Hautes palissades métalliques et ballet de grues dans le ciel d’Euratlantique. Fut un temps pas si lointain où, rive gauche, la concession BMW-Mini signalait aux automobilistes l’entrée dans Bordeaux. Celle-ci a déménagé à Lormont début 2020 pour laisser place à une nouvelle opération immobilière d’envergure, au coin de la zone d’aménagement concertée (ZAC) Saint-Jean-Belcier. En chantier depuis mai, ce nouveau quartier baptisé Quai neuf verra s’élever 13 immeubles, dont trois tours de 17 étages.
Les chiffres, d’abord : 770 logements, dont 140 dans une résidence étudiante, y seront construits, répartis entre accession libre (45 %), maîtrisée (20 %, sous condition de ressources) et sociale (35 %). S’y ajoute un immeuble de bureaux (6 800 m² « pour 680 salariés »), vingt cellules commerciales aménagées aux rez-de-chaussée, quelque 2 000 m² de locaux vélo, un effort mis en avant, mais aussi 765 places de stationnement auto en sous-sol. Coût de l’opération : 100 millions d’euros supportés par deux promoteurs, Bouygues Immobilier et Sogeprom, filiale de la Société Générale.
Quelle cohérence architecturale donner à une entrée de ville, a fortiori au débouché futur du pont Simone-Veil, qui sera livré fin 2024 ? « On retrouve les codes de l’architecture bordelaise, les teintes de la pierre blonde, des ouvertures plus hautes que larges », dit Stéphane Sermadiras, directeur régional de Sogeprom. « Il y a beaucoup d’enjeux, de paramètres, et beaucoup de choses se sont passées ou se passent depuis les premières études », poursuit Gonzague Douniau, directeur général Sud-Ouest chez Bouygues Immobilier. « Le confinement, le changement de municipalité qui a aussi son mot à dire, la conjoncture économique difficile… »
Et si l’ensemble n’était pas éligible au label Bâtiment frugal bordelais voulu par la municipalité écologiste, « il embarque beaucoup de paramètres qui y ressemblent ». Maire adjoint du quartier Bordeaux-Sud, Olivier Cazaux juge d’ailleurs le « programme équilibré », à défaut d’afficher la certification bordelaise.
Encore des immeubles, toujours des immeubles, pourra-t-on soupirer. Et pourtant, l’ensemble Quai neuf se veut exemplaire en matière d’artificialisation des sols. Mieux, de lutte contre l’étalement urbain. Comment est-ce possible ? « On construit la ville sur la ville », présente Stéphane Sermadiras. Les 2,3 hectares ici investis n’étaient autres qu’une « grande nappe de bitume » autour de la concession automobile, dûment démolie et déblayée. Près d’un tiers de la surface – 6 500 m² – sera réaménagé en « terre pleine », maître mot des programmes immobiliers réévalués à l’aune du réchauffement climatique et des étés caniculaires. Entre la coulée du jardin de l’Ars, les patios et les terrasses végétalisées au sommet d’immeubles, énumère Audrey Sax, en charge du projet chez Bouygues Immobilier, « 70 % » des espaces sont végétalisés.
Le contexte économique, sur fond de flambée des matériaux, n’aura échappé à personne. « Nous portons une responsabilité collective de la bonne réalisation de notre projet. […] Nous avons traversé, nous traversons des vents violents, l’État et la Ville attendent que nous arrivions à bon port », prévient l’architecte Paul Laigle, à la tribune de la cérémonie officielle de lancement des travaux, jeudi 10 novembre, évoquant « la crise des matières premières ».
« Nous sommes comptables et redevables de la qualité de nos produits, il va falloir qu’on soit agile », abonde Valérie Lasek, directrice générale de l’Établissement public d’aménagement (EPA) Bordeaux Euratlantique. Une ambition réaffirmée, et « on ne bouge pas les prix », rappelle Gonzague Douniau, de Bouygues Immobilier. La quadrature du cercle ? « On se creuse les méninges, on est dans une phase d’appel d’offres, les entreprises proposent des variantes, des manières de faire différentes. » Au final, « on rogne sur les marges », dit-il sans détour.

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