Publié le 20/03/2017
Les Justin, l’histoire du choix des mets
«Je crois que je suis prêt ». Après une quinzaine d’années passée à œuvrer en usine comme tourneur, William Justin sent revenir l’inéluctable. Il a beau avoir apprécié cette vie, elle reste malgré tout une parenthèse. C’était en 2006. Christelle et lui se rencontrent en Champagne-Ardenne (Grand Est) d’où ils sont originaires. À cette époque-là, tous les deux se destinent à une nouvelle aventure. Lui n’est plus tourneur donc, pendant qu’elle, tourne le dos à une vie de banque et d’assurance. « Cela nous a aidés à redémarrer ».
Leur reconversion respective converge alors vers l’idée que William caresse depuis toujours : la cuisine. « Tu as toujours aimé ça », sourit son épouse. « J’ai toujours eu le nez dans les gamelles, se marre l’intéressé. À dix ans, je salissais déjà la cuisine de ma grand-mère ». Finalement, le voir derrière les fourneaux à 47 ans n’a rien d’une surprise. Un juste retour des choses pour celui qui se définit comme un « autodidacte ». « Chez toi, la cuisine est innée », abonde Christelle.
Si enfiler la toque était une évidence pour William Justin, voir débarquer le couple reimois au fond du plateau de Millevaches, à Tarnac, en 2008, était une grosse cote pour quiconque aurait parié que de jeunes repreneurs prendraient un jour la relève de la famille Deschamps, au restaurant des Voyageurs. Le couple était prêt à s’implanter n’importe où pour « repartir de zéro ». Qu’importe le flacon, pourvu qu’il ait assez de pièces d’allure pour qu’ils puissent le façonner à leur manière. Une trentaine de visites plus tard, les voilà décidés à investir leurs économies en Corrèze.
Huit ans plus tard, Christelle et William Justin savourent. Et regardent leur chemin avec une pointe de soulagement. Certains se sont étonnés de leur choix de migrer vers une terre parfois hostile l’hiver et où la confiance n’a rien d’une évidence. « C’est dur de s’installer et de s’intégrer en milieu rural, concède William Justin. On se demande encore si, aujourd’hui, on l’est totalement ».
Aussi méconnu avant 2008 que filmé et commenté en continu cette même année et les suivantes, le village de Tarnac ne les a pas effrayés. Malgré l’inconnu à cette époque. Le cœur a ses raisons et le couple ignore pourquoi le leur a ressenti un coup pour cette bourgade. Désormais, ils peaufinent leur établissement à leur image. « Nous sommes fusionnels et complémentaires », dépeint Christelle. Alors à l’étage, l’hôtel a repris quelques couleurs plus modernes. L’institution, plus que centenaire, retrouve une énième jeunesse. Comme la carte, transformée progressivement par le chef. « On a mis de l’audace, arrêté le menu du jour pour un menu Liberté afin que les clients le composent eux-mêmes, justifie le chef, membre des Toques blanches du Limousin. On voulait faire autre chose que nos confrères, il manquait une cuisine plutôt gastronomique sur le plateau ». Retravailler la cuisine traditionnelle, voilà comment le couple résumerait la patte de William Justin, distingué en 2015 par un prix couronnant son burger revisité à la sauce corrézienne.
Mais, le patron du restaurant des Voyageurs n’entend pas bâtir sa renommée sur cette image du burger qui lui a certes permis de rajeunir sa clientèle. Cette table de Tarnac, vantée par le Gault et Millau, est sans cesse en mouvement. « Le principe de ce métier est de faire découvrir des saveurs qu’il n’y a pas à la maison, quelque chose qui se détache », illustre le chef. Comme ce duo de ris de veau et foie gras poêlé, déglacé au vinaigre balsamique et myrtille du plateau, sa recette signature.
Pour rien au monde les Justin tourneraient le dos à cette vie aux airs de renaissance sur la terre des mille sources. « Ici, c’est le calme et la plénitude », résume Christelle. Une quiétude qu’ils aiment rompre, l’espace de quelques jours, au détour d’une escapade américaine. Avant de retrouver l’endroit où ils exercent ce « beau métier » qui consiste à « donner du plaisir aux gens ». Il se murmure même que certains plats provoquent des jouissances culinaires insoupçonnéesæ
Projection débat. Dans le cadre de la saison Nourriture(s) du pôle culturel Clau del Pais, William Justin prendra la parole ce soir, au Carnot, à Ussel, après le film Entre les bras, la cuisine en héritage , à 20 h 30.
Malik Kebour

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