Entre Lourdes et le vignoble du Madiran, le Nord-Béarn couvre 1 093 kilomètres carrés et près de 139 communes. Sur ces vastes étendues préservées se dressent des châteaux au pied desquels s’étalent des jardins extraordinaires. Ils ont traversé les siècles grâce à des femmes et des hommes au caractère bien trempé, qui s’y dédient corps et âme. À commencer par Marie-Joseph Teillard, 102 ans, qui a racheté en 1983 l’ancienne demeure des seigneurs de Momas en ruine.
La bâtisse, inscrite depuis 1989 à l’Inventaire des monuments historiques, fut édifiée au XIVe siècle puis reconstruite au XVIe. Il se dit d’ailleurs que Louis XIII y aurait déjeuné en 1620 lors du rattachement du Béarn au royaume de France. Passionnée de fleurs, fruits et légumes rares ou exotiques, Marie-Joseph Teillard l’a agrémentée d’un jardin où feijoa, kiwaï, yuzu, grenades, poivre du Sichuan ont commencé à s’épanouir bien avant qu’ils ne deviennent à la mode sous nos contrées. Si elle l’entretenait elle-même avec le plus grand soin jusqu’à peu, c’est désormais sa fille Béatrice qui reçoit. Depuis la crise sanitaire, le jardin a perdu de sa superbe en même temps que son label Jardin remarquable…
La bâtisse, inscrite depuis 1989 à l’Inventaire des monuments historiques, fut édifiée au XIVe siècle puis reconstruite au XVIe. Il se dit d’ailleurs que Louis XIII y aurait déjeuné en 1620 lors du rattachement du Béarn au royaume de France. Passionnée de fleurs, fruits et légumes rares ou exotiques, Marie-Joseph Teillard l’a agrémentée d’un jardin où feijoa, kiwaï, yuzu, grenades, poivre du Sichuan ont commencé à s’épanouir bien avant qu’ils ne deviennent à la mode sous nos contrées. Si elle l’entretenait elle-même avec le plus grand soin jusqu’à peu, c’est désormais sa fille Béatrice qui reçoit. Depuis la crise sanitaire, le jardin a perdu de sa superbe en même temps que son label Jardin remarquable, mais il vaut le détour, également pour la forte personnalité de sa propriétaire.
Les Graciet, un couple de pharmaciens, se sont eux aussi lancés dans un considérable chantier en faisant l’acquisition en 1982 du château de Viven, une maison de maître dotée de multiples dépendances, dont une charmante bergerie en briques de terre crue. Le parc était en friche. Ils y ont accompli un travail colossal, que la pétillante octogénaire poursuit seule. La nature sert le patrimoine et inversement.
Mené à la française, le jardin et son entrelacs de broderies s’inspirent du style de Le Nôtre, le célèbre jardinier de Louis XIV. Privilège royal accordé à l’époque aux aristocrates, le pigeonnier hexagonal sur pilotis, mis à terre par une tornade en 2015, est à nouveau sur pied. Le bassin, autrefois alimenté par des sources naturelles actuellement disparues, a été restauré en 1990 pour accueillir palmipèdes et plantes aquatiques. Une tonnelle est posée sur une ancienne tour de défense et de luxuriants bougainvilliers culminant à 6 mètres de hauteur s’appuient sur les piliers de soutènement.
La bambouseraie bordant la forêt sur près de 200 mètres a pris racine au XIXe siècle. Quant à la splendide roseraie composée de quelque 1 200 éléments, elle est le clou d’un décor enchanteur, qui comprend aussi un théâtre de verdure de 300 places. À l’intérieur des communs se dissimule une salle de spectacle, et la bergerie a été transformée pour y loger des artistes. Car ici, nature rime aussi avec culture.
Il est également question de culture au château de Morlanne, une forteresse médiévale commandée par Gaston Ill de Foix-Béarn (dit « Gaston Fébus ») à l’architecte Sicard de Lordat pour asseoir sa souveraineté. Hélène et Raymond Ritter, qui en devinrent propriétaires après-guerre, consacrèrent leur énergie et leur fortune à lui redonner son allure d’antan, avant de le léguer au Département. Après la disparition de son époux, Hélène continua d’ailleurs d’y vivre jusqu’en 2003.
Le château a fait l’objet d’une nouvelle campagne de travaux avant sa réouverture sous forme de musée en 2016. Hommage au mode de vie des Ritter, il présente notamment une partie de leur remarquable collection de tableaux, dont une vue de Venise de Canaletto (1). Au pied des douves en eau, le village, organisé autour d’une rue centrale bordée de parcelles identiques et d’une église fortifiée, se découvre de manière ludique grâce à l’application Tèrra Aventura : on y cherche les réponses à des énigmes conduisant à une cache.
Éric Derluyn est, lui, le châtelain de Mascaraàs. Cette maison forte du XIIe fut convertie en petit château de plaisance quand elle entra dans le patrimoine de Jeanne d’Albret, quatre siècles plus tard. La bâtisse, dont la façade de 40 mètres percée de 24 ouvertures n’est pas la moindre des surprises, est arrivée par héritage dans la famille de cet ancien professeur.
À l’intérieur, les pièces d’inspiration italienne aux murs ornés de cuir de Cordoue ou de fresques peintes sont garnies de meubles et accessoires variés remontant pour la plupart au XVIIe siècle. Un décor nécessitant une remise en état perpétuelle qui immerge le visiteur dans l’histoire. On y retrouve ainsi le brasero classé qui fut offert en cadeau de mariage à Louis XIV et Marie-Thérèse, l’infante d’Espagne.
Les étagères, les tables et le sol des trois bibliothèques croulent sous le poids de quelque 10 000 ouvrages entretenus par le maître des lieux, qui se plonge régulièrement dans la lecture de la première édition de « L’Esprit des lois », de Montesquieu. Dans le parc déployé sur deux collines, des chênes centenaires, une allée cavalière, mais aussi un potager et des vignes.
Nous sommes ici à la lisière du Madiranais. Pas étonnant donc qu’une cuvée Mascaraàs figure en bonne place dans la boutique du château de Crouseilles, propriété de la cave coopérative des appellations Madiran et Pacherenc du Vic-Bilh. On s’y arrêtera volontiers pour déguster l’un des vins des quelque 110 producteurs adhérents, tout en admirant les œuvres d’art allégoriques du travail du vigneron, exposées alentour.
Avec Karine et Dominique Mageau de Vous en Mob, les routes vallonnées et ombragées du Nord-Béarn se parcourent à Mobylette. Ces deux anciens d’Air France ont remis à neuf un ensemble de vélomoteurs thermiques ou électriques et accompagnent avec ce moyen de locomotion vintage des groupes d’une dizaine de personnes au maximum.
Karine suit en voiture pour assurer l’assistance technique en cas de panne, alors que Dominique raconte « les petites histoires dans la grande », en guidant sa troupe sur la voie romaine. Car le territoire conserve aussi des traces de ses origines antiques, dont les vestiges de la villa gallo-romaine de Lalonquette.
Pour pouvoir contempler les mosaïques qui en décoraient les sols, on empruntera le sentier d’interprétation de 2 kilomètres environ qui mène au musée du village de Claracq. Celui-ci, rouvert récemment, retrace l’évolution du site avec divers objets et des images de synthèse révélant les us et coutumes des habitants de ce palais campagnard de 3 000 mètres carrés. Pas de doute, sillonner le Nord-Béarn fait indéniablement voyager dans le temps.
(1) Peintre vénitien (1697-1768) célèbre pour ses panoramas de la cité

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