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Mis en compétition, l’industriel vient de perdre un marché significatif, sur la maintenance de frégates de la Marine nationale. Un précédent lui avait déjà échappé en juin. Une alerte ?
C’est un pan du bagage historique d’une entreprise qui est égratigné. Et l’idée qu’elle se fait d’elle-même.
L’industriel de rang mondial Naval Group, ex-DCNS, plonge son histoire dans les arsenaux de Toulon et Brest. Mais un coin vient d’être enfoncé avec l’attribution par l’État d’un marché significatif à l’un de ses concurrents, les Chantiers de l’Atlantique.
Il s’agit du maintien en condition opérationnelle (MCO) de plusieurs frégates dont le port de base est Toulon. Ce qui inclue ingénierie, entretien, gestion des pièces de rechange…
“Naval Group, c’est le mainteneur officiel de la Marine depuis 400 ans, réagit à chaud Didier Quattropani, secrétaire général CGT arsenal de Toulon. Et depuis des décennies, on entretient les savoir-faire pour s’occuper spécifiquement des bâtiments de la Marine nationale.
Selon le syndicat, ce marché concerne directement 200 emplois, soit un peu moins de 10% du personnel de Naval Group dans l’aire toulonnaise (lire sa réaction ci-contre).
“Cela peut nous déstabiliser, par le risque de perte des savoir-faire. Et cela se rajoute au contrat perdu en juin, pointe le délégué syndical. La grosse crainte désormais est que le travail se fasse ailleurs que sur la base de Toulon.”
En juin 2022, Naval Group avait déjà cédé du terrain, dans son pré carré historique toulonnais, pour un contrat similaire sur des porte-hélicoptères amphibie (1). L’étendue de ce marché n’avait pas suscité l’inquiétude qui point désormais.
Avec sept frégates dans leur giron à compter de janvier 2023, jamais les Chantiers de l’Atlantique n’avaient élargi leur part de marché à ce point à Toulon. Naval Group est mis sous pression par cette compétition.
Cette fois, l’industriel a perdu l’entretien de deux frégates de défense anti-aérienne (FDA), bâtiments récents, modernes et dotés de systèmes d’armes sophistiqués. Un domaine dans lequel il avait globalement gardé la main.
Pourtant, l’ouverture à la concurrence avait déjà permis aux Chantiers de l’Atlantique de s’installer dans le maintien en condition opérationnel des frégates La Fayette, de moindre facture technologique, depuis 2017.
Avec ce dernier marché en date, la Marine réaffirme sa volonté de mise en compétition, même si aucun règlement ne l’y obligeait.
À ce jour, seuls semblent maintenus en dehors de ce périmètre, les bâtiments stratégiques les plus pointus, que sont le porte-avions Charles-de-Gaulle et les sous-marins – avec leur propulsion nucléaire. Leur maintien opérationnel incombe à Naval Group.
1. Obtenu par l’entreprise brestoise CNN.
Le mot est revenu à plusieurs reprises, pendant les débats devant le tribunal administratif de Toulon, “une audience hors norme”.
Le 11 octobre dernier, le juge des référés Philippe Harang a entendu la requête déposée par Naval Group, en contestation de l’attribution du marché public FRG23 à la société Chantiers de l’Atlantique.
“Nous ne sommes pas ici pour le plaisir d’un contentieux. Non, Naval Group n’est pas accroché à un monopole, a posé l’avocat de l’industriel. C’est la première fois qu’un recours est formé contre l’État. Mais nous sommes troublés par une mise en concurrence particulièrement inéquitable.
Dossiers confidentiels…
Les points soulevés passaient de “la diffusion de dossiers techniques confidentiels appartenant à Naval Group”, à “la dénaturation de l’offre”, au conflit d’intérêts “d’un employé du Service soutien de la flotte [Marine nationale] passé aux Chantiers de l’Atlantique”.
En défense, le ministère des Armées a posé son cadre: “Avoir remis sur un pied d’égalité des sociétés candidates, voilà ce qui nous est reproché. Sauf, à mettre Naval Group en situation de monopole, ou à privatiser le maintien en condition opérationnelle.”
… ou captivité du marché?
Dans son ordonnance notifiée ce lundi 17 octobre, le juge Philippe Harang a conclu que “la communication des pièces était essentielle pour garantir une stricte égalité entre les candidats”. De plus, “il ne ressort pas des pièces” que le sous-officier recruté par les Chantiers de l’Atlantique “ait été en mesure d’influencer la procédure”.
Enfin, sur l’appréciation qualitative de l’offre, “il n’appartient pas au juge précontractuel de se prononcer”.
L’avocat représentant les Chantiers de l’Atlantique avait tancé “une entreprise [Naval Group], qui crée la captivité du marché”. “Nous ne sommes pas une PME, nous ne faisons pas que des bateaux de croisière.”
La requête de Naval Group a été rejetée.
Naval group : “Maintenir les compétences des collaborateurs”
Dans une réponse écrite à nos questions, Naval Group “regrette la décision concernant le marché FRG23. L’impact de l’attribution du marché sur l’activité devra être analysé. Naval Group est aux côtés de ses collaborateurs, avec le souci de maintenir les compétences en matière de maintenance en condition opérationnelle (MCO) navale. Le groupe reste fortement engagé auprès de la Marine nationale pour garantir une disponibilité opérationnelle et une permanence à la mer des navires.”
Marine nationale : “Sept frégates pour huit ans, avec de la sous-traitance locale”
Dans une réponse écrite à nos questions, la Marine nationale indique que “le marché porte sur sept frégates toulonnaises pour une durée de huit ans : 2 frégates FDA et 5 FLF. Nous ne pouvons pas donner plus d’éléments. L’attribution de ce marché va conduire les industriels à se reconfigurer, comme c’est souvent le cas pour les renouvellements de marché. La sous-traitance locale sera, dans tous les cas, mise à contribution”.
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