Le site de stockage de l’Otan demeure très discret malgré un classement en risque Seveso seuil haut.
Six grosses cuves et une plus petite semi-enfouies dans le sable du cordon littoral. à 5 km du Grau-du-Roi, entre pinèdes et étangs. En pleine zone humide. C’est ainsi que se présente, vu du ciel, le très discret dépôt de l’Otan à l’Espiguette. Un dépôt qui a été mis en service il y a près de soixante ans, en 1962.
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Depuis 2016, il fait l’objet de deux contentieux engagés par l’association Cape (Comité d’alerte pour l’Espiguette). Deux procédures qui visent à demander l’annulation, d’une part de l’autorisation obtenue en avril 2016 d’exploiter le site, et d’autre part de la dispense de plan particulier d’intervention accordée en mai 2016 par le préfet du Gard. Sur ces deux contentieux, le tribunal administratif de Nîmes vient d’entendre les deux parties et devrait rendre ses décisions le 9 octobre.
En attendant, accompagnés par Karine Benoit, présidente de Cape et de Virginie Richon et Didier Caire, membres de l’association saint-laurentaise, nous avons voulu aller sur le site. Pour cela il faut emprunter un chemin privé, passer le portail qui sécurise la douzaine de mas isolés sur le lido aux confins de la commune du Grau, et rouler.
Rouler longtemps au milieu d’un écosystème remarquable et sensible, souvent propriété du Conservatoire du littoral. La route aboutit au site de l’Otan, clos d’un grillage surélevé de barbelés et désert. "Il y a parfois des mouvements, sans doute pour effectuer des travaux de maintenance, mais c’est relativement rare et irrégulier", explique Didier Caire.
Ici, tout a commencé à la fin des années cinquante, en pleine guerre froide, à l’époque où les réserves d’hydrocarbures stratégiques étaient indispensables à l’Alliance Atlantique. Sept réservoirs semi-enterrés, une capacité totale de 66 000 m3, sont alors érigés. "Le pétrole arrivait par un sealine abandonné en 1983. Le site est relié à l’ensemble des oléoducs des alliés, aujourd’hui il est approvisionné par ces derniers uniquement", indique Virgine Richon.
La création, l’histoire, l’existence du site de l’Otan sont bien connus des Graulens, Aigues-Mortais et Saint-Laurentais, mais pas des centaines de touristes qui à moins de 500 mètres, jouissent pourtant, sitôt les beaux jours, d’une des plus belles plages de la côte languedocienne.
Connu localement mais discret. "Le dépôt apparaît sur les cartes mais bizarrement, il n’est jamais identifié comme site Seveso, même pas sur les cartes des sites Seveso de direction régionale de l’environnement", sourit Didier Caire. Une discrétion tenace. Sur le plan administratif, le site respectera la réglementation applicable en 1957 mais il faudra attendre mai 2014 pour que le service national des oléoducs interalliés (SNOI) qui exploite le dépôt engage une régularisation administrative et demande une autorisation d’exploiter au ministère de la Défense.
Une demande qui, compte tenu des différents avis nécessaires, notamment celui de l’Autorité environnementale, a permis d’en savoir davantage sur ce dépôt classé en risque Seveso “seuil haut”. Des études et deux dossiers d’enquêtes publiques qui constitueront une mine d’informations pour un collectif de défenseurs de l’environnement qui est aujourd’hui devenu l’association Cape.
Ils s’appuieront sur ces documents pour jauger le niveau d’information, insuffisant selon eux, comme la prévention en cas de problème majeur : "Ce classement Seveso seuil haut nécessite la mise en œuvre d’un plan particulier d’intervention", souligne Didier Caire. Karine Benoit insiste pour sa part sur "la nécessaire information des personnes qui fréquentent la plage, à 500 m du site". En cas d’incident majeur, elle pointe la difficulté pour évacuer rapidement les touristes de cette plage en cul-de-sac.
L’association considère aussi que le risque de submersion marine est minimisé : "Les dunes ont disparu face au dépôt et les pouvoirs publics financent une stratégie de repli. Ils vont réaliser un cordon dunaire de 2e rang qui s’appuiera sur le dépôt de l’Otan", s’étrangle Didier Caire. Plus globalement, Cape exige davantage de transparence. Tant sur les conditions d’exploitation actuelles du site, bien trop opaques à son goût, que sur les réponses apportées par l’exploitant aux lourdes contraintes qui conditionnent l’autorisation d’exploiter. Notamment quant à la sécurité du site et l’étanchéité des cuves qui, jusqu’ici, sont dispensées de satisfaire au règlement de la double coque. Une mise aux normes de ces dernières coûterait près de 110 M€.
Contacté mercredi soir, le maire du Grau-du-Roi restait injoignable. Le 25 mars 2015, dans le cadre de la demande du Service national des oléoducs interalliés d’actualiser l’autorisation d’exploiter le dépôt, la commune avait dû donner un avis.
Elle s’était alors exprimée de manière défavorable à cette autorisation, en estimant que compte tenu de l’avis de l’Autorité environnementale, le dossier présenté par SNOI faisait apparaître une vingtaine d’"insuffisances" parmi lesquelles l’analyse des impacts prévisibles sur l’environnement humain et naturel des phénomènes dangereux retenus ou la prise en compte de la fréquentation (présence et conditions d’évacuation), notamment touristique, des abords du dépôt.
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Maintenant, grâce à ce magnifique coup de projecteur, ce site "stratégique" n'est plus "caché"…
Reste à espérer que l'article ne tombe pas sous les yeux de personnes malintentionnées…
Idem que pour la ponte de la tortue Caouanne…

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