Challenges Automobile Actu auto
Par Alain-Gabriel Verdevoye le 03.12.2021 à 12h40 Ecouter 6 min.
En novembre, l’occasion progressait de 5%, contre une baisse de 3,2% pour le neuf. Et, si l’on se réfère à 2019 avant la pandémie, le contraste est encore plus flagrant : l’occasion a crû sur onze mois de 4%, le neuf a plongé de 25%. Mais les municipalités veulent… interdire de circulation les voitures âgées !
Stand de voitures d’occasion en Ile-de-France
Les immatriculations de voitures neuves peinent, le marché de l’occasion explose. Sur onze mois, les transactions de modèles usagés ont progressé en France de 9,3% (à 5,5 millions d’unités), selon le site Autoscout 24, contre une hausse de 2,5% à peine pour les voitures zéro kilomètre (à 1,5 million).  Sur le seul mois de novembre, l’occasion progressait de 5%, contre une baisse de 3,2% pour le neuf. Et, si l’on se réfère à 2019 avant la pandémie, le contraste est encore plus flagrant : l’occasion a crû sur onze mois de 4%, le neuf a plongé de 25%. Le marché français de l’occasion va du coup "battre son record à six millions de véhicules", contre 5,5 millions l’an dernier et 5,8 millions en 2019, pronostique Olivier Flavier, directeur auto du site Leboncoin.  
Le manque de véhicules neufs à cause de la crise des semi-conducteurs a certes conjoncturellement reporté les acheteurs potentiels vers des occasions récentes, ce qui a favorisé la progression de ces transactions. Mais, aujourd’hui, "on manque de ces modèles", note Laurent Potel, dirigeant du site Reezocar. Dès lors, l’explication du succès de l’occasion s’explique par des raisons plus structurelles. Et le primat de l’occasion ne peut que se renforcer. "Il y a un fort attentisme, car les clients ne savent pas quoi acheter devant les incertitudes sur les futures règles d’utilisation de la voiture, règles et objectifs changeant en permanence", indique ainsi Florent Menegaux. Le patron de Michelin constate ainsi que les pénuries n’expliquent pas à elles seules la chute du neuf. Il y a " la réalité d’une demande très faible" pour le neuf, car "les gens ne savent pas s’il pourront rouler avec un diesel, s’ils pourront recharger une électrique". D’où, en attendant de voir plus clair, un investissement plus modeste sur des voitures usagées. Et ce, d’autant que de fortes incertitudes pèsent sur la cote de revente des modèles thermiques dans deux ou trois ans.
A ce phénomène s’ajoute "la migration de citadins vers les campagnes, qui obligent à acheter un véhicule, mais pour lequel on ne veut ou ne peut pas débourser trop d’argent", insiste Olivier Flavier. Plus durablement, l’électrification imposée par Bruxelles générera des "modèles beaucoup plus chers qu’un véhicule à moteur 1,0 d’il y a dix ans. C’est plusieurs milliers d’euros supplémentaires en coût de revient",  argue Gilles Le Borgne, directeur de l’innovation de Renault. "Ce qui a été décidé, c'est d'imposer à l'industrie automobile une électrification qui ajoute 50% de coûts additionnels à un véhicule conventionnel", estime pour sa part Carlos Tavares, directeur général de Stellantis. Voilà des motifs suffisants pour se détourner du neuf aux tarifs de plus en plus prohibitifs. En outre, "le pouvoir d’achat des gens ne va pas grimper et une partie de la population va devoir basculer dans le véhicule d’occasion", ajoute Luca De Meo, directeur général de Renault. D’où le lancement d’une activité de reconditionnement des modèles usagés à l’usine Renault de Flins (Yvelines) !
Sale temps donc pour le neuf. Mais acheter une voiture d’occasion n’ira pas toutefois sans embûches. Car les pouvoirs publics ont décidé de traquer les vieilles voitures et de retreindre leur utilisation. Les ZFE (zones à faibles émissions), créées en théorie pour diminuer la pollution, vont en effet progressivement bannir les véhicules âgés, et donc les moins chers, des agglomérations, à l’exemple de ce que pratiquent déjà Paris, le Grand Paris, la métropole de Lyon, Grenoble-Alpes-Métropole. D’ici à fin décembre, sept autres métropoles vont imposer ces aires à circulation interdites. Et puis, ce sera au tour de toutes les agglomérations de plus de 150.000 habitants d’ici à 2025 avec, à l’échéance, l’interdiction de tous les modèles à essence commercialisés avant 2005, ainsi que des diesels d’avant 2010. Ça c’est la règle générale. Mais chacun pourra en outre durcir les règles à son gré. Dans certaines métropoles comme Paris, ce sera ainsi plus draconien. La maire Anne Hidalgo veut carrément y proscrire tous les diesels en 2024. Même ceux aux dernières normes Euro 6d.
Fâcheux, alors que les véhicules de plus de cinq ans représentent plus de 60% des ventes de modèles d’occasion, ceux de plus de neuf ans 45%, selon Leboncoin. Et ce, alors que "76% des personnes ont besoin d’une voiture pour aller travailler", souligne Jacques Aschenbroich, PDG de Valeo. "J’appelle les ZFE (Zones à faibles émissions) des zones fortement éruptives", lâche ainsi ironiquement Bernard Jullien, spécialiste de l’automobile et maître de conférences à l’Université de Bordeaux, qui redoute des explosions sociales contre ces restrictions. "L’acceptabilité est un problème majeur", reconnaît même Jean-Luc Fugit, député de la majorité du Rhône et président du Conseil national de l’air. A vouloir proscrire les modèles autres que les véhicules neufs ou récents, "on creuse l’écart entre les élites urbaines et le reste de la population", résume Bernard Jullien, reconnaissant au passage que "les voitures neuves s’adressent à une minorité de gens vieux et riches"…

Déjà un compte ? Je me connecte
Déjà un compte ? Je me connecte
Accepter et continuer
Centre de préférence
de vos alertes infos
Vos préférences ont bien été enregistrées.
Si vous souhaitez modifier vos centres d’intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.
Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?
Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

source

Catégorisé: