Arrivé l'été dernier à Argelès, main tendue devant une boulangerie de la ville depuis trois mois, Antoine a vu sa vie basculer dans le bonheur. En une semaine, grâce au formidable élan de générosité qui s'est organisé autour de lui, le jeune sans abri a trouvé un toit et un emploi.
Fier comme Artaban avec son couteau à enduire à la main, au travail sur un chantier de construction de logements à Peyrestortes, Antoine Langlest prépare un mur qu'il peindra plus tard avec l'aide de ses nouveaux collègues. "Je suis motivé à fond ; je ne connais pas trop le métier mais j'apprends vite, c'est génial" se régale le jeune homme, métamorphosé. La semaine dernière encore, Antoine, âgé de 28 ans, vivait dans la rue à Argelès.
"La rue, c'est la jungle ; sans un mental d'acier on y meurt", frémit-il, apparemment déterminé à oublier cette galère qui l'a englouti depuis l'adolescence. Né en Russie, élevé en région parisienne par une famille d'adoption, il dit être "parti en vrille vers l'âge de 15 ans. J'ai fait des fugues, mes parents n'ont pas aimé ; je me suis retrouvé dehors", résume-t-il, désireux de balayer à tout jamais ce passé douloureux. Il en oublie presque un diplôme de préparateur d'usine, une formation de maréchal-ferrant, son haut niveau en équitation. Et une kyrielle de petits boulots sans avenir mais vaillamment enchaînés. Le dernier en date s'est terminé par un licenciement : Antoine était chauffeur livreur dans une entreprise de Chartres, qui a mis la clé sous la porte "à cause du confinement". Il a alors sauté dans un train pour descendre dans le Sud "parce que la misère est plus douce au soleil", sourit-il en paraphrasant Aznavour.
Arrivé en août à Argelès, Antoine erre dans la ville avant de croiser un pote de galère qui lui montre "les meilleurs endroits pour mendier". Il choisit le trottoir d'une boulangerie et s'y poste dès lors tous les matins pour faire la manche avec sa chienne Laïka : un dogue argentin croisé malinois de 3 mois. Ici, c'est son coin à lui. C'est là qu'un commerçant local le rencontre le 21 novembre dernier. "J'ai tout de suite vu que la rue n'était pas sa place", assure Jean-Charles Marinho qui, en regardant Antoine de plus près, reconnaît en lui un ancien client de l'époque où il tenait un magasin à Chartres. Les deux hommes se retrouvent et discutent longuement.
Ému par l'histoire, l'Argelésien lance aussitôt un appel à l'aide sur sa page Facebook. En quelques heures, un élan du cœur exceptionnel résonne en écho au SOS du bon samaritain. Une incroyable générosité teintée d'une solidarité sans faille s'organise autour du jeune homme. Des dizaines de personnes se mobilisent, "les gens offrent des vêtements, des plats chauds, des couvertures, les dons s'accumulent", remercie le commerçant, épaulé sur le terrain par trois autres bonnes âmes. Antoine sent alors sa vie basculer. "Des personnes ont commencé à s'arrêter, pas seulement pour la pièce et pour se donner bonne conscience, mais pour me parler", réalise le sans-abri. Il reprend espoir au fil de ces sept jours qui vont lui rendre sa dignité. Un toit et un travail à l'appui.
Vendredi, le propriétaire d'un studio inoccupé dans la station lui ouvre grand les portes de son meublé. Dans la foulée, un chef d'entreprise en peinture de Banyuls-dels-Aspres téléphone à Jean-Charles Marinho pour une proposition d'embauche. "Je suis en plein recrutement et Antoine doit redémarrer dans la vie ; je lui donne sa chance", tente Tahar Harouche qui l'engage, lundi, en CDD de 35 heures à 1550 euros par mois, pour débuter. Trois jours plus tard, l'apprenti nage en plein bonheur. "On me confie des responsabilités, j'ai la niaque, je n'ai plus honte de moi, j'existe ", renaît Antoine, heureux. Pendant ce temps, son ange gardien s'affaire déjà à sortir un autre déshérité de la rue. Un prénommé Robert, âgé de 38 ans…
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Allez Antoine, bravo ! Tu tiens le bon bout !
Belle histoire, "c'est une romance d'aujourd'hui" dans le sud…
La nausée quand je vois tous ces jeunes à la rue, contrairement à ce que disent et pensent beaucoup de gens ce n'est pas par choix mais par accident de la vie. Si seulement les assos aidaient davantage mais c'est moins facile de trouver de vrais logements, de vrais emplois que de dresser des tentes dans les centres de villes pour des sans papiers illégaux…à bon entendeur…
Parfaitement d'accord avec vous ! Il est plus facile d'appeler les médias pour montrer la misère mais c'est plus difficile de la combattre réellement.