Le « Bugaled Breizh » a-t-il été croché par un sous-marin avant de sombrer ? Pour les familles des victimes, et notamment pour celles des deux marins dont les corps ont été retrouvés dans les eaux territoriales britanniques, en ce funeste 15 janvier 2004, il devrait s’agir du procès de la dernière chance.
Dès ce lundi, la dernière « Inquest » anglaise va ainsi voir se succéder 15 jours d’auditions de « témoins » à Truro, en Cornouailles, pour tenter de faire lumière sur ce drame aux circonstances toujours nébuleuses. Quelques années après le non-lieu prononcé par la justice française, l’affaire rebondit logiquement outre-Manche.
Mais voilà, depuis la décision irrévocable de la justice française, en 2016, la communauté maritime, les familles des victimes et leurs derniers soutiens indéfectibles, n’y croient plus… « D’autant qu’il semblerait que la justice britannique ne retienne que le rapport du Bureau Enquête Accident Mer français (BEA Mer) – qui dépend du ministère des Transports- comme principal dossier d’étude », explique Pascal Bodéré, journaliste spécialiste du dossier et coauteur, avec Yann Queffélec, de l’ouvrage « On l’appelait Bugaled Breizh » (éd. Archipel). « Ce rapport soutient l’hypothèse de la croche du chalut dans le sable »… Et rejette donc celle d’un accrochage avec un sous-marin – pourtant soutenue lors de l’instruction française.
Le 15 janvier 2004, le Bugaled Breizh (« Enfants de Bretagne » en breton), chalutier de Loctudy (Finistère) a mystérieusement sombré, en 37 secondes, au large du cap Lizard. Les cinq marins-pêcheurs professionnels à son bord, Yves Gloaguen, Georges Lemétayer, Pascal Le Floch, Patrick Gloaguen, Eric Guillamet, ne survivent pas au naufrage; trois corps seront retrouvés en zone française, et les deux autres en zone britannique. L’éventualité d’une collision avec un cargo philippin est d’abord évoquée : une fausse piste, qui s’est vérifiée après le renflouement du navire. Enfoncement symétrique des faces bâbord et tribord de la coque, implosion de la cale… Au vu de nombre d’éléments, les parties civiles pensent à une croche avec un sous-marin.
La Marine Nationale a fini par révéler qu’un exercice militaire européen, l’Aswex04, devait se tenir sur zone le 16 janvier, mais nie toute implication de ses bâtiments. « Il y a eu ensuite une nouvelle révélation, poursuit Pascal Bodéré. On apprend que la Royal Navy préparait aussi un exercice militaire le même jour, le Thursday War ». Le sous-marin anglais « HMS Turbulent », fait surface dans le dossier ; il serait rentré abîmé à son port d’attache de Devonport en Cornouailles le 16 janvier 2004. En 2008, le parquet de Quimper conclut à un « accident de pêche », mais est contredit par deux juges.
Un expert judiciaire de taille, le contre-amiral Dominique Salles, lui-même ex-commandant de sous-marins, soulève une autre éventualité, et n’en démord toujours pas. « Je le redis : il est hautement probable qu’un sous-marin soit à l’origine du naufrage du Bugaled Breizh et ce sous-marin ne peut qu’être un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) ». La chambre de l’instruction de Rennes ordonnera la poursuite de l’instruction la confiant à deux juges d’instruction de Nantes. L’expert mettra en cause un sous-marin américain.
« Au moment du naufrage, un sous-marin américain en mission d’observation autour d’un transport de déchets nucléaires vers le Japon était bien présent ! », rappellent Jacques Losay et Anne-Marie Forner, les beaux-parents de Thierry Le Métayer (le fils d’un des disparus), également administrateur et secrétaire de l’association SOS Bugaled Breizh. Eux, n’entrevoient pas non plus grand espoir en ce procès anglais. « À moins d’une révélation choc ou d’un coup de théâtre, on risque d’assister à une parodie de justice, qui sera vite expédiée ! Les témoignages seront même lus, sans présence physique des concernés… ».
Les familles, lasses, qui, selon le Télégramme, n’ont reçu leur convocation que mardi dernier (!), n’iront pas à Truro. Et Jacques Losay de conclure : « cette affaire nous montre une fois encore que nous ne vivons pas dans un Etat de droit ». Tous espèrent que la vérité judiciaire puisse un jour s’extraire des « limbes du secret-défense ».
Guide Shopping Le Parisien
Jeux Gratuits
Mots fléchés
Mots coupés
Mots croisés
Mots mêlés
Kakuro
Sudoku
Codes promo
Services
Profitez des avantages de l’offre numérique
© Le Parisien

source

Catégorisé: