« Sans lactose, sans gluten et sans fruits à coque ? Pour 120 personnes ? D’accord. » Une main sur le robot pâtissier, rose comme à peu près tout ce qui se trouve dans le laboratoire, une autre tenant le téléphone, Valérie Gallet jongle avec les commandes, en se faisant un devoir de les honorer toutes, y compris les plus délicates.
« De plus en plus de clients me demandent des gâteaux sans gluten, sans lactose, etc. C’est à moi de m’adapter. Ce n’est pas facile mais je commence à avoir quelques recettes types. » Il en faudrait plus pour interrompre la machine à idées que la jeune femme a dans la tête. Elle tourne jour et nuit. « Même quand je vais voir des amis restaurateurs, il faut que j’aille en cuisine, c’est plus fort que moi, j’adore ça ! Même quand je suis fatiguée, j’imagine des recettes. La pâtisserie, c’est ma vie. »
La messagerie de la Maison Gallet, au Château-d’Oléron, est souvent pleine. Installée dans cette ancienne salle de sport, reconvertie en pâtisserie, la gérante reçoit tous les jours des témoignages confirmant qu’elle a fait le bon choix en embrassant une nouvelle carrière professionnelle, il y a quatre ans. Originaire de la Lozère, Valérie Gallet se dédiait au fromage avant de se consacrer corps et âme au dessert. Pendant vingt-cinq ans, à la belle saison, ses parents ont fait le trajet de l’ex-Languedoc-Roussillon jusqu’à la Charente-Maritime pour vendre leurs fromages à la Cotinière (Saint-Pierre-d’Oléron), avant de décider de s’y installer. Leur fille a très vite trouvé sa place derrière l’étal, partageant son temps entre Oléron et le marché de la Pallice, à La Rochelle.
« Un jour, ma fille Chloé m’a dit que le plus beau cadeau que je pourrais lui faire serait un gâteau sur le thème de la « Reine des neiges ». Sauf que je ne savais même pas faire un flan ! Je m’y suis mise, ce n’était pas trop mal. C’est devenu une habitude à chaque anniversaire. »
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L’amusement devient passion, voire obsession. Consciente de ses lacunes, la fromagère reprend les études. Après un an de réflexion, travaillant le jour au marché, potassant la nuit les livres de recettes, elle s’inscrit en 2018, en candidate libre, au certificat d’aptitude professionnelle de pâtisserie, qu’elle passe avec succès aux CFA de Jonzac et La Rochelle, avec 17 de moyenne, « malgré une pression terrible ». Elle a déjà prouvé certaines prédispositions en remportant, en 2017, un concours de cake design (l’art de décorer une pâtisserie) au salon Sugar Paris, dans la catégorie maroquinerie. Sa pièce montée de 80 cm sur 60, représentant 137 heures de travail, a fait sensation.
Valérie Gallet a su conjuguer ses deux passions : la pâtisserie et les sacs à main en cuir d’une grande marque française, célèbre par ses seules initiales. Laquelle, devant l’originalité et le réalisme de ses créations, lui a ouvert ses portes et l’a intégrée dans sa communication. Un nouveau filon. « Je suis sur un autre projet avec mon frère, qui travaille dans la publicité à Paris. Il collaborait avec une marque américaine de rouge à lèvres quand je lui ai dit que j’avais créé un gâteau en forme de lèvres pour la Saint-Valentin. Ses partenaires ont adoré. »
Ils ne sont pas les seuls, à en croire le grand nombre de commandes que reçoit la Maison Gallet en début de semaine. Gâteau d’anniversaire, mariage, baptême, Noël, Pâques… « En fait, j’ai du travail toute l’année. » Elle ne s’en plaint pas, au contraire. Ses clients non plus, qui apprécient le style Valérie Gallet : une décoration inventive et soignée, avec une touche « girly » revendiquée, des goûts marqués en même temps qu’une légèreté très moderne, à l’image d’une de ses créations les plus demandées : « Inspiration », une mousse de vanille sans sucre, un streusel à la noix du Brésil avec un caramel à la fleur de sel et un glaçage de chocolat Dulcey. La vanille est son produit phare. « J’en suis à mon sixième kilo en deux ans. »
Le destin de Valérie Gallet serait aussi rose que son laboratoire si celui-ci était un peu plus spacieux. « Je commence à manquer de place pour pouvoir travailler comme je veux. J’ai un four de deux mètres de haut que beaucoup rêvent d’avoir, dont je ne peux même pas me servir. Ça fait deux ans que je cherche un local. Mon rêve serait d’avoir une pâtisserie salon de thé, où les clients pourraient venir déguster une pâtisserie à l’assiette, avec une vue sur le laboratoire et les créations en cours. »
La Maison Gallet pourrait être amenée à quitter Oléron dans un avenir proche, pour rejoindre le continent. Pas forcément en Charente-Maritime. Elle ne cache pas un coup de cœur pour Marseille. « D’un autre côté, j’aime ce département, j’aime mes clients. Je réfléchis encore. »

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