de l’appellation Saint-Émilion. Pourtant, ces deux-là ne viennent pas du monde bachique. Ils débarquent de la région parisienne après une première carrière dans la grande distribution. Gérard Perse connaît le vin, sait l’acheter et le vendre. Il est aussi doté d’un très bon palais. Le couple fait l'acquisition de Château Monbousquet en 1993 et de Château Pavie, cinq ans plus tard. Le prix alors payé pour Pavie était bien excessif, se gaussaient les «initiés». S’ensuivent quelques coups bas des locaux. Isolés à Saint-Émilion, les Perse vont bénéficier du soutien providentiel d’un certain Robert Parker, grand gourou de la dégustation et de la notation qui fait et défait les réputations. L’Américain apprécie Pavie et le fait savoir. Finalement, en 2012, lors du dernier classement décennal des grands crus de saint-Émilion, Pavie rejoint le firmament de la rive droite, comme premier grand cru classé A de Saint-Émilion
Une fois de plus, le classement remet en lumière l’appellation. «Qu’on en dise du bien ou du mal, quand tout le monde en parle, c’est un succès» : la maxime de Boris Vian pourrait s’appliquer à Saint-Émilion et son classement des grands crus. Le feuilleton continue. Les derniers épisodes avaient été saignants. Après l’annonce en juillet 2021, du retrait de Château Ausone, propriété de la famille Vauthier et de Château Cheval Blanc, pépite du groupe LVMH, un autre coup de tonnerre avait résonné avec Château Angélus qui annonçait lui aussi quitter le classement, jugé «vecteur d’antagonisme et d’instabilité». Contactée par Le Figaro, Stéphanie de Bouard-Rivoal, présidente d’Angélus, expliquait alors que «la marque Angélus, très forte» allait «continuer à faire les plus grands vins en s’affranchissant d’un carcan de contingences acceptées jusque-là».
Avec le nouveau duo de tête, la donne change. Les projecteurs sont de nouveau braqués sur l’appellation.
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