La polémique autour des tenues religieuses à l’école rebondit à l’Assemblée Nationale. Après une première proposition de loi du groupe RN le 20 septembre, c’est au tour de la députée non inscrite de la 6ème circonscription de l’Hérault, Emmanuelle Ménard, de proposer de rendre l’uniforme obligatoire dans les établissements scolaires. On vous explique les dessous et les enjeux de ces deux textes et leurs limites.
C’est la polémique politique de la rentrée : face aux atteintes à la laïcité (313 faits recensés de la maternelle au lycée en septembre dernier, dont 54% relatifs au port de signes et de tenues), faut-il imposer le port de l’uniforme à l’école ? Cet état des lieux, issu des remontées des personnels de l’Education nationale, des responsables d’établissements et des inspecteurs académiques, a fourni au Rassemblement National l’occasion de déposer une proposition de loi en ce sens le 20 septembre dernier. Un texte porté par le député Roger Chudeau et co-signé de l’ensemble des membres du groupe (dont les élus RN d’Occitanie), au nom de l’ambition républicaine d’égalité sociale et des chances.
Tout en rappelant qu’il n’y a pas aujourd’hui d’interdiction du port de l’uniforme, ni de consigne nationale sur ce sujet, le ministre Pap Ndiaye n’a pas fermé la porte à la discussion. Devant la commission “Education” de l’Assemblée nationale, il a précisé que “rien n’interdit, dans le code de l’Education, qu’un chef d’établissement puisse prendre une initiative de ce genre“, en citant l’exemple des Outremers où l’uniforme est selon lui largement répandu et accepté.

Je suis disposé à ce qu’un groupe de travail, si vous souhaitiez d’aventure travailler sur cette question, se penche sur le sujet.

Sans attendre cette hypothétique discussion, c’est dans un tweet qu’Emmanuelle Ménard, épouse du maire de Béziers Robert Ménard et députée (non inscrite) de la sixième circonscription de l’Hérault, en a remis une couche sur ces vêtements scolaires : “Je viens de déposer une proposition de loi visant à rendre obligatoire le port de l’uniforme à l’école pour lutter contre la recrudescence des djellabas et des abayas dans les établissements scolaires“.
La députée, réélue au printemps dernier sous l’étiquette Divers Droite en l’absence de concurrent RN, co-signe ce texte avec 3 autres députés et estime qu’il “a le mérite de poser à nouveau le problème sur la table”, en allant plus loin que celui du Rassemblement national : “La proposition de loi du RN vise les écoles et les collèges publics. Moi, je veux l’étendre aussi aux lycées, car c’est là que les atteintes à la laïcité via les vêtements religieux sont les plus visibles“.

Les enseignants sont très démunis face à la recrudescence de ces signes religieux. Ils demandent une réponse claire et on leur répond que c’est à eux de prouver l’intention derrière le vêtement, intention que l’élève peut nier. Je pense que l’uniforme est la solution la plus facile à appliquer.

Dans un reportage réalisé en avril 2021, nos confrères de France 2 rappelaient que si, après la Seconde Guerre Mondiale et jusqu’aux années 1960, la blouse était de rigueur, aucune loi n’a jamais imposé en France d’uniforme à l’école publique, seul le règlement intérieur des établissements statue. Ce n’est qu’en 2003, face à une autre polémique autour des jeans troués et autres piercings, que le ministre d’alors, Xavier Darcos, suggère l’imposition d’une tenue commune à tous les élèves.
En 2018, sous l’impulsion du maire et contre l’avis des syndicats enseignants, les parents d’élèves des écoles publiques élémentaires de la ville de Provins (Seine-et-Marne) votent à plus de 62% pour le port de l’uniforme, qui représente selon eux “une égalité pour tous les enfants“. Mais pas pour toutes les bourses : le coût de la tenue (145 euros pour un trousseau de 10 pièces), jugé “raisonnable” par la mairie, n’est pas supportable pour certaines familles. Deux ans plus tard, Le Parisien constate que la plupart des foyers l’ont remisée au placard : l’expérience est un échec. Pour éviter cet écueil, Emmanuelle Ménard suggère cette fois une prise en charge partielle : “si l’Etat accepte une mesure de ce type, soit il participe au coût financier, soit ce coût peut être englobé dans l’allocation de rentrée scolaire. Cela ne peut pas reposer entièrement sur les familles, même si le prix d’un uniforme pour l’année est moins cher que celui des vêtements de marques portés par de nombreux élèves“.
Enfin, à la fin d’année 2021, une étude menée par des scientifiques américains sur plus de 6000 élèves de la maternelle au CM2 a montré les limites du pouvoir inclusif de l’uniforme à l’école. Car la mode est le premier vecteur d’affirmation de soi chez les jeunes. Ils ont noté que ce n’était plus possible avec une tenue commune et que celle-ci, par ricochet, amoindrirait le sentiment d’appartenance à la communauté. Par ailleurs, Les résultats ont démontré une absence d’effet sur le comportement des enfants, tous âges confondus, que ce soit en termes d’assiduité, ou de problèmes comportementaux tels que le harcèlement scolaire.

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