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Publié le 15.05.2022 Édité le 16.05.2022 à 08:07
La hausse des taux a un impact sur le partage entre fixe et variable, mais aussi sur la demande. (Photo: Nader Ghavami/Archives)
La hausse des taux fixes pousse certains clients à reconsidérer les taux variables lors de démarches pour un prêt immobilier. Même si ces derniers devraient également augmenter. Logiquement, les banques sont davantage vigilantes dans le cadre d’un octroi.
De 1,8% fin 2021 à environ 3% en avril-mai 2022: les taux d’intérêt fixes pour les crédits immobiliers à long terme retrouvent des niveaux comme ils n’en avaient pas connu depuis cinq ans au Luxembourg. Alors que les taux variables demeuraient «stables» en avril, autour de 1,4%.
Une évolution qui ne touche donc, pour l’instant, que les primo-accédants. «Si le taux fixe est fixé sur 25 ans, il n’y a pas de risque pour le client», rassure Mike Schwörer, responsable du conseil en logement à la Banque internationale à Luxembourg (BIL). Même si «la majorité panache entre taux fixes et variables».
«Ceux qui ont pris une partie fixe cinq ans et variable trois ans par exemple, vont tomber dans les conditions du marché», détaille Yann Gadéa, responsable des courtiers en hypothèque chez AtHome Finance.
Selon les chiffres de la Banque centrale du Luxembourg (BCL), qui collecte les informations de 49 établissements de crédit, on est à environ deux tiers des volumes en taux fixes pour les contrats passés ces cinq dernières années et à un tiers en taux variables. Elle précise que dans certains cas, «sur des emprunts sur 20 ou 30 ans, après 10 ans, le taux fixe peut être revu».
«Les clients ayant souscrit à un taux variable ou un taux révisable sont eux aussi touchés», ajoute Markus Stegmann, responsable du domaine crédits chez BGL BNP Paribas. Car si la hausse des taux variables (+1 point en mars 2022 pour passer à 1,33% selon la BCL) est pour l’instant moins spectaculaire que celle des taux fixes, elle pourrait suivre. La Banque centrale européenne prévoit de relever ses taux directeurs en juillet, ce qui aura un impact sur les taux variables au Luxembourg.
En attendant, va-t-on vers une inversion de la tendance? Ce n’est qu’en 2015, selon les données de la BCL, que les Luxembourgeois ont commencé à préférer les taux fixes aux taux variables. Parce qu’avant, les taux fixes étaient plus chers, et parce qu’une loi européenne en 2016 «a limité les indemnités en cas de remboursement anticipé d’un prêt à taux fixe», indique Mike Schwörer de la BIL.
«Des gens qui, l’année dernière, ne voulaient pas entendre parler de taux variable acceptent maintenant une part importante de variable dans leurs prêts», admet Yann Gadéa. Aujourd’hui, il calcule environ «45% de taux fixes et 50% de taux variables», le reste correspondant aux taux révisables.
Malgré la hausse des taux fixes ces derniers mois, «beaucoup de clients les choisissent quand même», relativise la BIL. La banque doit d’ailleurs parfois «limiter le risque» pour les clients les plus téméraires, attirés par les taux variables avantageux. «1,5% aujourd’hui correspondra peut-être dans deux ou trois ans à 3%», explique Mike Schwörer. «On doit faire attention à ce que le client puisse faire face, pour lui éviter un surendettement.»
Va-t-on refuser plus de crédits? «Oui, tout à fait.» Ou demander aux clients de se tourner vers un bien moins cher. La hausse du coût de la vie a déjà poussé la banque à réévaluer le reste à vivre (somme qu’il reste une fois les mensualités du crédit versées) lors du calcul de la capacité d’endettement de ses clients.
Mike Schwörer ajoute qu’il y a un «ralentissement féroce de la demande», depuis la fin de l’année dernière. La hausse des taux a son impact. «Si, pour un bien, on paie 300 euros en plus par mois, cela touche le portefeuille du client.» De même pour les investisseurs qui empruntent pour faire du locatif. «Si le rendement brut tourne autour de 2% et que le taux d’intérêt est de 2,5%, la rentabilité n’est plus la même.»
«Pour tous les acquéreurs, la charge de crédit devient plus importante du fait de l’augmentation des taux à long terme sur le marché», corrobore BGL BNP Paribas.
Reste à savoir comment continueront d’évoluer ces taux. «Pour moi, sur l’année, on va passer à 1,6% pour les taux variables et rester aux alentours de 3% pour les taux fixes», prédit Yann Gadéa, d’AtHome Finance. «La hausse des taux fixes à long terme a été très brutale, c’était une anticipation après les annonces de la Fed.» Il n’imagine plus de tels mouvements en 2022. Même si rien n’annonçait non plus ceux que l’on connaît aujourd’hui, augmentés par l’inflation, elle-même gonflée par la guerre en Ukraine.

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