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Ils sont routier, boucher et ingénieur, ces trois Azuréens et Varois s'inquiètent de la reforme des retraites. Si certains ont pris des dispositions pour assurer leurs vieux jours, d'autres sont dans l'impossibilité de le faire. Ils témoignent.
Pourquoi? Pour qui? Quel montant?… On fait le point sur la réforme des retraites qui sera dévoilée ce mardi
À 36 ans, Laurent Cornillot ne s’est pas encore vraiment penché sur son dossier de retraite. Pourtant, les débats autour de la réforme le travaillent.
Salarié depuis deux ans d’Azuréenne Location, basée à Nice, ce conducteur de poids lourds domicilié aux Arcs, dans le Var, a déjà 17 ans de route au compteur, dans différentes sociétés de transport. Surtout, il a l’exemple de son père et de son grand-père, qui ont exercé le même métier avant lui et n’ont pas profité de la retraite comme ils auraient pu le souhaiter.
“Mon grand-père a fait un infarctus, sans doute en partie à cause de la pénibilité du travail, et mon père a dû changer de métier. Après deux infarctus, il a opté pour la vente et est resté dix ans en invalidité avant sa retraite”, résume ce père de trois enfants de deux mères différentes, dont la compagne actuelle conduit elle aussi des semi-remorques.
“Notre travail est difficile, sur la route tout le temps, à chercher des lieux où dormir et manger. Des chauffeurs routiers à la retraite en bonne santé et avec quelqu’un auprès d’eux, je n’en connais pas beaucoup”, assure ce passionné de son métier, conscient toutefois de l’usure qui s’installe au fil des ans.
C’est une des raisons pour lesquelles il fait beaucoup moins de longues distances, privilégiant les trajets régionaux qui lui permettent de rentrer quasiment tous les soirs chez lui. Pour autant le rythme est dense; départ à 5h le matin pour un retour à 17h30/18h, avec le plus souvent une cargaison de vrac à l’aller et des palettes au retour.
Une cargaison qu’il faut bâcher et débâcher, un travail physique en plus de la tension liée aux heures de conduite. Et souvent des heures supplémentaires, ou des primes, qui composent une bonne partie du salaire.
“Du coup, on ne sait pas ce qu’on va toucher. Si c’est sur la base de notre salaire, il n’est que de 1.300€ mais il y a des mois où j’atteins 3.000€… Qu’est-ce qui sera pris en compte?”
Quant à épargner, Laurent n’en a pas les moyens. Il se demande aussi si dans dix ans, il aura toujours la même énergie au travail, malgré sa passion. “Je le vois, les collègues autour de moi, passé 50 ans, ils sont rincés.”
Alors repousser l’âge de départ, le trentenaire n’est pas d’accord. “Mais on n’a pas les moyens de protester. Si je fais grève, c’est mon entreprise que je pénalise et mon patron est un des rares qui a été honnête avec moi de A à Z. On est dans un secteur hyperconcurrentiel. Si on ne travaille pas, ce sont les transporteurs lituaniens qui passeront devant nous.”
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Alain Pons, 47 ans, artisan boucher à Grasse, a commencé à travailler à l’âge de 13 ans. “Boucher, c’est un métier pénible, physique. On est debout toute la journée, on porte des charges lourdes… Je fais 70 heures par semaine, je travaille tous les week-ends et je prends seulement quinze jours de vacances par an”.
Malgré cela, il n’envisage pas de raccrocher le tablier à 62 ans, ni même à 64 ou 65 ans. “Ça ne m’intéresse pas d’arrêter de travailler, explique-t-il. Je continuerai car j’aime mon travail pour le lien social que j’ai avec les clients, et pour aider mes enfants comme j’ai été aidé. Se retrouver à la maison à rien faire avec une petite retraite, non merci! Je suis déjà fatigué, je sens que je n’ai plus le même corps qu’avant, mais c’est l’amour du métier qui me tient. Mon père, boucher également, a travaillé et cotisé toute sa vie pour gagner 1.200 euros de retraite. On fait quoi avec 1.200 euros par mois? Quand on compare ce qu’on donne à ce qu’on recevra, à peine le Smic en ce qui me concerne, ce n’est pas intéressant. Ma retraite, je me la construis moi-même. J’ai investi dans la pierre. J’ai acheté des appartements et des maisons que je loue. C’est plus rassurant”.
Alain Pons ne suivra pas la présentation de la réforme à la télévision. Il ne s’intéressera pas aux débats qui suivront.
“J’écoute tout ça de loin. D’ici à ce que j’arrive à 65 ans, on aura changé plusieurs fois de Président… Que restera-t-il de la réforme des retraites d’aujourd’hui? Je préfère ne pas compter dessus. Dans ce projet, tout est à revoir. Qu’on invite des commerçants à l’Assemblée nationale et qu’on les écoute avant de décider ce qui est bon pour eux. Il ne suffit pas d’aligner des chiffres pour contenter les commerçants. Je pense que pour résoudre le problème du paiement des retraites, il faudrait davantage s’occuper des jeunes qui sont ou vont être en âge de travailler, et les accompagner”.
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Carole Malbrancq est ingénieure en microélectronique pour Siemens, à Sophia Antipolis. Cette Toulousaine de 52 ans arrivée depuis de nombreuses années dans la région a débuté dans la vie professionnelle à 25 ans.
Sa retraite? Elle la prépare depuis plus de dix ans parce qu’elle a “trop vu ses parents galérer, explique-t-elle. Je suis issue d’une famille d’ouvriers. Mon père était artisan plombier et ne s’est jamais préoccupé de ce qu’il allait toucher une fois à la retraite. Ma mère, elle, s’occupait de ses cinq enfants et n’a commencé à travailler à l’usine qu’à 40 ans pour toucher une pension microscopique: 800 euros par mois.”
En réaction, Carole Malbrancq a ouvert un Plan d’épargne retraite (PER) et a investi dans l’immobilier. “Pour l’instant, la location du bien me rembourse le crédit, et à terme, le loyer que je percevrai complétera ma retraite.”
Concernant la réforme qui se profile, l’ingénieure est dubitative. “Je ne vais pas me plaindre, mais même si on est dans des bureaux où physiquement c’est moins fatigant que le travail d’un maçon ou d’un personnel hospitalier, on a quand même besoin d’une certaine vivacité d’esprit. On a un travail stressant psychologiquement. Je suis dans les nanotechnologies et cela signifie que tous les deux ans, la technologie évolue, que je dois m’adapter et aller en Corée et à Taïwan pour être formée. Je me demande aussi si à 65 ans, j’aurai toujours le dynamisme de le faire. Voire si j’en aurai encore envie.”
Elle réfléchit donc à d’autres projets qui lui “permettraient d’aller jusqu’à la retraite, en faisant quelque chose qui me plaît. Pour l’instant, ils ne sont qu’à l’état embryonnaire et je n’ai pas encore passé le cap.”
Et la quinquagénaire d’insister: “J’ai la chance de ne pas diriger d’équipe, mais je pense à ces responsables sous pression qui gèrent des collaborateurs, qui doivent rédiger des rapports ou être en réunion à pas d’heure… Pas évident à 64 ans! On perçoit facilement la pénibilité des professions manuelles, mais peu le burn-out psychologique.”
Calendrier, âge, cotisations, opposants… On fait le point sur la réforme des retraites, à une semaine de sa présentation
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