Publié le 07/09/2022 à 10h00
Julien Pépinot
Par définition de passage, Pascal Jan ne cache pas pour autant sa volonté de voir “sur le long terme” en impulsant des stratégies ambitieuses pour le département. Le préfet de 54 ans, promu en avril pour la première fois à un tel poste, souhaite mettre l’accent sur le développement économique de l’Yonne. Très présent sur le terrain, mais assez silencieux en raison de la réserve électorale d’avant-présidentielle et législatives, l’ancien recteur de la Martinique prend la parole en cette rentrée pour faire le point sur les différents dossiers sur sa table.
Pourquoi ne pas être intervenu directement dans le conflit social opposant la Communauté d’agglomération de l’Auxerrois et les éboueurs grévistes ?
Ce n’est pas une prérogative du préfet. À partir du moment où la date du 5 septembre était fixée, l’idée était de respecter le cycle de négociations sans s’immiscer. Au conseil des maires, une décision très forte a été prise visant à certaines avancées. Il y a eu une réponse, on va voir comment elle est réceptionnée. Mais on reste extrêmement attentifs, par rapport à des règles d’hygiène publique voire de sécurité – je pense aux feux de poubelles. C’est comme cela qu’on arrive à ne pas impliquer inutilement l’État dans un dossier local. 
Avez-vous un regard sur le respect du droit ou de la sécurité, la collectivité ayant pris la décision de recourir à une entreprise privée en période de grève et les élus de ramasser eux-mêmes les poubelles ?
Le droit de grève n’a pas été remis en cause. Le préfet n’a pas à s’immiscer dans ce choix, cela relève de la responsabilité politique des élus. Je n’ai pas à commenter tel ou tel comportement.
À partir de quel moment l’État pourrait intervenir dans un tel dossier ?
En cas de mise en cause de la sécurité ou de l’hygiène publique. En l’occurrence, ce n’est pas le cas, il suffit de comparer la situation à celle de Marseille (concernée par des mouvements de grève récurrents des éboueurs, Ndlr.). Ou en cas de blocage, de voie sans issue, pour que la situation s’améliore, via une forme de conciliation.  
“Le dispositif pensé très en amont a permis à la rencontre de bien se dérouler dans le stade et à la sortie.”
Pascal Jan (Le préfet de l’Yonne, au sujet du match AJA – OM)
Quels enseignements tirez-vous des incidents en marge du match AJA – OM de samedi ?
Le saccage du bar a interpellé, je le condamne fermement. Il s’agit d’un évènement grave, marquant pour Auxerre. Mais cet évènement met aussi en lumière le reste : hormis cela, le dispositif pensé très en amont a permis à la rencontre de bien se dérouler dans le stade et à la sortie. On avait fait aussi en sorte qu’il n’y ait pas de débordements en ville. La séquence n’est pas parfaite, mais le dispositif a montré son efficacité. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y aura pas un retour sur expérience pour améliorer les choses.
Que répondez-vous au gérant qui dit que l’intervention des forces de l’ordre a pris trop de temps ?
Elles sont intervenues très rapidement. Elles ont réglé le problème en une quinzaine de minutes. Il y a eu une intervention mesurée. Techniquement, elles l’ont fait du côté des supporters marseillais et auxerrois pour essayer de les diviser et éviter que cela ne s’envenime. Après, on peut comprendre le gérant : dans ce genre de situation, on a le sentiment que ce n’est jamais assez rapide. Mais les supporters sont la cause première, on ne peut pas demander aux forces de l’ordre d’être à chaque coin de rue. 
La décision d’interdire le déplacement de supporters vous appartient ?
Oui, on l’a déjà fait en lien avec le ministère de l’Intérieur, même en Ligue 2 l’année dernière où plusieurs matches étaient à risque, dont celui contre Saint-Étienne. Mais il faut des faits objectifs, des informations du club en question, c’est un travail en commun. 
Pour l’eau potable, il y a l’enjeu des fuites : dans l’Yonne, c’est 30% que l’on perd
Quel état des lieux faites-vous de la sécheresse, alors que nous ne voyons toujours pas de précipitations venir ?
La situation reste assez préoccupante. Le premier arrêté remonte à la mi-mai, un mois plus tôt que l’année dernière. À partir des prévisions de Météo France, il s’agissait de prendre date. On s’adapte ensuite au fur et à mesure, un comité sécheresse se réunit chaque semaine. Il y a eu quatre demandes de dérogation d’usage d’eau d’entreprises, on en a accordé trois. Le dernier en date est pour le Supercross de Brienon. 
Quelles solutions apporter à cette problématique récurrente ?
Il faut s’interroger sur la gestion de l’eau de façon globale. Dès que je suis arrivé, j’ai considéré que la question était vitale. Il faut un schéma directeur pour les vingt années à venir. Pour l’eau potable, il y a l’enjeu des fuites : dans l’Yonne, c’est 30% que l’on perd, contre 20 au niveau national. Dans certaines communes, cela monte jusqu’à 60%. Il faut maîtriser cela, c’est la raison pour laquelle on accorde des dotations aux collectivités pour mettre en état leur réseau qui date parfois de 60 ans. 
Pourquoi la rivière Yonne semble peu impactée par le manque d’eau ?
Vos services effectuent davantage de contrôles ?
La Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) contrôle tous ceux qui bénéficient de dérogations, mais aussi les gros consommateurs et au-delà, il n’y a pas de limite. Ce contrôle a été renforcé. Il est efficace, les partenaires savent que l’État veille. 
Les bassins de rétention peuvent apporter une aide pour les agriculteurs, mais font débat. Quelle est votre position ?
Cela fait partie du bouquet de solutions. Ils sont aussi valables pour les viticulteurs, afin de lutter contre le gel. La récupération d’eau de pluie peut également être réalisée par les établissements publics, les collectivités, les citoyens… Dans les dotations attribuées, je serai très attentif à tout ce qui participe à cela.
Autre sujet qui fait débat, la place de la gestion des déchets dans le département.
L’Yonne a la capacité à créer une filière déchets au sens très large du terme, je pense aux déchets ménagers comme de haute technologie. Il ne faut pas les voir comme les poubelles de la région parisienne, mais plutôt comme un réservoir d’énergie qu’on peut en tirer. Tout en trouvant un équilibre, car on ne peut pas mettre des méthaniseurs ou des incinérateurs partout. J’ai lancé une démarche de consultations pour définir une stratégie sur l’ensemble du département.
L’Yonne fait-elle office de “poubelle” de l’Île-de-France ?
Quel état des lieux dressez-vous de l’impact inflationniste sur le tissu économique icaunais ?
Le soutien de l’État est là. En attendant la concrétisation des plans gouvernementaux, j’ai demandé aux élus et à mes services de réaliser un recensement de toutes les entreprises qui, de près ou de loin, pourraient être impactées. L’idée est d’anticiper pour être le plus réactif possible, de ne pas faire attendre une entreprise qui pourrait être éligible à une aide. Les grandes comme les petites qui pourraient passer sous le radar, l’Yonne étant justement surtout constituée de petites.
Toujours sur le plan économique, où en est le “Choc industriel” déclenché après l’annonce de la fermeture de Benteler à Migennes ?
La mission s’est prolongée jusqu’à fin juin avec des conclusions extrêmement positives en termes d’emplois et d’activités. Ce travail passe dans une seconde phase, de suivi. Huit entreprises ont reçu des fonds pour mener des études, quatre autres sont intéressées. Il y aura à terme le recrutement d’un chargé de mission, sous la responsabilité de la Région. En attendant, avec l’agence économique, on travaille à mettre en place des comités techniques pour suivre chacune des pistes identifiées. Ma préoccupation étant que le soufflé ne retombe pas. 
Un très fort potentiel de développement
Quelle est la situation sanitaire du point de vue du Covid-19 et de la variole du singe ?
Le Covid-19 reste une épidémie dangereuse, dont on surveille l’évolution chaque semaine. La situation est stable, ce qui ne veut pas dire qu’il ne peut pas se produire une dégradation. Concernant la variole du singe, il y a deux cas dans l’Yonne, pour 29 en région. L’ARS a ouvert deux centres dans le département, à Auxerre et Sens. On peut obtenir un rendez-vous en moins d’une semaine. C’est une maladie prise très au sérieux, même si on voit qu’elle a tendance à régresser. 
Quel regard portez-vous sur l’Yonne, après ces quatre mois en fonction ?
Je me déplace beaucoup, car je pense qu’il existe un besoin de la population de voir l’attention que l’État porte à leurs problèmes. J’ai d’ailleurs demandé aux sous-préfets d’investir encore plus le terrain. La confirmation, c’est que c’est un département avec un très fort potentiel de développement.
Julien Pépinot, avec Franck Morales
julien.pepinot@centrefrance.com


1 commentaire
Lucien Bonilla a posté le 07 septembre 2022 à 15h55
nous sommes toujours dans le flou pour les limitations de vitesses dans l’Yonne le manque de signalisations en les départements voisin et le notre
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