Si la covid entraînera peut-être des fermetures de commerces, elle a aussi généré de nouvelles façons de concevoir le métier afin de l’adapter aux aspirations des consommateurs. C’est ce qu’a compris Mélanie Lorant en ouvrant fin mai son café botanique Chez Georgette – prénom de sa grand-mère paternelle -, en plein Châtelaudren (22).
« C’est un commerce hybride, à la fois café, fleuriste et épicerie fine, qui propose même des brunchs le week-end. J’ai été inspirée par ce concept que j’ai découvert à Wambrechies, en banlieue de Lille. Je l’ai adapté après avoir réfléchi à ce qui est important pour le consommateur devenu plus éco-responsable ».
Séduite par l’ancien Café des halles à colombage, qu’elle a acquis, et par la perspective de voir Châtelaudren labellisé Village étape, Mélanie Lorant a fait appel à ses connaissances en matière de décoration intérieure – « ma formation initiale » – pour transformer les 80 m² en un endroit cosy et chaleureux, le tout dans une ambiance « récup’ chic » entre les verrières colorées, les pierres apparentes ou la cheminée historique.
La partie café, « fusion entre le coffee shop et le salon de thé », jouxte l’épicerie fine où le client trouve une sélection soignée de produits locaux et artisanaux en lien direct avec le végétal. Son parcours professionnel lui ayant permis d’acquérir de solides connaissances en tant que fleuriste, Mélanie propose une sélection de plantes et fleurs, « notamment des fleurs coupées, principalement françaises mais aussi une variété de fleurs séchées ».
Tout cela est complété par des ateliers d’art floral et du tricot, des animations socioculturelles, un espace coworking, une boutique éphémère pour artistes ou artisans producteurs. Bref, un endroit dans l’air du temps, où l’on cultive la douceur de vivre.
Pas si loin de là, à Saint-Brieuc, Aurore Graillat, ingénieure agronome, a ouvert à l’automne 2020 une jardinerie étonnante où l’on trouve aussi un espace déco et un salon de thé. Personne ne peut prétendre avoir déjà mis les pieds dans un endroit comme La Végétalerie. Un concept-store où l’on peut acheter une plante, la rempoter si on n’a pas envie de salir chez soi, tout en buvant un thé ou un café… Le tout accompagné d’une pâtisserie.
L’idée de cette jardinerie conceptuelle a germé dans un coin du projet de reconversion d’Aurore Graillat. La Drômoise, âgée de 32 ans, est ingénieure agronome de formation, et embauchée dès sa sortie d’études par la multinationale Bayer, option « protection des plantes ».
Qu’est-ce qui peut bien pousser une jeune femme à lâcher le bénéfice d’études longues, une carrière plus sécurisante, pour se retrouver aux manettes d’un petit commerce. Et qui plus est dans un centre-ville réputé poussif ? La « passion », dit-elle aujourd’hui. Le fait d’être prête à des « sacrifices sur le plan personnel, parce que c’est beaucoup d’heures de travail ». Et une certaine idée de l’alignement entre conception de la vie et ouvrage quotidien. « Être en phase avec soi-même ».
Pour elle, la bascule se produit au moment du rachat de la firme Monsanto par son employeur. Une histoire de « valeurs », dit-elle. Et puis la société offre des possibilités de sortie avantageuses… « Un plan de licenciement, avec accompagnement par un cabinet de conseil ».
Elle est alors rattrapée par cette « envie de vivre une vie autrement, peut-être de façon moins matérialiste ». « Finalement, un bon poste et un bon salaire n’ont pas suffi à combler mes attentes, ajoute-t-elle. Tout quitter pour suivre ses rêves, c’est quelque chose que partagent de nombreuses personnes de ma génération ».
Et puis, Aurore a toujours admiré « ceux qui, autour de moi, se sont lancés. Je trouvais ça couillu de tout plaquer pour être à son compte, quitte à changer de statut. Ma tante, laborantine, a ouvert un magasin de chaussures, il y a une dizaine d’années. Ça n’a pas été toujours facile. Mais son magasin est toujours là et je crois qu’elle ne regrette pas son choix ».
Certes, il y a bien le stress d’un « changement de vie radical ». « Mais après tout, si ça ne marche pas, cela fera une expérience de plus ». D’autant que devenir commerçant implique de se doter d’un bouquet de compétences. « Les responsabilités qui pèsent sur nos épaules sont importantes. On est seul à piloter notre barque. Il faut prendre des décisions, s’adapter à un contexte changeant, faire les bons choix… Être commerçant, ce n’est pas juste jouer à la marchande ».

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