Il y avait 1910 et la création de la première criée en fond de bassin, puis 1970 et son équipement alors moderne en bordure du quai Delouteau. Désormais, la date du 17 mars 2022 est le nouveau jalon de l’histoire du développement du port de La Cotinière. Au petit matin, une émotion contenue avait accompagné la dernière vente d’une criée à bout de souffle. Tandis que l’après-midi, le bonheur s’emparait du rendez-vous donné pour la première vente dans la nouvelle halle à marée, en bordure du troisième et nouveau bassin qui accompagne cette…
Il y avait 1910 et la création de la première criée en fond de bassin, puis 1970 et son équipement alors moderne en bordure du quai Delouteau. Désormais, la date du 17 mars 2022 est le nouveau jalon de l’histoire du développement du port de La Cotinière. Au petit matin, une émotion contenue avait accompagné la dernière vente d’une criée à bout de souffle. Tandis que l’après-midi, le bonheur s’emparait du rendez-vous donné pour la première vente dans la nouvelle halle à marée, en bordure du troisième et nouveau bassin qui accompagne cette modernisation.
« Un projet initié il y a une vingtaine d’années », rappelait la présidente du Conseil départemental de la Charente-Maritime avant que le convoyeur n’enclenche son murmure cliquetant d’engrenages et de bandes transporteuses pour faire défiler les lots. 15 h 30 précises, Sylvie Marcilly incitait de quelques mots la communauté portuaire à s’approprier l’outil de 62 millions que le Département lui offre. « À vous de jouer ! », s’exclamait-elle.
Le premier bac : du homard pêché par le « Murex » présenté à la trentaine d’acheteurs présents dans la salle de vente aux parements verts et bleus, et à une vingtaine d’autres reliés aux enchères à distance, par Internet. Une belle affluence gonflée aussi des marins venus observer, des techniciens du Département impliqués dans ce vaste chantier que Jean-Louis Bouquet, présent lui aussi, a dirigé pour le compte de Vinci durant trois années. Et les anciens, venus sonder l’outil transmis à la relève.
Tout un symbole que résume Eric Guilbert. L’élu Saint-Pierrais et ancien marin a appris le métier de son père Robert, et l‘a transmis à Tony, son fils. « Je me souviens, dit-il, du jour où, avec Lionel Andrez, Franck Méteau et Michel Crochet, Dominique Bussereau nous a reçus à Saint-Georges-de-Didonne pour nous annoncer que le Département s’engageait sur le projet. On a bu le champagne au retour… » Les marins avaient remporté le gros lot !
Jeudi, le port jouait à guichets fermés. « L’effet waouh », celui que déclenche la nouveauté, plaisantait Nicolas Dubois, son directeur qui n’avait pas vu depuis longtemps une vente du jeudi après-midi aussi fréquentée. Côté production vingt-deux bateaux avaient inscrit leurs débarquements, les petites unités côtières, mais aussi trois chalutiers et leurs plus gros volumes. Là encore, un succès si l’on considère que la hausse du prix du gazole freine en ce moment l’élan du pêcheur à prendre le large. Bref, un total de 8,7 tonnes présentées au cadran.
Le matin, dans le frigo vidé de tout bac vert et gris (les couleurs du conditionnement local), le même Nicolas Dubois s’était laissé surprendre par un de ces coups de ressac émotionnel qui vous serrent la gorge. « En fait, je n’avais jamais vu ce frigo entièrement vide… », évoquait celui qui a pris ses fonctions le 1er octobre 1999, alors chargé de la mission développement du port. Un jour gravé dans sa mémoire : « Je m’étais présenté en costume cravate et mon prédécesseur m’avait dit “t’as deux minutes pour aller te changer”. »
Et ce prédécesseur, Yannick Morandeau, était aussi du lancement, jeudi. « Ça change ! », commentait-il, lapidaire, faisant le décompte de ses trente-six années passées à la direction de l’ancienne criée, et pointant l’année 1987 comme celle où la voix du crieur s’y était éteinte au bénéfice de l’informatisation de la vente, autre étape marquante.
Au tour des langoustines du « Pastenague » de défiler dans leurs bacs, suivies de bars mouchetés étiquetés « Stemar ». Derrière les pupitres, mareyeurs et poissonniers cliquent sur les boîtiers d’enchères, se disputent en silence les lots. Foro Marée, Nicolas Roy, Scachap, Negret poissonnerie, etc., leurs noms aussi s’affichent sur deux tableaux digitaux, en grand format, visibles de tous.
Le maire de Saint-Pierre-d’Oléron et vice-président du Département en charge des infrastructures portuaires ne rate rien du moment. « Du virtuel, nous passons au réel », se réjouit ainsi Christophe Sueur qui lui aussi tangue entre la nostalgie matinale et la joie de l’après-midi. « On change de dimension ! ». Or, à La Cotinière depuis ce 17 mars, ces mots ont une nouvelle échelle : un bassin de 4 hectares où la flottille va accoster petit à petit, et une halle à marée de 12 000 mètres carrés d’emprise au sol. À trente bacs près de merlu, les plus de 8 tonnes sont passées sous le cadran. Petit couac de rodage dans la dernière ligne droite : une chaîne a rompu, un programme informatique a surchauffé. Les trente bacs seront vendus vendredi.

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