Les classements se suivent et ne se ressemblent pas pour Bordeaux. En tête de l’indice « Great place to work » depuis 5 ans, elle est considérée comme LA ville la plus attractive de France, celle où 32% des Français voudraient travailler, devant Toulouse et Aix-en-Provence.
Mais le rêve exprimé dans ce sondage se heurte à une réalité moins glamour, soulignée par le dernier baromètre de l’attractivité du site d’offre d’emplois Jobijoba et de l’expert immobilier Meilleurtaux.com, publié ce lundi.
Bordeaux n’y figure qu’à la 20e place sur 30 villes françaises, dans un classement croisant le nombre d’offre d’emplois en CDI (contrats à durée indéterminée) et les prix des logements. Elle était 11e en 2017 (sur 20 villes).
Avec 107 370 offres, soit 13,89 CDI pour 100 habitants, la cité de pierre ne s’en tire pas trop mal – Rennes et Toulouse n’ont par exemple que 10,08 et 10,66% de CDI. Sauf que ces villes sont devant Bordeaux au classement (respectivement 14, 15 et 16e), loin du podium trusté par les cités de moindre importance, où la tension sur les prix du logement est bien moins forte (Besançon, Orléans, Saint-Etienne).
Car le prix du m2 à Bordeaux (4693 euros) est le plus cher de France après Lyon (4896 €) et Paris (10451€). Mais avec 24,06% de CDI, la capitale des Gaules se retrouve ainsi 6e au classement.
Vues les capacités de remboursement de ses habitants, les Bordelais peuvent accéder à seulement 32m2, contre 34 à Lyon (et 74 à Besançon…). Grâce à des prix du logement bien moindres, Grenoble (4e de l’indicateur) ou Strasbourg (7e) devancent également Bordeaux. Nantes (21e), Montpellier (24e), Paris (26e) et Nice (28e) sont à la traîne.
Le quartier des Chartrons, où les prix s’emballent (SB/Rue89 Bordeaux)
« Cette dégringolade est le prix du laisser-faire de l’équipe municipale, a réagi ce lundi le candidat à la mairie de Bordeaux Vincent Feltesse. Leur seule réponse est la fameuse politique de l’offre : toujours plus de logements quitte à défigurer notre ville. Cela ne fonctionne clairement pas. Il faut au contraire plus de régulation : sur l’encadrement des loyers, sur les préemptions foncières qui ne sont toujours pas utilisées malgré l’existence d’un établissement public foncier, sur la lutte contre AirBNB… »
Des propositions déjà formulées par BMQ 2020, l’association fondée par l’ex président de la CUB. Le think tank Bordeaux Maintenant, fondé par son rival potentiel aux municipales, Matthieu Rouveyre a aussi récemment remis en cause la politique de la métropole, incarnée par le slogan « Magnetic Bordeaux » : attirer des entreprises sur le territoire. Dans un dossier étayé, il juge celle-ci « contre-productive ».
« Loin d’avoir fait baisser le chômage, cette action l’a renforcé », estime même Matthieu Rouveyre, conseiller municipal socialiste. 
Comment est-ce possible, alors qu’entre 2007 et 2018, 41500 emplois ont été créés (+15%) ? Parce que la croissance démographique fait que « 2,7 habitants rejoignent la métropole pour chaque nouvel emploi », selon Cédric Montet, chef d’entreprise bordelais adhérent de ce think tank.
Soit plus de néo-bordelais que de postes disponibles, contribuant à l’augmentation du nombre de chômeurs, +4,5% entre 2016 et 2019, soit 77000 demandeurs d’emplois dans la métropole (30000 à Bordeaux).
« La politique d’emplois importés nous semble néfaste, car on fait venir des sociétés avec leurs employés plutôt que d’embaucher des gens d’ici », poursuit Matthieu Rouveyre, citant les exemples de Betclic, Ubisoft ou Dassault, arrivés avec la plupart de leurs salariés dans les bagages.    
Globalement, calcule Bordeaux Maintenant, l’objectif affiché par la métropole – créer 100000 emplois – se traduirait à ce rythme par une population atteignant 1 à 1,3 million d’habitants.
De quoi, selon Bordeaux Maintenant, aggraver les problème de mobilité et de logement, en emballant la spéculation immobilière et le niveau des loyers (+16% entre 2010 et 2018). De quoi aussi accentuer les déséquilibres entre la métropole, où se crée l’écrasante majorité des emplois, et le reste de la Gironde, « où la métropole va chercher son eau potable et exporte ses déchets ». 
« Il faut faire le deuil du développement lié à l’attractivité », pense Matthieu Rouveyre, préconisant une stratégie économique fondée sur « la résilience » et l’adaptation aux défis écologiques (agriculture urbaine, recyclage des déchets…).
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