Publié le 03/02/2022
Pascal Jacquet
La sentence est tombée comme un couperet et a saisi la salle d’audience. « Le tribunal vous condamne à deux ans de prison ferme et prononce un mandat de dépôt à votre encontre. Vous partez en prison dès à présent », a lancé le président de l’audience à Mathias Dorieux, interloqué. Cris et pleurs de la famille du prévenu ont accompagné le délibéré.
L’homme de 32 ans, pépiniériste de profession, était jugé pour des violences sur conjoint, en présence d’un mineur.
Les faits se sont déroulés le 18 avril 2021 à Montagny. Le couple était invité pour la soirée chez des amis, avec leurs deux enfants de trois et six ans. Une soirée visiblement bien trop arrosée pour cet homme pourtant à la morphologie impressionnante. Vers 21 heures, le couple décidait de rentrer malgré l’alcool ingurgité, qui avait provoqué des vomissements du trentenaire.
Le plus grand des enfants restait chez les amis et les parents prenaient la voiture, avec le plus petit à l’arrière. La maman se mettait volant et Mathias Dorieux prenait place sur le siège passager avant. Mais après quelques kilomètres, celui-ci demandait à sa conjointe de s’arrêter pour régurgiter de nouveau. L’homme décidait alors de prendre le volant. Mais face au refus de sa compagne, il l’expulsait de la voiture et la jetait au sol. Il faisait ensuite mine de partir sur quelques mètres, la laissant gisante sur la chaussée, avant de se raviser.
Comme elle refusait de monter à l’avant de la voiture, le trentenaire prenait une décision des plus troublantes : « Elle était hystérique, elle m’insultait. Je ne voulais pas la laisser au bord de la route, mais je ne voulais pas la mettre à côté de mon fils, par sécurité. Je l’ai donc chargée dans le coffre », explique calmement Mathias Dorieux à la barre.
Il prenait ensuite la route pour faire les six kilomètres jusqu’au domicile familial. Là, il mettait son fils au lit, puis venait s’occuper de sa compagne, toujours dans le coffre de la Peugeot 4008. Il la traînait jusqu’à la salle de bains pour la passer sous une douche froide, lui administrant au passage deux ou trois gifles. « Ce n’était pas pour lui faire mal, c’était pour la réveiller car elle était inconsciente ou jouait la comédie », assure-t-il, avant de reconnaître qu’il avait mal agi. « On était alcoolisés tous les deux. J’ai paniqué, j’aurais dû appeler les pompiers », regrette-t-il.
Sa compagne déposera plainte en septembre dernier, après la séparation du couple. « Pour que ses deux enfants sachent que ce n’est pas ça l’amour », explique Me Sarah Morel, l’avocate de la mère de famille. Elle rappelle également les déclarations de la sœur de la victime, qui assure qu’il s’agissait du troisième épisode de violences conjugales.
L’avocate affirme aussi que « deux ou trois gifles seulement », comme l’a reconnu le prévenu, ne laissent pas autant d’hématomes sur le visage, la gorge ou encore les jambes, comme le prouvent les photos prises par la victime après les faits. Elle réclame 4.000 € de dommages et intérêts pour le préjudice moral, se référant à un certificat médical de sa cliente le 14 octobre, qui parle de « sentiment de mort imminente » et octroie une interruption temporaire de travail (ITT) de quatre jours.
Pour le conseil de Mathias Dorieux, Me Raphaël Salzmann, « ce qui s’est passé ce jour-là est très moche » et a fortement contrarié son client. Pour dédouaner quelque peu ce dernier, il met en avant l’alcoolisation de ce dernier, « qui l’a empêché de mesurer le retentissement de ses agissements », mais remet également en cause les déclarations de la victime : « Il a agi d’une façon inquiétante mais ponctuelle. C’était un accident de parcours. La plainte doit être déposée pour que justice soit rendue, et non pour se venger en en rajoutant pour régler des comptes ».
Ambre Bernard, la substitut du procureur, voit dans les regrets du prévenu « une reconnaissance partielle des faits de façade ». Elle requiert 18 mois de prison avec sursis probatoire, avec une obligation de soins et des interdictions de contact et de paraître au domicile de la victime.
Wilfrid Exposito, le président de l’audience est allé bien au-delà de ces réquisitions, condamnant Mathias Dorieux à de la prison ferme et en l’envoyant derrière les barreaux le soir même, malgré son casier judiciaire vierge de toute condamnation avant ces faits.
Me Salzmann a fait appel de cette décision pour son client dès le lendemain matin.
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