Ce passionné de la mer se plaisait à jeter l’ancre sur le plancher des vaches. « Du Périgord, Georges Pernoud disait en avoir fait son île », taquine Jean Bonnefon, ami intime de celui qui, durant quarante-deux ans, a fait voyager des générations aux quatre coins du globe grâce à l’émission « Thalassa ». Disparu le 10 janvier 2021 à l’âge de 73 ans, il repose à Monestier, en Dordogne.
« Mon père n’était pas un marin. Il vivait à Paris. Il disait souvent qu’en épousant ma mère, Monique, il avait épousé le Périgord. » Fanny Pernoud n’a rien oublié de ses grandes vacances…
« Mon père n’était pas un marin. Il vivait à Paris. Il disait souvent qu’en épousant ma mère, Monique, il avait épousé le Périgord. » Fanny Pernoud n’a rien oublié de ses grandes vacances passées à Monestier, chez ses grands-parents maternels. « Ils parlaient patois. Mon père, né au Maroc et déraciné, a trouvé chez eux une véritable famille. Il aimait leur bon sens paysan. Ça, et le pâté jaune ! »
Une gourmandise corroborée par le couple Jean et Ginette Bonnefon : « Quand nous montions à Nanterre voir les Pernoud, nous apportions toujours un faitout rempli de confit ou d’une sauce aux cèpes… Il fallait voir sa réaction quand il l’ouvrait ! » Modeste, accessible, Georges Pernoud s’impliquait pleinement dans la vie locale lorsqu’il posait ses valises en Périgord, après des semaines de reportage en Polynésie ou dans la mer des Caraïbes. « Foire aux vins de Sigoulès, courses à l’hippodrome de Villeréal en Lot-et-Garonne, Festival des épouvantails à Meyrals… », liste, de manière non exhaustive, Jean Bonnefon.
Mais en Dordogne, point de balades en gabarre ou en canoë. « Quand il était ici, le bateau, ça ne lui manquait pas. Ça lui rappelait trop le travail », plaisante Fanny Pernoud. « On a essayé cent fois de lui faire faire un reportage sur nos rivières. Il nous répondait que c’était de l’eau douce, et que lui préférait l’eau salée ! Le reportage le plus proche, c’était sur le mascaret », témoigne Jean Bonnefon.
Leur amitié est née en 1993, d’un reportage du Périgourdin de naissance sur celui qui en avait adopté la philosophie. « J’étais journaliste à Aqui TV et j’ai trouvé son numéro dans l’annuaire, sur la commune de Monestier. Il m’a dit qu’il nous regardait tous les soirs avec son beau-père, et qu’il voulait savoir comment fonctionnait cette télévision locale. » Un épisode qui témoigne de la curiosité sans bornes de Georges Pernoud pour l’être humain. « Jacques-Yves Cousteau se passionnait pour les poissons. Lui s’intéressait aux gens », philosophe Jean Bonnefon.
« Il a été l’un des premiers à montrer le septième continent, cette immense plaque de déchets plastiques, et à alerter l’opinion. Ses équipes étaient toujours ouvertes sur le monde », complète Ginette Bonnefon. Son mari relance : « En Tunisie, il était très connu. Je me souviens qu’une fois, on l’a reconnu au fin fond du désert. Mais en Bretagne, il était LA star. Un jour, nous étions à la grille du sémaphore de la pointe du Raz. Il sonne à l’interphone et dit, “bonjour, c’est Georges Pernoud, on peut visiter ?”. Les militaires sur place ont appelé l’amirauté et nous avons pu découvrir le complexe. »
Le créateur des émissions « Thalassa » et « Faut pas rêver », cadreur de formation, rendra la pareille à un autre amiral, Olivier de Kersauson. « Il lui a fait visiter Lascaux, la vraie. Il adorait le Périgord noir, les bords de la Vézère et de la Dordogne, le pont du Garrit. Il sentait l’humanité sur ces terres préhistoriques et historiques », dépeint Ginette Bonnefon.
Et lorsqu’il était à l’autre bout du monde, Georges Pernoud n’oubliait pas ses amis de Dordogne : « Il nous a offert un bâton de pluie, une flûte indienne d’Amérique du Sud, des graines de baobab. Il prenait le temps de nous envoyer une carte postale, insiste Jean Bonnefon. Il adorait la Sibérie. Je me souviens qu’il nous avait ramené du caviar. »
Un mets partagé « avec les copains du Périgord », et prolongé par un plat typique un peu plus tard dans la nuit… « Dans la plus pure tradition occitane, les soirées se finissaient souvent au tourain », taquine Fanny Pernoud. « Il disait : “Vingt ans en Dordogne, c’est 20 kilos” », relancent les Bonnefon. Surtout, Georges Pernoud profitait de ses escales périgourdines pour travailler, penser, créer.
« Il m’a transmis l’amour de la mer, du journalisme et du Périgord, affirme Fanny Pernoud. Lorsqu’il est décédé, nous avons reçu des milliers de messages, parfois très personnels. » À tous leurs auteurs, il avait souhaité « bon vent ! ».

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