Un 12 novembre sur l’île de Ré. 20 degrés au thermomètre et une fréquentation presque aussi forte qu’un pont de mai. Les automobilistes roulent au pas, pare-chocs contre pare-chocs, et passent sous les nouveaux radars fixes sans jeter un œil au compteur. Une situation digne de la saison touristique, généralement entre avril et octobre. En basse saison, il faudra être vigilant. Cinq radars tourelles vont être installés d’ici la fin de l’année 2022 sur la RD 735 et la RD 201…
Un 12 novembre sur l’île de Ré. 20 degrés au thermomètre et une fréquentation presque aussi forte qu’un pont de mai. Les automobilistes roulent au pas, pare-chocs contre pare-chocs, et passent sous les nouveaux radars fixes sans jeter un œil au compteur. Une situation digne de la saison touristique, généralement entre avril et octobre. En basse saison, il faudra être vigilant. Cinq radars tourelles vont être installés d’ici la fin de l’année 2022 sur la RD 735 et la RD 201 sur 28 kilomètres pour une entrée en fonction cet hiver. Auparavant, il n’y en avait aucun. Trois ont déjà été érigés mais un est déjà à terre. Mercredi 9 novembre, celui d’Ars-en-Ré a été scié à sa base. Il n’a pas tenu plus de 24 heures.
Cet acte de vandalisme est un message assez clair envoyé aux autorités. Dans leur majorité, les Rétais ne veulent pas de ces super engins capables non pas seulement de contrôler la vitesse mais aussi l’utilisation du téléphone portable, l’absence de ceinture, et le non-respect des distances de sécurité.
« C’est une mauvaise tactique de les installer en hiver, réagit une commerçante d’Ars-en-Ré. On comprend que c’est à destination des locaux. On vit ça comme une punition. Les panneaux d’annonce ont été installés il y a un an. Jusqu’au bout, on a cru que c’était du bluff. Mais non, ils l’ont fait. »
Il est vrai que le dossier ne date pas d’hier. Tout a commencé en 2017 quand le Conseil départemental de la Charente-Maritime a rendu un avis favorable à l’installation de ces radars. La décision vient d’en haut. Depuis Paris, le ministère de l’Intérieur a étudié les statistiques. L’île de Ré, aussi petite soit-elle, est une zone particulièrement accidentogène. C’est du moins l’argument principal avancé par la préfecture dans un courrier envoyé aux maires des communes concernées. Sur la période de 2010 à 2018, l’île serait sur le podium du nombre de tués sur les routes dans le département, d’accidents et de blessés hospitalisés. Le projet initial prévoyait neuf radars tourelles.
« Cinq radars sur 28 kilomètres, ça fait presque un radar tous les cinq kilomètres, s’agace Lionel Quillet, maire de Loix. C’est infernal. » C’est sous sa présidence de la Communauté de communes de l’île de Ré que la mesure a été entérinée. L’élu dénonce un manque de concertation.
« On parle de statistiques accidentogènes mais elles ne concernent pas la vitesse. Le plus souvent, les accidents ont lieu sur des franchissements de vélo. Réaliser des souterrains de passage et mettre un radar sur une grande ligne droite, oui. Vous imaginez, le Rétais qui fait l’aller-retour île-continent va passer devant dix radars dans la même journée. Quelle angoisse. Il ne faut pas pousser les gens à bout. »
Sur l’île, beaucoup s’interrogent. « Les accidents arrivent plutôt entre cyclistes », affirme une bijoutière d’Ars-en-Ré. Situé sur la RD 735, un autre commerçant enchaîne. « Le gros chantier, ce sont les pistes cyclables. L’été, entre 20 et 30 personnes par jour s’arrêtent à la boutique pour demander leur chemin. Les pistes sont mal indiquées. Il y en a beaucoup qui finissent sur la départementale. J’ai vu des bagarres entre automobilistes et touristes à vélo. Les pistes font 1,50 m de large, avec des vélos cargo, des vélos side-car. Moi, c’est simple, je n’en fais plus. C’est trop dangereux. La priorité, c’était plutôt ça. »
Les locaux avouent tout de même que la vitesse existe, l’hiver. « Mais de mémoire, tous les accidents graves qu’il y a eu avaient un rapport avec l’alcool, pas la vitesse », affirment-ils en chœur. « Les endroits accidentogènes sont ailleurs qu’aux lieux où ils ont installé les radars, constate Danièle Piétiniaud-Gros, maire d’Ars-en-Ré. Contrôler les distances de sécurité l’été, c’est incohérent. Nous, on ne peut rien faire sans l’accord des Bâtiments de France (l’île de Ré est un site classé dans son intégralité, NDLR). Et on nous met des radars dans la ligne de vue du clocher d’Ars. Des radars plus petits sur des endroits vraiment accidentogènes auraient été plus rationnels. »
Au milieu de la réprobation générale, la nouvelle fait tout de même quelques satisfaits. Un commerçant situé au Martray, à Ars, en bordure de la D 735 félicite la mesure. « Ici, ça roule trop vite. Je connais les routes, je suis né ici, et je sais qu’elles sont dangereuses. Il y a beaucoup de courbes, de virages. Les gens sont toujours pressés. Les radars sont indispensables. » Il roule tranquille. « Je ne dépasse pas les 60 km/h. » Malgré lui : il circule à bord d’une voiture sans permis.

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