Quand il se lança dans l’aventure de la construction du canal du Midi pour relier Toulouse à la Méditerranée, Pierre-Paul-Riquet ne se doutait pas que le bassin de Saint-Ferréol, alimenté par les sources de la Montagne Noire, deviendrait, à la fin du XIXe siècle une plage à la montagne, lieu de rendez-vous préféré des amateurs de loisirs et de plein air. Ce réservoir d’eau de plus de 6 millions de m3 et de 4, 3 km de circonférence, situé sur trois départements (Aude, Tarn et Haute-Garonne), alimente toujours le canal du Midi. Il est classé depuis 1996 au Patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco.
Pour Pierre-Paul Riquet, le génial inventeur et bâtisseur du canal du Midi, tout commence en 1647 quand il vient s’installer à Revel, à 38 ans. Il est alors receveur des gabelles pour les greniers de Mirepoix et de Castres. Depuis 1547, le roi Henri II concède aux "fermiers" le prélèvement de l’impôt en échange d’une somme forfaitaire fixe. Donc plus le montant de l’impôt est élevé et plus le "fermier" de la gabelle s’enrichit. C’est ce que fera Riquet. "Sa détermination était celle qu’aurait pu avoir un chef d’entreprise pour développer et faire encore plus fructifier son activité", explique Gérard Crevon, un des historiens du canal du Midi. Son idée est de transporter encore plus de sel depuis Narbonne jusqu’aux entrepôts sur le chemin de Toulouse et même Castres. Comme tout bon Languedocien né à Béziers, Riquet s’intéressait à un projet de canal qui pourrait relier la Garonne à la Méditerranée. C’est en 1651, quatre ans après son arrivée à Revel, qu’il se penchera sur le sujet. En 1662, il dévoile à Colbert son projet de construire un canal établissant la liaison entre les fleuves Aude et Garonne, réalisant ainsi le vieux rêve du canal des deux Mers. Pour réussir dans cette entreprise, il compte utiliser les ressources en eaux de la Montagne Noire, où s’écoulent plusieurs rivières d’importance. Son idée est simple : intercepter une part des volumes d’eau nécessaires au remplissage et à l’entretien du canal en construisant une rigole qui croise le lit de ces rivières. Cette rigole doit acheminer l’eau prélevée jusqu’au seuil de Naurouze, le point le plus haut du canal du Midi. Et comme le débit des rivières baisse pendant une grande partie de l’année, à cause de l’insuffisance de pluies, Riquet projette de construire plusieurs barrages pour faire des "magasins d’eau" où seront stockées des réserves.
Après discussion avec les experts qui l’entourent, Riquet convient d’édifier un seul et grand barrage sur la rivière du Laudot, en un lieu propice à cette construction, le vallon appartenant en grande partie à un protestant de Sorèze, Madaule de Saint-Ferriol. La première pierre est posée avec toutes les solennités requises le 18 avril 1667. Le chantier va mobiliser quotidiennement des centaines de personnes. Auprès de ses ouvriers, la réputation de Riquet est vite faite. On sait qu’il paye bien, qu’il fournit les outils, et, qu’en plus, il paye les journées chômées ou d’absence en cas de maladie. Quand le futur président des Etats-Unis, Thomas Jefferson, viendra visiter Saint-Ferréol, en 1787, pour s’inspirer de l’ouvrage pour son projet de canal reliant le Potomac, l’Ohio et l’Hudson, il sera impressionné par la complexité du passage de l’eau dans la digue et par la galerie des robinets en bronze mais non en bois. Il retiendra également l’aspect humaniste de Pierre-Paul Riquet, précurseurs de ce qui allait devenir la "sécurité sociale".
Déjà, en 1672, le barrage est partiellement mis en eau. Les travaux se poursuivent jusqu’en 1680. En 13 ans, le plus grand barrage d’Europe à l’époque voit ainsi le jour. En 1686, Vauban, commis par le roi pour inspecter les ouvrages du canal, préconise la surélévation du barrage afin de renforcer les réserves en eau. Les travaux sont réalisés de 1687 à 1692. La rehausse est de 4,87 mètres et la contenance théorique du réservoir portée à 6,3 millions de mètres cube. Il rallongera aussi le pied de la digue que l’on connaît aujourd’hui.
La vidange complète du lac de Saint-Ferréol se fait tous les 10 ans. En 2002, la digue devenant poreuse, VNF a entrepris de lourds travaux en construisant un mur d’étanchéité à l’intérieur de l’ouvrage de retenue d’eau. La pinède, elle, a été plantée il y a plus de cent ans.
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Quand on pense qu'à l'époque, si les écolos avaient existé, ce site et le canal du Midi n'auraient jamais vu le jour.
Quel massacre environnemental aurait pu être évité
Saint-Fé.