l’essentiel Les agriculteurs de la FDSEA ont fait un premier point d’après récoltes d’été. Entre sécheresse et déficit hydrique, le constat est accablant.
De mémoire d’agriculteurs en Lauragais, c’est du jamais vu. Quand on parle sécheresse, ici, l’année de référence c’est 1 976… Celle qui est restée dans toutes les mémoires. Jusqu’à cette année 2022 dont on sait déjà qu’elle a battu tous les records, celui de 1976 y compris. "Le déficit hydrique est de 100 mm de plus que cette année-là", alerte Jean-Pierre Alaux, président de la FDSEA, qui pointe un déficit de 450 mm sur le printemps, de février à début juillet. "Hormis les températures extrêmes, au niveau pluviométrique, juillet et août restent des mois normaux", abonde Loïc Doussat, chef de service à la chambre d’agriculture. "Il manque entre 40 et 60 mm d’eau par mois,", relève David Vincent qui, depuis 25 ans qu’il est agriculteur, effectue des relevés quotidiens. Le constat est là, accablant, chiffres à l’appui. Et s’il n’y avait que cela… "Au-delà du déficit, il y a le problème de la fécondation avec les coups de chaleur. De 25° le matin à 40 l’après-midi, les fleurs ont grillé", constate Jean-François Gleizes, agriculteur retraité.
"Avec de telles sécheresse et canicule, moins de 10 % des exploitations vont arriver à tirer un revenu. C’est très grave. "On est sur un triste record pour tout ce qui est cultures. L’élevage ? Du fourrage, il peut y en avoir, le problème c’est le coût puisque depuis juin, les troupeaux doivent être alimentés dans les champs qui sont comme des paillassons", poursuit Jean-Pierre Alaux, qui s’inquiète : "Sans soutien, je ne vois pas comment, dans l’Ouest audois, les gens vont repartir pour 2023. Un agriculteur sur deux qui voudrait continuer d’exploiter, aujourd’hui, n’est pas pourvu en intrants. Certains ont fait de si petites récoltes qu’ils ont espéré que l’azote qui était à 840 € en juillet finirait par baisser. Cela n’a pas été le cas et l’on a, à présent, des exploitants sans semence et avec cette problématique d’intrants".
Le compte a été fait par la profession : il faut aujourd’hui 1 000 € l’hectare pour implanter du blé dur, pour les seuls intrants. "Et on ne parle pas du carburant… On comprend les réticences qu’ont certains agriculteurs à repartir ou qui réfléchissement à modifier leur assolement", estime le syndicat agricole. Des rendez-vous vont avoir lieu avec l’administration et la profession compte bien faire valoir la situation actuelle pour obtenir un report de la taxe foncière non bâti. Pour commencer…
"Il faut absolument envoyer un signal fort pour inciter les gens à resemer", estime Jérôme Barthès. "Et donner des perspectives, des grandes orientations pour chaque filière", exhorte Sophie Maniago, responsable élevage, qui réclame "un plan national de résilience pour l’agriculture. On a une conjoncture géopolitique difficile, une climatologie qui l’est tout autant, des gouvernements qui changent à tout-va avec, sur un mandat, trois ou quatre ministres de l’Agriculture. Il faut donner de la stabilité à ce métier". "En blé dur, il n’y a plus eu de cours pendant trois mois, le tournesol a perdu 100 € dans une semaine. Finalement, si on veut limiter les risques, il ne faut pas produire, c’est quelque chose que je n’ai jamais connu", relate, avec effarement, M. Gleyzes.
""L’agriculture audoise a besoin d’être aidée. Certains exploitants étaient dans le rouge. On le voit, il y a de la déprise, des parcelles qui ne sont plus travaillées. Il faut que le directeur de la DDTM (NDLR : Direction départementale des territoires et de la mer) comprenne que ça suffit. Pour l’instant, nous le constatons, la DDTM dépend du ministère de l’Intérieur ou de l’Ecologie, pas de celui de l’Agriculture. C’est inacceptable", estime Didier Jeannet, vice-président.
"Si on regarde ce que nous avons vécu les cinq dernières années, nous avons des gens qui ont déjà des reports à assumer", s’inquiète Jean-François Gleizes. "Fin 2020, Cer France avait dressé un bilan de l’activité grandes cultures dans l’Aude, et l’on sait que 80 % des exploitations ont fini en négatif, 50 % l’étaient depuis cinq ans. Statu quo en 2021, où l’on n’a ni amélioré ni aggravé une situation historique. Malgré tout, avec l’antériorité des dettes, la campagne de mise en culture 2021-2022 a été compliquée pour un certain nombre d’exploitations. Au vu de la flambée des cours de la matière première, il y a eu un soutien de la banque pour inciter la production, par ailleurs encouragé par l’Etat. On s’en réjouit mais, quand on voit le bilan de la campagne, ces exploitations ont été surendettées", indique Loïc Doussat, avant de souligner que "chez 99 % des agriculteurs rencontrés on parle désormais de non-production, de non-culture" .
"Il faut un plan structurel"
On revient sur l’année historique de 1976. "À l’époque, on n’avait qu’un seul interlocuteur, c’était la CAL (Coopérative agricole lauragaise) , témoigne Bernard Martin, agriculteur retraité, qui estime que "le report d’impôt foncier qu’il faut obtenir n’est pas fondamental dans une exploitation. Aujourd’hui, le Lauragais est en situation de faillite, toutes productions confondues. Il faut présenter au préfet cette situation de faillite depuis au moins 2 020, aggravée par différentes crises et les incertitudes en 2 023. Il faut aujourd’hui un plan structurel, un plan de charge pour prendre en compte la situation d’endettement du Lauragais, la faire financer sur 10, 20 ans ou en fin de carrière. C’est à Bercy, au plus haut niveau, de prendre en charge cette dette". "Il faut déposer des dossiers de cessation d’activité… C’est le point de départ de toute démarche", propose D. Vincent. "On a fait une étude sur l’évolution d’une ferme théorique en Lauragais entre l’avant réforme de la PAC de 2014 à aujourd’hui. Elle a perdu sur cette période un tiers de son chiffre d’affaires", précise M. Doussat. "On avait des primes PAC qui incitaient à la production sans la pression environnementale comme les bandes enherbées. La ferme a perdu de la surface de production. En 10 ans, la grande culture a perdu un quart de ses surfaces".
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A ce jour j'ai tendance à croire ces propos, mais le problème avec les agriculteurs (terme générique) est qu'ils se plaignent en permanence c'est un réflexe, il n'y a aucune autre corporation du privé qui agit comme ça et on entend moins quelqu'un qui crie en permanence, on s'habitue .

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