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Fort d'avoir obtenu, deux fois de suite, une hausse "historique" du budget de la Justice, Eric Dupond-Moretti demeure au gouvernement malgré un bilan plombé par une grogne sans précédent des magistrats à son encontre et une mise en examen pour "prise illégale d'intérêts", une première pour un ministre en exercice.
Le ministre de la Justice, une des personnalités les plus clivantes et les plus en vue du gouvernement sortant, n’avait pas caché son souhait de rester Place Vendôme à l’issue de l’élection présidentielle, s’investissant à fond dans la campagne d’Emmanuel Macron.
Son maintien au ministère semblait compromis depuis que le ministère public a requis son renvoi devant la Cour de justice de la République (CJR).
Ex-ténor du barreau, avocat pénaliste pendant 36 ans, Eric Dupond-Moretti, 61 ans, n’a eu de cesse de défendre son bilan, mettant en avant les hausses “historiques” qu’il a obtenues pour le ministère de la Justice, soit 8% d’augmentation en 2021 et 2022.
“J’ai réparé l’urgence”, a-t-il aimé répéter, en assurant qu’avec lui “la justice va plus vite, travaille mieux et est plus proche des Français”.
Ainsi, il ne manquait pas une occasion de souligner son bilan en matière de “justice de proximité” pour lutter contre “la petite délinquance et les incivilités du quotidien” ou sa loi “confiance” dans la justice prévoyant notamment de pouvoir filmer les audiences.
Mais ce bilan pèse peu face à la grogne sans précédent, voire parfois la détresse, des magistrats confrontés, selon le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, à des “conditions de travail intenables”.
Dès la nomination d’Eric Dupond-Moretti comme garde des Sceaux, en juillet 2020, l’Union syndicale des magistrats (USM), syndicat majoritaire chez les magistrats, s’était indignée de ce choix. “Nommer une personnalité aussi clivante et qui méprise à ce point les magistrats, c’est une déclaration de guerre à la magistrature”, affirmait alors Céline Parisot, la présidente de l’USM.
On ne peut pas parler avec quelqu’un comme ça, donc on a arrêté de lui parler”, dit Céline Parisot. Et son action de ministre ? “Beaucoup de com’. Il a surtout terminé pas mal de choses qu’avaient commencées (sa prédécesseure) Nicole Belloubet”, tacle-t-elle.
Signe du malaise : les deux tiers des 9.000 magistrats français ont signé une tribune, publiée en novembre dernier par le Monde, décrivant l’épuisement et la perte de sens de ceux qui rendent la justice au quotidien.
Cette défiance a atteint son acmé avec la mise en examen pour prise illégale d’intérêts du garde des Sceaux par la Cour de Justice de la République (CJR).
Eric Dupond-Moretti est soupçonné d’avoir profité de sa fonction de garde des Sceaux pour régler ses comptes avec des magistrats avec lesquels il avait eu maille à partir quand il était avocat, ce que le ministre réfute.
Les magistrats instructeurs de la CJR ont clos leurs investigations à la mi-avril et, le 10 mai,  François Molins, qui représente le ministère public devant la CJR, a annoncé dans un communiqué avoir requis la veille un procès pour le ministre, jugeant qu’il existait des “charges suffisantes” à son encontre.
Avocat médiatique, habitué des plateaux télé et même des planches de théâtre où il avait commencé à jouer en 2019, Eric Dupond-Moretti a notamment défendu Patrick Balkany, Jérôme Cahuzac, Abdelkader Merah, Yvan Colonna et la boulangère d’Outreau – l’affaire de viols devenue scandale qui l’a fait connaître.
Avec sa “grande gueule”, sa carrure et sa voix intimidantes, il a impressionné, rudoyé et fait trembler les cours d’assises de toute la France. Ses plus de 140 acquittements arrachés lui avaient fait gagner un surnom: “Acquittator”.
“L’ogre du Nord”, de “sang-mêlé” dit-il, est né à Maubeuge (Nord) d’un père métallurgiste décédé lorsqu’il avait quatre ans et d’une mère immigrée italienne et femme de ménage. 
Père de deux enfants, en couple avec la chanteuse québécoise Isabelle Boulay et maître d’un teckel à poil dur prénommé Jean-Claude, ce gros fumeur et fan de Georges Brassens – un vieux vinyle trône dans son bureau – était plutôt classé à gauche avant son entrée au gouvernement.
Il a la réputation d’être bougon, râleur. “Il l’est”, confirme son ami l’avocat Edouard Martial. Mais il est aussi “extrêmement chaleureux et très fidèle en amitié”, dit-il – à ses proches, “il ouvrira sa porte à n’importe quelle heure de la nuit”. 
Loin du gouvernement, Eric Dupond-Moretti a-t-il un avenir en politique ? Sa première candidature à une élection, aux régionales de juin 2021, où il voulait “chasser” le Rassemblement national des Hauts-de-France, s’est soldée par une sévère défaite avec l’élimination dès le premier tour de la liste de La République en Marche.
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