A l’Ile de Ré, aussi, le marché immobilier marque le pas.
IMMOBILIER. A Ars-en-Ré, ancien village de pêcheurs, il n'est pas rare de croiser des célébrités.
Xynthia a asséché le marché
De La Rochelle, il faut traverser d’interminables zones d’activité et passer l’onéreux péage (8 euros en hiver, 16 euros en été) pour accéder au pont qui mène à l’île de Ré. Au bout de ce serpent de béton, édifié en 1988, le changement de décor est total: dunes et plages de sable à perte de vue sur le fond gris-bleu de l’océan. “Je n’ai jamais rien vu de plus exotique”, écrivait le peintre et écrivain rochelais Eugène Fromentin. Il ajoutait: “On pourrait transporter ce bout du monde dans n’importe quel hémisphère, y supposer un navire au large faisant avec précaution la revue de cette baie magnifique et dangereuse, y abordant tant bien que mal, et découvrant une île déserte…”
Tourisme oblige, l'”île déserte” est devenue au fil du temps un lieu de villégiature fort prisé et fort cher. A partir des années 1980, “Ré la Blanche” a été prise d’assaut par des familles aisées venues de la France entière, Ile-de-France en tête. Selon l’Insee, plus de 50% des biens situés sur l’île de Ré sont des résidences secondaires!
Ici aussi, pourtant, le marché immobilier marque le pas. La faute en revient à la terrible tempête Xynthia, qui s’est abattue sur l’île en 2010. Conjuguée à une marée à fort coefficient, elle a inondé l’intérieur des terres et a sinistré un grand nombre de maisons de bord de mer. Trois ans après la catastrophe, un plan de prévention des risques littoraux (PPRL) établissant de nouvelles règles d’urbanisme, qui tiennent compte des risques accrus de submersion marine, a été établi par l’Etat. Au grand dam des élus de l’île, car plus d’un tiers du territoire a été placé en zone inconstructible. A ce jour, 50 permis de construire ont déjà été refusés. Pis, de nombreux particuliers ont perdu gros: ils ont acheté à prix d’or des terrains devenus inconstructibles et dont la valeur, de fait, s’est effondrée. Une nouvelle carte de projection des risques est en cours de préparation à la préfecture.
“Agences immobilières, artisans, architectes, salariés du bâtiment… avec le gel des constructions, toute une partie de l’économie de l’île est entrée en léthargie”, constate Jean-Jacques Massé, gérant de Ré Agence Ouest. Avec la hausse de la taxe sur les plus-values immobilières des résidences secondaires, certains propriétaires ont retiré leur bien de la vente, faisant chuter un peu plus le volume des transactions.
Le gel des constructions touche notamment le secteur des Portes, à l’extrême nord de l’île, qui était jusqu’à présent une véritable chasse gardée des people. C’est ici qu’une bicoque de 51 m2 comprenant 1 seule chambre, avec un petit terrain de 207 m2, a trouvé preneur à 296 800 euros. Plus au sud, à Ars-en-Ré, ancien village de pêcheurs où il n’est pas rare de croiser Philippe Sollers, Fabrice Luchini ou Lionel Jospin, une maison de 63 m2 dotée d’une parcelle de 135 m2 s’est vendue 349 800 euros. Non loin de là, une maison de 93 m2, avec courette pavée et garage, a atteint 330 000 euros. Une magnifique demeure de 128 m2, comprenant pas moins de 7 pièces, avec un terrain de 1900 m2, a, elle, été achetée pour la bagatelle de 1,27 million d’euros. Quand on aime, on ne compte pas… A quelques minutes à vélo de là, à Saint-Clément-des-Baleines, une maisonnette de 60 m2 dotée d’une parcelle de 132 m2 est partie à 299 000 euros.
Moins exposé aux risques d’inondation, plus proche du continent et beaucoup plus urbanisé, le sud de l’île connaît une activité immobilière plus intense. Située à cinq minutes en auto du pont, la commune de Sainte-Marie-de-Ré a le vent en poupe. Dans ce village, une maison de 95 m2 comprenant 3 chambres, avec un petit terrain de 400 m2 exposé au sud, s’est vendue 402 000 euros. Un peu plus loin, une propriété de 200 m2 agrémentée d’un jardin de 400 m2 est partie à 380 000 euros. De gros travaux de réfection étaient à prévoir.
A 5kilomètres au nord de Sainte-Marie, face à l’océan, se trouve le village de La Flotte-en-Ré. Une belle maison de pêcheur, d’une surface de 90 m2, y a été achetée 413 000 euros. A La Couarde-sur-Mer, où 80% du territoire est devenu inconstructible, un appartement de 32 m2, bien situé, entre plages et commerces, dans une résidence avec piscine, est parti à 178 000 euros (5560 euros le mètre carré). Enfin, au coeur même de Saint-Martin-de-Ré, la capitale historique de l’île, une charmante bicoque de 34 m2 a été cédée pour 255 000 euros. Nettement plus chic, une maison du XVIIIe siècle, d’une surface de 190 m2, avec 5 chambres, s’est, elle, vendue 639 000 euros. Ne devient pas rétais qui veut…
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