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«Les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise», Jean Monnet, Mémoires (1976)
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Points de vue
Communiqué, Credit Suisse
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Selon l’étude de Credit Suisse, l’emploi a progressé de 7,4% dans la région francophone entre 2014 et 2019, contre 5,3% à l’échelle nationale, avec des pics dans les cantons de Genève et de Vaud.
La Suisse romande s’est montrée très dynamique durant la dernière décennie. Dans son ensemble, malgré sa diversité géographique et économique, cette région a enregistré une croissance du PIB, de l’emploi et de la population supérieure à la moyenne suisse. Selon les indicateurs les plus récents, les entreprises romandes ont plutôt bien résisté à la crise du COVID-19. Les postes vacants n’ont jamais été aussi nombreux que début 2022. Si les difficultés de recrutement se font ressentir, la Suisse romande semble moins touchée par la pénurie de main-d’œuvre que d’autres régions du pays. Le marché du travail romand tire notamment profit de la structure par âge relativement jeune de sa population. De nombreuses régions de Suisse romande sont par ailleurs très attractives d’un point de vue financier en tant que lieu de résidence, notamment pour les familles.
Dans leur nouvelle étude, les économistes du Credit Suisse se penchent sur les cantons de Fribourg, de Genève, du Jura, de Neuchâtel, du Valais et de Vaud et abordent différents aspects de l’économie régionale, tels que l’évolution des secteurs économiques, des entreprises et de l’emploi, les facteurs d’attractivité résidentielle, la croissance démographique ou le marché immobilier.
Entre 2014 et 2019, l’emploi a progressé de 7,4% en Suisse romande, contre 5,3% à l’échelle nationale. La croissance a été particulièrement forte dans les cantons de Genève (+8,7%) et de Vaud (+8,6%), ainsi qu’en Valais (+6,8%). Les écarts entre les régions sont toutefois importants: alors que la hausse a atteint 12% en Gruyère, l’emploi a reculé dans certains bastions de l’industrie horlogère comme la Vallée de Joux ou la région de la Chaux-de-Fonds. La productivité, soit la valeur ajoutée brute par emploi, a augmenté dans tous les cantons romands à l’exception de Genève entre 2011 et 2019, reflet de la forte capacité d’innovation de la région. Après Zoug, Vaud est par exemple le canton affichant la plus forte densité de start-up, Genève, Neuchâtel, Fribourg et le Valais se situant également dans le top 10.
La pandémie a fortement impacté l’économie romande, notamment au niveau du commerce extérieur. A l’exception du Valais, qui a pu tirer son épingle du jeu grâce à l’industrie chimico-pharmaceutique, tous les cantons romands ont enregistré une baisse significative de leurs exportations en 2020. Le secteur touristique a également souffert: l’an dernier, le nombre de nuitées dans les établissements hôteliers et para-hôteliers de Suisse romande se situait encore 24% en-dessous du niveau de 2019. Grâce à la demande accrue des touristes suisses, en particulier dans la parahôtellerie, les cantons de Neuchâtel et du Jura ont toutefois pu enregistrer en 2021 plus de nuitées qu’avant la crise. Grâce notamment aux importantes aides de la Confédération et des cantons, l’impact du COVID-19 sur les entreprises romandes n’a pas été aussi négatif que redouté en début de crise. Les taux de faillites en 2020 et 2021 ont été inférieurs (souvent nettement) à ceux des années 2018-2019 dans l’ensemble des cantons romands. Alors qu’à l’échelle suisse, les données les plus récentes indiquent une légère reprise des faillites, aucun renversement de tendance clair n’est pour l’instant visible à l’échelle romande. Contrairement à ce qui s’observe en moyenne nationale, il n’y a néanmoins pas eu plus de créations d’entreprises qu’avant en Suisse romande durant la crise du COVID-19.
Le chômage a retrouvé ses niveaux d’avant-crise dans la plupart des cantons romands. Parallèlement, les postes vacants n’ont jamais été aussi nombreux en Suisse romande que début 2022 (+38% en février 2022 par rapport à février 2020, et même +54% en Valais, selon le Jobradar de la société x28). De plus en plus d’entreprises romandes font par conséquent état de difficultés de recrutement. Celles-ci semblent toutefois moins marquées que dans d’autres régions du pays. Lors de l’Enquête PME 2021/2022 du Credit Suisse, plus de 62% des PME romandes ayant recruté ou tenté de recruter ces trois dernières années ont indiqué que la recherche de candidats s’était avérée plutôt (38%) voire très difficile (25%), contre 66% en moyenne suisse et plus de 75% en Suisse orientale et du Nord-Ouest. Environ 36% des PME romandes pensent que la recherche de personnel va se compliquer ces prochaines années, contre plus d’une sur deux sur l’ensemble du pays. L’une des explications à ces disparités régionales en matière de pénurie de main-d’œuvre est d’ordre démographique: alors qu’à l’échelle suisse, les départs à la retraite des baby-boomers devraient bientôt dépasser le nombre de jeunes entrant dans la vie active, ce phénomène ne devrait pas s’observer en Suisse romande, même si le solde entre entrées et sorties sur le marché du travail se réduira sensiblement ces prochaines années.
Le marché du travail romand profite en effet de la structure d’âge relativement jeune de la population. Vaud, Genève et Fribourg sont même les cantons qui ont les proportions de seniors (65 ans ou plus) les plus basses de Suisse, avec moins de 17%. Entre 2000 et 2020, la population a augmenté de 1,2% par an en moyenne en Suisse romande, contre 0,9% au niveau national. Cette croissance s’explique par l’apport positif de l’immigration internationale, miroir du dynamisme économique, qui attire des migrants avec un niveau de formation en moyenne supérieur à celui des résidents dans tous les cantons romands. Plusieurs régions profitent également d’un solde migratoire interne positif. Parmi les plus dynamiques, on retrouve celles qui parviennent à tirer parti de leur attrait comme lieu de résidence à proximité des grands centres de Lausanne, Genève et Berne. C’est par exemple le cas de la Gruyère, la Broye, la Glâne/Veveyse, du Gros-de-Vaud, des régions de Nyon, de Morges/Rolle et de Morat ou encore de celles de Monthey/St-Maurice, Aigle ou Martigny. L’essor du télétravail suite à la pandémie de COVID-19 a accéléré ces mouvements de repli vers les régions en dehors des centres, en permettant aux ménages en quête d’un logement d’élargir leur rayon de recherche.
A l’aune du revenu librement disponible, c’est-à-dire le montant restant à disposition des ménages pour la consommation ou l’épargne après déduction des prélèvements obligatoires (impôts, charges sociales, assurance maladie), des coûts fixes liés au logement et d’éventuels frais de mobilité et de garde des enfants, plusieurs régions romandes se présentent comme lieu de résidence avantageux. Les cantons du Jura, du Valais et de Fribourg affichent même un attrait financier résidentiel supérieur à la moyenne suisse. Le canton de Neuchâtel se situe dans la moyenne. La Suisse romande est particulièrement avantageuse pour les familles avec enfants, surtout le Valais, qui se positionne en tête du classement national. L’accueil des enfants d’âge préscolaire en crèche est moins onéreux qu’en moyenne suisse dans tous les cantons romands et des déductions fiscales des frais de garde ainsi que des allocations familiales relativement généreuses complètent ce cadre favorable.
La pandémie de COVID-19 a stimulé le désir d’accès à la propriété du logement. Face à la faiblesse de l’activité de construction de logements en propriété, l’essor de la demande a déclenché une nouvelle flambée des prix de la propriété dans tous les cantons romands. Même pour un ménage disposant d’un revenu moyen de 134’000 francs, de moins en moins de biens sont abordables. Dans l’Arc lémanique, la part des biens immobiliers encore accessible pour un ménage de ce type est désormais en dessous du seuil des 10%. Dans le Jura, la vallée du Rhône et certaines parties des cantons de Neuchâtel et de Fribourg, en revanche, la propriété du logement est encore bien plus souvent abordable. L’importance croissante accordée au logement et une immigration solide ont soutenu la demande sur marché de la location également, surtout pour les appartements de plus grande taille. Cette évolution, combinée avec un recul de l’activité de construction, a provoqué un retournement de tendance au niveau du taux de logements locatifs vacants en 2021, après des années de croissance de l’offre excédentaire. En Suisse romande, le repli n’a été que minime et limité aux cantons de Fribourg et du Valais. Les différences cantonales demeurent par ailleurs importantes. Tandis que le taux de logements vacants est très faible dans le canton de Genève (0,63%), il est de 5,58% en Valais. L’évolution des demandes de permis de construire, nettement à la baisse, laisse toutefois présager un retournement de tendance étayé en Suisse romande également.
L’étude «La Suisse romande – Perspectives économiques régionales» est disponible en français et en allemand à l’adresse suivante: credit-suisse.com/etudesregionales
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