Un hameau protohistorique
Sur près de neuf mille mètres carrés, de nombreux vestiges ont été mises au jour, datés de l’âge du Fer. Plusieurs structures attestent d’espaces d’habitations, avec des installations dédiées à l’approvisionnement en eau et au stockage des denrées, des meules, des foyers, ainsi que des trous de poteaux dont certains dessinent un bâtiment absidial. Des activités artisanales ont également été perçues par les archéologues, au travers d’outils en pierre (galets, molette, percuteur), de fusaïoles illustrant une activité de tissage, et un fond de loupe en fer issus d’une coulée de forge témoignant d’une activité métallurgique. Le mobilier céramique découvert au cours de la fouille est composé de productions locales (vaisselle en céramique grise roussillonnaise, céramique non tournée), de vases de stockages (pithoi et jarres) et de céramiques importées (vaisselle attique, mortier, amphores étrusques, ibériques et massaliètes). Cet ensemble permet de dater cette occupation des VIe-Ve siècles avant notre ère.
Un dynamique réseau d’échange entre la Méditerranée et l’arrière-pays roussillonnais
Installé à l’extrémité occidentale de la plaine du Roussillon, au contact de la zone collinaire des Aspres, ce site s’insère dans un maillage d’occupations plus vastes. Les études à venir permettront de rendre compte de leur étendu et de leur complexité.
La présence de céramiques attiques à figures noires et de deux monnaies grecques atteste de la circulation de biens de prestiges méditerranéens dans l’arrière-pays roussillonnais. L’occupation des Aybrines pourrait avoir constitué un territoire vivrier de l’oppidum de Teixonères, centre économique important dans le massif des Aspres situé à seulement deux kilomètres. À cette même période, l’oppidum intensifie ses dynamiques commerciales avec Ruscino, chef-lieu du Roussillon, notamment entre 550 et 480/450 avant notre ère.
Une vaste villa romaine et ses thermes retrouvés
Les archéologues ont également mis au jour les vestiges d’une vaste villa (demeure aristocratique) et de bâtiments secondaires dédiés aux productions agricoles ; leur exploitation débute au milieu du Ier siècle de notre ère et se poursuit jusqu’au dernier tiers du IVe siècle. Révélés partiellement en 2012 au cours d’une précédente fouille menée par l’Inrap, les vestiges sont lacunaires et arasés ; seuls quelques éléments conservés permettent d’entrevoir son importance.
Du nord au sud, les restes des bâtiments romains ont pu être identifiés sur une longueur de 170 mètres et sur un minimum de 90 mètres dans le sens est-ouest ; ils permettent d’estimer la superficie de la villa et son domaine à un minimum de 1,5 hectare. Par ailleurs, une partie des thermes a pu être fouillée ; l’ensemble conservé mesure 12m de long sur 4 m de large et se compose de trois pièces : le praefurnium (pièce de chauffe), le caldarium (salle chaude avec un bassin nommé solium) et le tepidarium (salle tiède). L’étude de ces vestiges attestent de plusieurs phases de réfection et de réaménagement.
Les dépendances agricoles : témoignage d’une continuité de l’occupation de l’Antiquité au Moyen Âge
Au nord de la villa, plusieurs structures de production et de stockage avaient été découvertes en 2012. Les archéologues avaient mis au jour un chai datant du Ier siècle de notre ère, de plus de deux cents mètres carrés au sein duquel a pu être restitué l’emplacement de soixante-dix à quatre-vingt dolia : grandes cuves de stockage en terre cuite pouvant contenir entre cinq et six mille litres. La présence de poix sur certains fragments laisse présumer le stockage du vin. À une soixantaine de mètres au sud de ce bâtiment, les vestiges d’un pressoir ont été mis au jour, ainsi que des fours à chaux et un atelier de potier. En outre, six silos conservant de nombreuses graines carbonisées, ont complété ces découvertes ; l’appartenance probable de ces structures de stockage à une phase plus récente permet de supposer une continuité de l’occupation de ce secteur durant le Haut Moyen Âge.
L’Inrap
L’Institut national de recherches archéologiques préventives est un établissement public placé sous la tutelle des ministères de la Culture et de la Recherche. Il assure la détection et l’étude du patrimoine archéologique en amont des travaux d’aménagement du territoire et réalise chaque année quelque 1800 diagnostics archéologiques et plus de 200 fouilles pour le compte des aménageurs privés et publics, en France métropolitaine et outre-mer. Ses missions s’étendent à l’analyse et à l’interprétation scientifiques des données de fouille ainsi qu’à la diffusion de la connaissance archéologique. Ses 2 200 agents, répartis dans 8 directions régionales et interrégionales, 42 centres de recherche et un siège à Paris, en font le plus grand opérateur de recherche archéologique européen.