Publié le 06/07/2021 à 16h54
Florent Pétoin
C’est l’un des centres névralgiques de la Marine nationale et pourtant, pas l’ombre d’un bateau à l’horizon. Il y a bien de l’eau tout autour, mais elle n’est pas salée, puisque c’est celle des étangs du parc naturel régional de la Brenne, surnommé le pays des mille étangs. Le centre de transmissions (CTM) de Rosnay se situe en effet en plein centre de la France, dans l’Indre, à plus de 200 km des côtes. Ce qui a inspiré à l’amiral Pierre Vandier, chef d’État-major de la Marine, l’expression de « marins d’outre terre ».
De la terre, il y en a, à perte de vue, tout autour du CTM, entre les étangs, dans ce secteur rural à la densité de population peu élevée. De la terre, il y en également en quantité au sein même du CTM. 550 hectares exactement.
Néanmoins, le CTM ne passe pas inaperçu. La faute à ses treize imposants pylônes, six de 210 m, six de 270 m et un dernier, au centre, de 357 m. Ce qui en fait la plus haute structure de France, devant la Tour Eiffel et la deuxième pile du viaduc de Millau.
Ces pylônes servent de support à un maillage d’antennes. Le rôle de ces antennes est primordial. Elles transmettent, via des émissions radio basse fréquence, les communications de la Force océanique stratégique, basée à Brest, vers les quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et les six sous-marins nucléaires d’attaque. Des messages codés dont les marins de Rosnay ne connaissent pas le contenu réel. Il s’agit bien évidemment de communications professionnelles, mais également de messages personnels émanant des familles des marins embarqués à bord des sous-marins. 
Mais ce n’est pas tout. Le CTM a pour ultime finalité de transmettre « le fameux ordre dont le monde entier souhaite qu’il ne nous parvienne jamais », confie l’amiral Vandier. Comprenez une éventuelle autorisation délivrée par le Président de la République de frappe ou de riposte nucléaire.
Pour ce faire, les marins qui gèrent ces transmissions opèrent bien évidemment dans un lieu ultra-sécurisé. Un « abri antiatomique », indique le chef d’État-major de la Marine, dont l’accès s’apparente à une gigantesque entrée de parking souterrain. À ses côtés s’élève une énorme antenne verte. Le bunker mesure 70 m sur 70 et 15 m de hauteur. Il se compose de « plusieurs étages », précise, évasif, l’amiral Vandier. 
Pour y accéder, il faut franchir « deux portes blindées » pesant chacune 40 tonnes. La légende veut qu’elles aient été baptisées des prénoms de la femme et de la fille du commandant Raoult, qui fut le premier à diriger le CTM.
Les émissions sont sécurisées par un système de cage de Faraday qui les protège d’éventuelles impulsions électromagnétiques consécutives à une attaque nucléaire. Quatre groupes électrogènes permettent en outre de se prémunir d’une hypothétique coupure électrique. Tout est prévu pour que quarante marins puissent remplir leur mission pendant dix jours sans contact avec l’extérieur.
Au-dehors, justement, la sécurité est assurée par des systèmes antichars, ainsi que la moitié des quelque 200 personnes qui travaillent sur le site, constituée de fusiliers marins et d’une brigade de gendarmerie maritime.
Si les moyens humains alloués au CTM peuvent, au regard de son importance stratégique, paraître modestes, l’État ne lésine pas sur les ressources financières qui y sont dédiées. Lors de la cérémonie de jubilé du cinquantenaire du CTM de Rosnay, l’amiral Vandier a ainsi repris ce célèbre aphorisme qui dit que « quand les gros sont maigres, il y a longtemps que les maigres sont morts », invitant ses troupes à se réjouir de faire partie des gros. 
550 millions d’euros ont ainsi été dédiés ces dernières années à la modernisation des quatre CTM que compte la France (celui de Rosnay ainsi que ceux de Kerlouan, France sud et Sainte-Assise). C’est le prix pour que la transmission des communications de la Marine ou du Président de la République continue d’être assurée en toute sécurité par les CTM, notamment celui de Rosnay.
Mise en service du centre de transmissions de la Marine de Rosnay, le premier du genre, sur un terrain qui a été choisi pour la qualité de son sol, propice aux transmissions, conjugué à un prix du m2 défiant toute concurrence et une position stratégique, car éloignée des frontières du pays. Le premier commandant est un certain… Raoult.
Accompagnement de la première patrouille du Redoutable 3.
Jubilé du centre de transmissions de la Marine de Rosnay à l’occasion de son cinquantenaire.
 
Florent Pétoin
Twitter : @FloPetoin

2 commentaires
Valmont Luc a posté le 08 juillet 2021 à 10h31
Et pourquoi pas , publier les plans? On est un peu angélique de ce coté là…
Christian LEBRETON a répondu le 08 juillet 2021 à 20h15 Rassurrez-vous Cher Luc Valmont ! Rien de ce qui est inmontrable a été montré au reporter de votre quotidien préféré … Le Centre de transmissions de Rosnay est un élément de nos forces de dissuasion nucléaire. Pour que la dissuasion joue pleinement son rôle, elle doit être crédible. Et pour être crédible, elle doit dévoiler quelques-uns de ses atouts, sans rien trahir de ce qui fera son succès en cas de mise en œuvre. Dévoiler juste ce qu’il faut pour que, finalement, la France n’ait pas à la mettre en œuvre. Bref, le principe même de la dissuasion.
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