Une semaine après le débarquement du navire humanitaire, l’accueil des personnes exilées a tourné au chaos. Ce qui rend leur sort encore incertain.
L'accueil des personnes exilées présentes sur l'Ocean Viking a viré au chaos cette semaine.
L'Express
Pour le ministère de l’Intérieur, l’Ocean Viking était l’occasion pour la France de démontrer son efficacité sur le volet migratoire. Raté ! Des libérations par la justice, des mineurs isolés introuvables, une centaine de rescapés refusés sur le territoire… La gestion française des migrants de l’Ocean Viking tourne au “carnage”, une situation “hors de contrôle” pour l’opposition, tandis que l’exécutif s’en prend à l’Italie. Depuis que le navire humanitaire affrété par SOS Méditerranée a accosté à Toulon vendredi 11 novembre, au terme d’un bras de fer diplomatique qui a dégradé les relations franco-italiennes et relancé une polémique en France sur l’immigration, les 234 rescapés ont été placés dans un centre de vacances du Var. Celui-ci a été transformé en “zone d’attente” internationale d’où ils ne pouvaient en théorie pas sortir.
Mais une semaine plus tard, cette stratégie semble voler en éclats sous le coup de décisions de justice, de départs inopinés des centres d’accueil pour les mineurs et d’imbroglio autour des expulsions. Les 189 adultes placés dans la zone d’attente située sur la presqu’île de Giens, à Hyères, ont tous été auditionnés par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), qui devait déterminer le bien-fondé de leur demande d’asile pour qu’ils soient officiellement admis sur le territoire.
En parallèle, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a annoncé, vendredi, avoir validé la remise en liberté de la “quasi-totalité, voire la totalité” des 108 rescapés qui réclamaient de ne plus être enfermés. “J’ai refusé leur placement en geôles car ce ne sont pas des délinquants”, précise au Monde Renaud Le Breton de Vannoise, premier président de la cour d’appel, qui a piloté une mobilisation générale de sa juridiction pour tenir les délais.
L’agence française de l’asile a par ailleurs “émis 66 avis favorables à une admission sur le territoire”, a précisé Charles-Edouard Minet, sous-directeur du conseil juridique et du contentieux du ministère, lors de l’audience au Conseil d’Etat consacrée à la pertinence de la zone d’enfermement créée par les autorités.
Ces personnes “vont pouvoir être relocalisées” vers les onze pays européens (dont l’Allemagne, la Finlande ou le Portugal) qui s’étaient portés volontaires pour les accueillir après leur débarquement en France, a indiqué Place Beauvau à l’AFP. De leur côté, les associations sur place restent sur leurs gardes : “Notre vigilance portera également sur l’effectivité du droit des personnes à déposer leurs demandes d’asile”, a déclaré La Cimade.
L’Ofpra a émis “123 avis défavorables” et les personnes concernées “font l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire”, a indiqué vendredi devant le Conseil d’Etat un représentant du ministère de l’Intérieur. Sollicité, ce dernier n’a pas indiqué si ce refus conduirait à une procédure d’expulsion. En début de semaine, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait affirmé qu’au moins 44 personnes qui avaient reçu un avis défavorable seraient “reconduites” dans leur pays d’origine, dès que leur santé le permettrait.
“Plus d’une dizaine d’autres migrants, jugés non éligibles par l’Ofpra mais dont la justice a demandé la libération, auraient également été conduits vers ces centres et peuvent désormais entamer une procédure de demande d’asile”, avance le quotidien du Monde. La situation ” évolue de minute en minute”, a reconnu le ministère devant le Conseil d’Etat, à tel point que le gouvernement estimait à douze le nombre de migrants toujours dans le centre, vendredi après-midi.
Cependant, certaines organisations dénoncent le caractère expéditif de la procédure et pointent du doigt de nombreuses violations du droit d’asile dans le déroulement des entretiens administrés par l’Ofpra. “Les personnes sauvées par l’Ocean Viking sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux dans ce lieu d’enfermement qui n’a rien d’un village de vacances : violations du droit d’asile, personnes portant des bracelets avec numéro, absence d’interprétariat, absence de suivi psychologique effectif, pas de téléphones disponibles et pas de visites de proches, pas d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits”, s’indigne l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers, dans un communiqué daté du 15 novembre.
Aussi, 26 mineurs isolés sur les 44 secourus ont déjà quitté les structures d’accueil mises à disposition par le Conseil départemental du Var. Il s’agit d’enfants sans parent, et qui se retrouvent désormais à la rue sans ressource ni logement. “Emmanuel Macron et Gérald Darmanin ont leur “affaire Leonarda“. Notre gouvernement est humilié par la fugue de 26 “mineurs” de l’Ocean Viking et les Français constatent, une fois de plus, que tout cela est hors de contrôle”, a déploré la candidate RN à la dernière présidentielle, Marine Le Pen, en allusion à la gestion sous François Hollande de l’expulsion d’une collégienne rom.
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