(Il rit) Oui, c’est vrai ! À la fin de la dernière saison, j’ai ressenti une petite lassitude. Je ne sais pas si cela est dû au projet Arkéa Paprec qui était dur à vivre (NDLR : il a disputé la Transat Jacques Vabre avec Sébastien Simon, 4es, qui était débarqué à l’arrivée) ou si c’est une lassitude plus globale du haut niveau ou de l’Imoca mais j’avais envie de faire autre chose.
Estelle Graveleau, directrice du Team Vendée formation, cherchait un directeur de course : elle en a parlé à la Fédération française et mon nom est sorti je ne sais pas trop comment. Le format de la course Académie, qui est de faire de la formation de jeunes entrants, colle bien avec l’arrivée d’un nouveau directeur de course. Cela nous met tous sur un pied d’égalité, on sera tous des débutants. Je n’avais pas prévu de répondre à cet appel mais en parlant avec mes formateurs à l’ENSV Quiberon, ils m’ont dit que c’était une bonne idée.
Je suis en formation pour passer mon diplôme d’entraîneur, un DEJPS (Diplôme d’État Jeunesse, Éducation Populaire et Sport). Je porte plusieurs casquettes cette année, je suis stagiaire en formation, je suis jeune directeur de course, je suis en alternance au Pôle Finistère Course au Large de Port-la-Forêt et aussi conseiller technique. À Portlaf’, ils ont besoin d’un troisième collaborateur. Je fais une partie en alternance où j’ai une mission avec des travaux à rendre pour ma formation et, le reste du temps, je suis entraîneur. Pour l’instant, je n’ai pas le diplôme d’entraîneur, donc je dois évoluer dans un cadre où il y a toujours ou Jeanne Grégoire ou Erwan Tabarly à mes côtés.
Très franchement, je ne sais pas où cela va me mener : est-ce une reconversion pure, est-ce une espèce de départ à la retraite dans ma carrière de skipper ? Ou est-ce un petit sas qui va me permettre de me remotiver et me reconcentrer sur autre chose, je ne sais pas. Sidney Gavignet dit que ça lui a pris trois ans pour se former, trouver sa voie. Il faut essayer les choses, aller au bout de certaines missions professionnelles pour savoir si ça nous plaît ou pas. Je me verrais bien à mi-temps entraîneur et à mi-temps directeur de course.
Oui sans doute mais il y a une certaine forme de lassitude par rapport au sport de haut niveau, à ce que cela exige en termes de recherche de partenaires. Notre sport est multicasquettes, tu dois être bon sportivement mais tu dois aussi être bon de manière extra-sportive et c’est sur cette dernière pratique que j’ai le plus de mal.
Les dernières tentatives pour réunir un budget ont échoué. Parce que je n’y mets pas assez d’énergie. Je pense surtout que je n’ai pas été bon dans les transitions de mes projets. J’ai souvent été mauvais à ce moment-là. À chaque fois, je repars à zéro. Je n’ai plus envie d’aller chercher du fric, plus envie de faire des ronds de jambe, plus envie de courir les salons. Je ne suis plus câblé pour cela et je ne suis pas prêt à certaines compromissions pour y arriver. Mais ce n’est pas grave si je m’éclate dans mes nouvelles fonctions.
Oui, mais à 48 piges, naviguer à haut niveau en Figaro, je me suis rendu compte que c’était dur. Je me suis rendu compte que je ne pouvais plus gagner la Solitaire du Figaro, même si je n’en étais pas très loin. J’ai senti mes limites, notamment au niveau de la récupération du sommeil, c’est trop violent, trop dur. Je n’arrive pas à récupérer. Lors d’une escale, si je n’ai pas trois nuits de sommeil derrière, je suis dans le rouge.
Oui, je vais disputer le Pro Sailing Tour avec lui et je serai son remplaçant sur la Route du Rhum. Je veux continuer à naviguer, en équipage ou en double mais pas à la tête de mon projet.
Ça peut l’être en fin d’année (NDLR : il était remplaçant pour le Trophée Jules-Verne sur Edmond de Rothschild), car j’aimerais repartir sur un Trophée Jules-Verne, donc je regarde sur Gitana 17 ou sur Spindrift mais il faut bien se rendre compte que je fais déjà beaucoup de choses : là, je suis avec la poignée dans le coin, j’ai 400 heures de formation à faire dans l’année.
Ah mais je sais que j’aurais un peu les boules ! En même temps, quand je sais l’investissement et le temps qu’il faut y mettre, je pense que je n’ai plus cette énergie-là. Il y a aussi une raison familiale.
Ma femme souhaite se lancer dans un projet d’entreprise. Je connais les sacrifices qu’ont pu faire les gens autour de moi pour que j’arrive à mener mes projets, donc je me dis que c’est peut-être aussi le moment pour moi de renvoyer la balle, d’être un peu plus présent à la maison et de laisser ma femme mener à son tour son projet professionnel.
(*) Triple vainqueur de la Solitaire du Figaro (2012, 2013 et 2015) et de la Transat Jacques Vabre (2013, 2017 et 2019), double détenteur du Trophée Jules-Verne en tant qu’équipier de Bruno Peyron (2002 et 2005). Il compte deux participations au Vendée Globe : abandon en raison d’une fracture du fémur en 2008-2009 et 5e en 2016-2017.

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