De quelle guerre l’église de Saint-Martin-de-Ré porte-t-elle les stigmates ? Celle liée aux bombardements de la flotte de navires hollandais alliés aux Anglais, en 1696, sous Louis XIV. À portée de fusil de l’ex-place d’armes – la bien nommée place de la République –, posés au-dessus de la porte d’entrée d’un jardin rue du Général-Lapasset, deux boulets de canon témoignent des affrontements.
Des Néerlandais pourtant appréciés au-delà de la religion protestante – Saint-Martin-de-Ré accueille le dernier temple de l’île –, car ces voyageurs se montrent doués pour le commerce. Commerce du vin, du cognac, du sel, des pommes de terre… Des patates, il n’en manque pas sur cette langue de terre et de sable de 85 kilomètres carrés. Des familles de négociants ont érigé des maisons, celles du Fier et du Roc aux Portes-en-Ré et de confortables demeures au milieu de champs, à dénicher dans les lieux dits le Vert Clos à Saint-Martin-de-Ré , les Marattes au Bois-Plage ou les Tourettes à Loix .
Qui dit Pays-Bas dit plat pays. L’île de Ré n’a rien à lui envier. Son point haut culmine à 20 mètres au Peu des Aumonts, à Bois-Plage . Dès lors, le vélo règne en maître des lieux. Le cycle est goûté par ses 18 000 habitants et ses milliers touristes. Tous profitent des 35 loueurs et 138 km de pistes bordant les 100 km de côte, 520 ha de parcs ostréicoles, 66 km de dunes, 500 ha de vignes, 50 km de plages, 1 600 ha de marais dont 450 de marais salants, autant de paysages naturels d’une île protégée, à 80 % inconstructible. Oui, les Néerlandais roulent sur un réseau de 37 000 kilomètres, la ville d’Amsterdam compte 600 000 vélos pour 743 000 habitants. Ils pédalent au bord des canaux et des 10 000 moulins dont les 19 de Kinderdijk, près de Rotterdam , inscrits à l’Unesco. Des moulins érigés pour assécher marais et polders afin de gagner des terrains sur la mer.
Si l’île charentaise a compté 180 moulins à vent au XIXe siècle, « entre ceux sans ailes, étêtés et ceux disparus… Il ne reste que les fûts pour certains comme à Sainte-Marie-de-Ré, Saint-Clément-des-Baleines ou Ars-en-Ré. Certes, il y a un moulin complet au Bois-Plage », note Stéphanie Le Lay (1). La responsable du service patrimoine à la communauté de communes rétaise évoque les fortifications Vauban, dont la citadelle de Saint-Martin-de-Ré, classée à l’Unesco.
Fortifications encore avec les digues et l’après-Xynthia, la tempête de 2010, soit une enveloppe de 44,6 millions d’euros engagés sur une dizaine de projets. Une protection connue au Pays-Bas dont un quart du territoire est sous le niveau de la mer.
Une mer dont profite la centaine de sauniers de l’île charentaise, avec le double jeu quotidien des marées. Fondée en 1942, la coopérative , qui rassemble 70 adhérents, a récolté, en 2019, plus de 2 000 tonnes de gros sel et 200 tonnes de fleur de sel, à l’égal de la collecte de Noirmoutier (85).
Quant aux sens des mots charroi, nourrice, ou vasais, demandez au président de la coopé, Loïc Abisset, autour d’une bonne bière de l’île : Les Petites Réthaises de Rivedoux-Plage ou les Bières de Ré à Saint-Marie-de-Ré, deux brasseries artisanales. Certes, leur production ne peut concurrencer le monstre Heineken. Mais c’est comme la pêche. Industrielle en Hollande… et qui se pratique tout simplement à pied sur Ré, renforçant l’esprit non pas marin, à l’image de l’île elle-même, mais de plaisance des ports de Rivedoux, La Flotte-en-Ré, Saint-Martin-de-Ré et Ars-en-Ré.
(1) Stéphanie Le Lay vient de publier « Le Petit dictionnaire du patrimoine de l’île de Ré », Geste édition.
(2) Loïc Abisset, Tél. 06 31 69 30 79.

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