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L’Éco austral : Les deux intercommunalités du Sud sont-elles appelées à toujours plus se rapprocher ?
Michel Fontaine
: Le Sud, comme vous le nommez, est en réalité un territoire à multiples facettes qui en font sa richesse. Son attractivité, économique, culturelle, environnementale, touristique, est le fruit d’une ambition commune des intercommunalités de promouvoir de grandes réalisations telles que l’aéroport de Pierrefonds, le CHU, l’Université, la gestion de l’eau, qui les inscrivent dans une région à fort potentiel. Ces succès ont conforté d’autres collectivités, au-delà du périmètre sudiste, à intégrer un projet technique ambitieux comme celui de Run’eva qui va transformer vertueusement la gestion des déchets pour les décennies à venir. 
Mais le Sud, c’est aussi la promotion d’une solidarité sans faille entre communes membres des deux EPCI (Établissements publics de coopération intercommunale – NDLR) comme nous l’avons démontré, de façon exemplaire, une nouvelle fois, très récemment, avec le cyclone Batsirai au cours duquel des aides et assistances mutuelles ont été apportées.
C’est cette ambition commune, cette philosophie et cette agilité qui donnent à notre territoire sa force et sa capacité d’action. Et quand je vois ce que nous avons réussi à entreprendre, je me pose la question de l’opportunité que pourrait représenter pour La Réunion la création de métropoles.

Le projet Run’eva illustre une volonté de rapprochement intercommunal. Qu’en attendez-vous, son calendrier n’est-il pas menacé par les difficultés actuelles de la CNIM ?
Trois EPCI ont su travailler depuis plus de quinze ans, au-delà des obédiences politiques, pour résoudre le problème majeur du traitement des déchets en territoire insulaire. Ce pari sur l’avenir a des répercussions environnementales, sanitaires et économiques, parce qu’il va permettre de sauvegarder la qualité des eaux et des sols, la production d’énergie issue de l’économie circulaire, et surtout de mettre en place des filières entières de retraitement et de revalorisation des déchets, créatrices de nouvelles valeurs ajoutées sur le territoire.
Les difficultés de la société CNIM sont connues et appréhendées, elles ne mettent pas en péril le projet, qui se poursuit. La mise en service industrielle est prévue pour le second semestre 2023. 

L’offre de foncier économique va-t-elle continuer à s’élargir, à des prix supportables pour les entreprises ?
Qu’il s’agisse de la ZAC Roland- Hoareau à Pierrefonds, de l’extension des zones industrielles à Saint-Pierre, à Petite-Île, à l’Étang-Salé et à Cilaos, et encore à Saint-Louis avec la livraison récente de la ZA à La Rivière, la politique en faveur de l’entrepreneuriat, du développement et de la création d’entreprises a montré son efficacité et conduit, en vingt ans, au dynamisme économique de la microrégion Sud. 
Ce travail, nous le poursuivons parce que nous portons l’idée que l’implantation d’entreprises permet aux Réunionnaises et aux Réunionnais de trouver un emploi pérenne, non délocalisable et garant de la dignité de chacun. Dans cette cohérence, nous gardons ce cap d’aménagement de  zones à vocation économique au coût le plus attractif possible, pour réduire la charge foncière des entreprises et optimiser leur investissement productif créateur de nouveaux emplois. 
Les futures extensions de la ZI 4, la création d’une ZI 5 à Saint-Pierre, l’extension de la ZAC Verger-Hemery à Petite-Île et la mise en oeuvre d’une politique de réserve foncière aussi dynamique que volontariste sur l’ensemble des communes de l’intercommunalité en feront la démonstration. Il est nécessaire de réfléchir différemment à l’aménagement du territoire et à l’offre immobilière aux entreprises pour franchir l’obstacle de la rareté foncière qui s’impose à tous à La Réunion. 

Quid de l’évolution de l’offre d’immobilier d’entreprise tertiaire, qui semble encore largement inférieure à la demande dans le Sud ?
Le Sud est attractif car le Sud s’est construit avec des chefs d’entreprise qui sont attachés à ce territoire. Les statistiques le démontrent clairement : plus de 80 % des entreprises sont installées depuis plus de dix ans dans le Sud. C’est dans cette stabilité et cette attractivité qu’il faut rechercher les motivations des investisseurs à s’établir ici. 
Leurs besoins, comme ceux de l’activité économique, évoluent, et nous devons aussi y répondre : qu’il s’agisse de locaux d’activité à proximité des micromarchés, non moins essentiels, d’espaces tertiaires livrés en blanc, d’espaces commerciaux spécialisés, d’outils logistiques structurants comme le port sec qui s’installera à Pierrefonds d’ici quelques mois, ou du développement et de l’implantation d’entreprises innovantes dans les secteurs des TIC, de la santé, de l’environnement, de l’agroalimentaire et de l’adaptation du bâti en milieu tropical. L’idée étant toujours à la fin de créer un maillage économique stable, structuré, permettant l’épanouissement personnel et professionnel des Réunionnaises et des Réunionnais. 
Nous devons créer les conditions pour que les investisseurs privés prennent toute leur place dans la réponse à apporter aux besoins de tous les maillons de l’activité économique. 

Le Sud n’est pas épargné par les difficultés grandissantes de déplacement, notamment entre Saint-Pierre et Saint-Louis. Quelles solutions avez-vous retenues pour les réduire, à moyen et long termes ?
Incontestablement, le nombre de véhicules en circulation évolue, le marché automobile se porte bien à La Réunion, ce qui doit nous réjouir sur un plan purement économique, mais nous interroger également sur la nécessité d’apporter des solutions autres pour se déplacer et enrayer la surcharge du réseau routier. 
En ce sens, la Civis développe depuis dix ans un grand projet de mobilité, de lignes rapides de transport en commun, opéré par Alternéo et dénommé « NEO ». Son objectif est de répondre à la congestion routière par la réalisation de voies de TCSP (Transports collectifs en site propre – NDLR), de pôles d’échanges et de parkings relais, ce qui, à terme, reliera d’est en ouest les communes de la Civis. Ces réalisations représentent d’ores et déjà un investissement de plus de 80 millions d’euros. 
Mais quels que soient les efforts consentis, la Civis ne pourra répondre à elle seule aux problématiques de déplacement. D’autres moyens alternatifs sont promus par notre collectivité comme le vélo à assistance électrique, qui connaît un vif succès, la réflexion sur l’organisation du travail, la dynamisation des centres urbains et du développement des « petites villes de demain ». 
Pour autant, et pour rester lucides dans une proche temporalité, il restera essentiel d’agir sur le réseau routier pour permettre rapidement de créer, avec l’ensemble des acteurs institutionnels, l’échangeur de la Croix du Sud permettant une nouvelle liaison Saint-Pierre-Le Tampon, et de créer la nouvelle entrée est de Saint-Pierre. Dans un même temps, il s´agira de sécuriser durablement la sortie de La Rivière Saint-Louis par la réalisation d’un nouvel ouvrage de franchissement de la rivière Saint-Étienne à l’ouest, et d’une déviation entre Saint-Louis et La Rivière Saint-Louis à l’est. 

Comment voyez-vous l’avenir de l’aéroport de Pierrefonds, après deux ans de paralysie presque totale due à la crise sanitaire ?
Si la question porte sur la nécessité d’un aéroport dans le Sud, la réponse est catégorique : oui ! Si on veut connaître les raisons d’une stagnation de l’activité, hors celle de la situation sanitaire qui a impacté tous les aéroports du monde, peut-être fautil rechercher dans des stratégies d’évitement mal raisonnées. 
Il faut ici rassurer les opérateurs locaux, il ne s’agit pas pour Pierrefonds d’être en concurrence avec Roland-Garros qui en temps normal accueille plus de deux millions de passagers quand l’équilibre de l’aéroport de Pierrefonds se situe à hauteur de 200 000 voyageurs. 
Vous me posiez la question de la congestion routière de l’ile. Le Sud est le grenier agricole de La Réunion, duquel nous pourrions exporter nos produits à forte valeur ajoutée, comme l’ananas Victoria, directement depuis Pierrefonds. Cela permettrait de décongestionner le réseau routier, en partie.

Comment comprendre qu’aucune liaison régionale pérenne et donc rentable ne soit opérée depuis Pierrefonds pour des destinations proches comme Madagascar, l’île Maurice, Mayotte, les Seychelles ?
Quand on cherche à développer un territoire, il faut avoir une vision d’ensemble, notre compagnie régionale doit être le principal allié de tous les Réunionnais. Pensez-vous une seule seconde que les investissements réalisés pour moderniser l’aéroport  de Pierrefonds auraient été consentis si l’activité de ce dernier ne s’avérait pas aussi utile que rentable ? Je crois fermement à l’avenir de l’aéroport de Pierrefonds, qui n’est conditionné qu’à notre intelligence et à notre courage collectifs. J’en appelle à la mobilisation de tous les acteurs pour définir une véritable stratégie pour les deux plateformes aéroportuaires de l’île. 
Qu’attendez-vous du projet Pierrefonds Village ?
L’idée de Pierrefonds Village est de pouvoir expérimenter à l’échelle d’un quartier cette idée de voir se créer, se construire et se vivre un nouveau parcours résidentiel réunionnais. Il s’agit de construire un quartier résilient face aux changements climatiques, qui prenne en compte dès le départ de son aménagement la nécessaire intégration, la préservation et le développement de la biodiversité réunionnaise. Il s’agit également d’en faire un quartier où le tissu associatif prenne toute sa place, et très spécifiquement sur le maintien du lien intergénérationnel entre nos ainés et nos jeunes. 

La Civis possède une importante façade maritime, ainsi qu’un port. Intégrez-vous l’économie bleue dans les projets de développement sudistes à long terme, de quelle manière ?
La Civis a été la première intercommunalité de La Réunion à être lauréate du label « France vue sur mer », nous nous en réjouissons car il récompense notre volonté de redonner l’accès au littoral à l’ensemble de la population, et lui permettre de se réapproprier celui-ci. À Saint-Pierre, par exemple, nous avons fait le choix d’élargir l’accès à la plage et à la mer par une stratégie d’acquisition immobilière, du foncier « pieds dans l’eau », et être ainsi la première commune à voir ses plages s’agrandir, se structurer et se stabiliser pour le plus grand plaisir de nos concitoyens. 
La mer, vous savez, c’est une grande passion pour moi comme pour de nombreux Réunionnais. L’économie bleue est une nécessité, parce que notre histoire y trouve sa source et aussi son avenir à long terme. Le siège des TAAF (Terres australes et antarctiques françaises – NDLR), établi à Saint-Pierre, sous-préfecture la plus australe de France, nous invite à avoir une vision d’ensemble afin que les richesses du plus grand espace économique maritime de la France bénéficient principalement aux territoires habités se situant dans sa zone d’influence. 

Une question plus saint-pierroise pour finir. Le centre-ville de Saint-Pierre a changé de visage en deux décennies. Cette mutation est-elle terminée, quels sont les projets qui restent à faire aboutir, où en est celui de la cité administrative ?
Le centre-ville de Saint-Pierre a considérablement évolué au cours des deux dernières décennies notamment en termes d’aménagement, de transport et de paysage. La rue des Bons-Enfants, axe principal et prioritaire du centre, au sol pavé et agrémentée de palmiers, nous rappelle le style colonial d’antan tout en lui donnant une identité propre et originale. 
Une voie spécifique dédiée aux bus a été créée depuis l’entrée Ouest de la ville jusqu’au marché couvert. Avec la réalisation de cet itinéraire, l’esplanade du marché couvert accueille désormais le marché aux fleurs et le pôle d’échanges. La ZAC du Mail, en centre-ville, vient seconder l’axe principal de la rue des Bons-Enfants. Dans la continuité du pôle d’échanges du marché couvert, l’avenue des Indes se veut moderne et attractive, un hôtel 3-étoiles et de grandes enseignes ont pu s’y implanter, de larges espaces piétons favorisent la promenade urbaine jusqu’à l’hôtel de police. 
Saint-Pierre accorde un soin particulier à son patrimoine. Nous avons ainsi participé à la sauvegarde des vestiges de l’école Saint-Charles, à la réhabilitation de l’ancien tribunal de première instance de Saint-Pierre, qui a vu en 1910 se dérouler le procès du plus célèbre criminel de l’histoire judiciaire de l’île, Sitarane. Depuis sa restauration, la médiathèque Raphaël-Barquissau présente aujourd’hui sa magnifique façade sud orientée sur la mer… Plus récemment, la Ville a également entrepris de restaurer la toiture en bardeaux bois et les façades d’époque de la mairie. 
L’attractivité du centre-ville a été confortée dans le projet d’aménagement et de développement durable, préalable à l’approbation du nouveau PLU (Plan local d’urbanisme – NDLR) de Saint-Pierre qui offrira d’autres perspectives et possibilités en faveur du coeur de ville. 
Bien d’autres aménagements, qu’il serait trop long de développer ici, ont été réalisés, mais cette mutation est loin d’être terminée. Le centre-ville va connaître un nouvel essor avec le projet phare de la mandature : la cité administrative, pensée dans un cadre paysagé, va transformer le centre.
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L’Éco austral : Les deux intercommunalités du Sud sont-elles appelées à toujours plus se rapprocher ? Michel Fontaine : Le Sud, comme vous le nommez, est en réalité un territoire à multiples facettes qui en font sa richesse. Son attractivité, économique, culturelle, environnementale, touristique, est le fruit d’une ambition commune des intercommunalités de promouvoir de g…

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