Le nord de l'Italie, qui assure 40 % de la production agricole, est dévasté. Deux tiers de certaines récoltes de fruits et légumes ont déjà brûlé et celles de blé chutent d'un tiers. La moitié des entreprises agricoles sont menacées.
Par Olivier Tosseri
L'agriculture italienne est en danger. La Coldiretti, le principal syndicat du secteur, lance ce cri d'alarme dans un rapport exposant les conséquences concrètes des vagues actuelles de chaleur. Au cours des six premiers mois 2022, les températures ont bondi de 2 degrés par rapport aux moyennes historiques en Italie. Au cours de l'hiver et du printemps dernier, les moyennes saisonnières de neige et de pluie se sont effondrées respectivement de 60 % et de 80 %.
C'est dans ce contexte que s'est abattue sur le pays la pire sécheresse de ces soixante-dix dernières années obligeant le gouvernement à décréter l'état d'urgence. Ce début d'été a également été marqué par l'effondrement meurtrier du glacier de la Marmolada dans les Alpes italiennes ainsi que la multiplication des incendies . Depuis le 15 juin, on recense plus de 33.000 interventions des pompiers, soit 4.000 en plus que l'an dernier à la même période.
Les photos désertiques du delta du Pô, principale réserve d'eau pour les régions les plus fertiles du pays, ont fait le tour des médias internationaux. Tout comme celles des rizières d'Emilie-Romagne qui sèchent littéralement sur pied.
ENQUÊTE – Rien ne va plus pour la tomate italienne
Coldiretti a commencé à évaluer les dégâts. Ils sont déjà de plus de 3 milliards d'euros et devraient atteindre 6 milliards d'euros d'ici à la fin de l'été, soit 10 % de la valeur de la production agricole nationale. Un quart du territoire italien est désormais menacé par un phénomène de désertification.
Toutes les récoltes subiront cette année de lourdes pertes. Celles de blé dur pour les pâtes et de blé tendre pour le pain baisseront en moyenne respectivement de 20 et 30 % avec des pointes à 40 %. Celles du riz et du maïs s'effondreront de 30 et de 50 %.
La sécheresse a également des conséquences sur les animaux. Les vaches boivent chaque jour jusqu'à 140 litres d'eau, contre 70 litres habituellement, et produisent 20 % de lait en moins. De quoi mettre à genoux l'agriculture italienne. Le bassin du Pô, le plus sévèrement touché, assure à lui seul près de 40 % de la production agricole nationale.
La production d'huile d'olive sera inférieure de 30 % à celle de 2021, avec un pic de 40 % dans les Pouilles, principale région productrice. Plus largement, c'est l'ensemble de la filière horto-fruticole qui sera lourdement pénalisée. Dans certaines régions, 70 % des fruits et légumes ont déjà été réduits à néant par la chaleur, en particulier les melons, les abricots et les aubergines. La récolte des tomates a commencé en avance et le rendement est déjà inférieur de 11 %. Les pertes pour les exportations de fruits et légumes (dont le chiffre d'affaires est d'environ 5 milliards d'euros) sont estimées à plus de un milliard d'euros.
Les agriculteurs italiens, qui doivent déjà affronter une hausse de 170 % du prix des engrais en raison de la guerre en Ukraine, demandent une aide du gouvernement. Au début du mois, Mario Draghi avait annoncé la mise en place d'un fonds de 36,5 millions d'euros mais la chute de son cabinet retardera son déblocage. Selon Coldiretti, la survie de 46 % des entreprises agricoles serait aujourd'hui menacée.
Toujours très élevés, les prix alimentaires poursuivent leur décrue
Olivier Tosseri (Correspondant à Rome)
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