De Tignes à Courchevel, via la Suisse et les Dolomites, l'art de vivre à la montagne s'égrène au fil de la douceur d'un plaid, du crépitement d'un feu de cheminée, de bons produits du terroir et d'une nature omniprésente.
Par Clara Le Fort
A l'approche des fêtes de fin d'année, nos pistes pour profiter des joies de l'altitude sans trop d'efforts.
Revisité sous toutes ses formes, l'authentique chalet reste l'hébergement de montagne le plus respectueux. En Suisse, certains artisans font même la chasse aux vieilles poutres ou parquets anciens, qu'ils appellent « bois antique », pour faire revivre le passé et redonner une âme à ces repaires qu'ils rénovent. Les compagnons français ne feraient sans doute pas différemment. À Verbier, le très en vue Experimental Group a ainsi investi les murs d'un chalet datant de 1936, rénové par l'architecte Fabrizio Casiraghi. L'« Experimental Chalet » propose désormais 39 chambres et suites modernisées avec goût, sans perdre l'identité alpine du lieu, ni la vue depuis les balcons en bois.
Après la Suisse, direction l'Italie et les Dolomites, où l'on se réfugie dans un chalet moderne qui retranscrit parfaitement l'esprit de la montagne : à « Forestis », on vit au contact des éléments, de la lumière naturelle, du silence et de l'espace. L'ancien sanatorium datant de 1912 a été restructuré et agrandi par l'architecte Armin Sader. Cette adresse durable entend préserver la magie des sommets qui l'entoure.
Au « Chalet Cheval Blanc », résidence privée proposée par « Cheval Blanc Courchevel ». S. Julliard
L'esprit chalet, version ultraluxe cette fois, c'est aussi ce que propose « Cheval Blanc Courchevel » avec un chalet privé de 315 m2 qui allie confort et discrétion, invitant l'art de vivre à la montagne. Cette résidence alpine exclusive se situe au pied des pistes avec un accès direct à l'hôtel cinq-étoiles : composée de quatre étages, elle accueille – entre autres – trois suites indépendantes, un salon agencé autour d'une cheminée, une terrasse qui s'ouvre sur un panorama enneigé, une salle de projection privée et un espace bien-être qui se double d'un bain nordique au grand air.
« Experimental Chalet » : chambres à partir de 350 francs suisses (355 euros). fr.experimentalchalet.com
« Forestis » : chambres à partir de 460 euros. forestis.it
« Cheval Blanc Courchevel »  : prix sur demande. chevalblanc.com
La relève est là avec de jeunes chefs qui revisitent les produits locaux et rendent aux alpages leurs lettres de noblesse. Avec une étoile (et une étoile verte) décrochée quand il n'avait que 24 ans, Antoine Gras emmène « La Table de l'Ours » à Val d'Isère avec une passion pour les recettes, produits et producteurs alpins : il propose des crozets gratinés au beaufort d'alpage, avec des champignons acidulés, de la truffe d'hiver et un cappuccino de diots fumés de Séez (village en bas de la vallée) ; le Fin Gras du Mézenc (une viande de boeuf persillée saisonnière) s'accompagne d'artichaut en croûte à la braise de cheminée et foins du plateau, et la poitrine de poularde de la ferme de Tauziet est servie avec des morilles farcies et une sauce gourmande au vermouth de Chambéry – les cuisses sont préparées comme une poule au pot ! Une cuisine hivernale tout en légèreté.
Clément Bouvier chez « Ursus » revisite la soupe de pommes de terre de son grand-père avec une rosace croustillante à la truffe noire.© Pierre-Marie Gaury
Autre chef étoilé engagé pour une gastronomie durable, Clément Bouvier s'inscrit dans les pas de son père et grand-père. Aux commandes du restaurant « Ursus » à Tignes – qu'il a imaginé au sein de la maison familiale comme une véritable forêt avec plus de 380 arbres – il nous reconnecte avec la riche nature de la Haute Tarentaise : la soupe de pommes de terre de son grand-père, il l'accompagne d'une duxelles de champignons de saison, rosace de pommes de terre croustillante et truffe noire.
« La Table de l'Ours » : menu gastronomique « découverte » à 95 euros. www.hotellesbarmes.com/restaurant-gastronomique-val-disere-table-de-lours/
« Ursus » : menu dégustation à 110 euros. https://www.les-suites-du-nevada.com/restaurant-ursus/
Photo de Mathilde Gaussen extraite du « Livre de Val d'Isère ». A droite, la couverture du livre.© Mathilde Gaussen
Jeune graphiste et éditrice, Mathilde Gaussen rend hommage à l'univers alpin à travers son premier ouvrage (réalisé avec son associé François Garet) intitulé simplement « Le Livre de Val d'Isère », paru aux éditions Snow Line : 495 magnifiques pages pour partir à la découverte de la pureté de ce territoire de montagne, des ambiances qui le composent et des gens qui l'animent, sans oublier d'époustouflantes sorties dans le grand blanc à la découverte de la faune et de la flore locales. Au fil des pages, le propos de cette nouvelle maison d'édition est de mettre l'accent sur les valeurs intemporelles de la montagne, et les qualités des hommes et des femmes (guides, agriculteurs, hôteliers, chefs…) qui la respectent, la protègent et la valorisent.
« Le Livre de Val d'Isère », Snow Line, 495 pages, 95 euros. @gaussen.raw
Place à la cueillette. Courir les champs et les alpages avec Charlotte Passelègue est la promesse de découvrir les Hautes-Alpes sous un jour nouveau, de s'y ressourcer tout en préservant la nature. La jeune femme diplômée d'ethnobotanique propose, via sa société Hautes Herbes, de nombreuses activités : sorties en montagne, ateliers de cueillette et cuisine sauvage, fabrication de macérats huileux et de baumes… Son dernier livre « Les fleurs des montagnes, tu connais ? », paru aux éditions du Mont-Blanc, est également une invitation à sillonner la montagne, les sens en éveil.
Autre artisan cueilleur, Le Plantivore, fondé par Maurice Leroy dans le Queyras, propose des liqueurs, confitures, tisanes et sirops produits à partir de plantes récoltées en altitude. La marque s'inspire de recettes ancestrales pour confectionner des produits aux arômes et vertus uniques comme le sirop au foin, les confitures de marmottier (fruit d'un arbre endémique du Queyras) ou une spécialité de pétales de fleurs de pissenlit.
hautesherbes.com et @leplantivore
A la filature Arpin, à Séez, labellisée Entreprise du patrimoine vivant.© DR
Dans la vallée de Bourg-Saint-Maurice, à Séez, on découvre les secrets de la filature Arpin. Depuis 1817, la manufacture savoyarde produit des tissus et draps de laine de belle facture. Fournisseur de l'industrie du luxe, l'entreprise familiale confectionne des articles sur mesure à partir de toisons brutes, de la laine prélevée sur les moutons des alpages environnants : de génération en génération, le travail s'effectue sur des machines classées au Patrimoine national. Labellisée « Entreprise du patrimoine vivant », la filature est ouverte aux visites et la boutique propose des plaids frangés à la main, dans la pure tradition de la vallée. Actrice du territoire, la manufacture est impliquée dans de nombreux projets d'aménagement d'intérieur et de rénovation d'authentiques chalets savoyards.
Dans le même esprit, cinq générations se sont succédé à la tête de l'entreprise familiale La Carde (devenue Maison Lafond) dans les Hautes-Pyrénées depuis 1891 : forte d'un savoir-faire artisanal français, elle confectionne de manière ancestrale des couvertures, plaids et articles en lainage des Pyrénées, à Esquièze-Sère au coeur du pays Toy.
Les deux entreprises se visitent sur rendez-vous. arpin1817.com et lacarde-pyrenees.com
« La magie de la montagne, fruit du travail à la main et de l'amour pour la planète » : c'est ainsi que l'Anglais James Abbott, créateur du gin du Mont Blanc, parle de son produit. A la tête de la Distillerie Saint-Gervais, la plus haute d'Europe occidentale à 1.365 m d'altitude, il fabrique un gin qui est une vraie bouffée de fraîcheur et possède la clarté de l'eau de roche. Les montagnes lui offrent un air et une eau purs, et le contexte idéal pour distiller un gin à la saveur des Alpes françaises : son goût est délicatement aromatisé avec, outre le genièvre, de l'orange douce et amère, et une touche finale de poivre. L'arrière-goût apporte, lui, une légère note de génépi. Même respect de la nature côté packaging, avec bouteilles en verre, papier recyclé, peintures à base d'eau et colle des étiquettes fabriquée à partir de lait.
Toute aussi respectueuse de la montagne, la liqueur de génépi Guillaumette est élaborée à partir de fleurs exclusivement ramassées à plus de 2.000 m sur la commune d'Orcières (Hautes-Alpes) ou dans des zones autorisées du Parc national des Ecrins. Des secrets de fabrication transmis au fil des générations et une fabrication artisanale saisonnière font du génépi Guillaumette un produit d'exception – commercialisé uniquement dans les boutiques de montagne, épiceries fines et chez les cavistes.
distilleriesaintgervais.com et guillaumette.com
A la Ferme de l'Adroit, laiterie bien connue de Val d'Isère.© DR
Le goût du lait d'alpage – et des fromages qui en découlent – est incomparable. Rapidement devenue la laiterie de prédilection de Val d'Isère et de ses chefs, la Ferme de l'Adroit est emmenée depuis trois générations par la famille Mattis : 30 vaches laitières, principalement des Brunes des Alpes, permettent de produire douze fromages singuliers comme la pella ou le fornelain, la raclette ou la tomme de Val d'Isère. Les laitages et glaces sont également fabriqués à̀ la ferme, et le tout disponible en vente directe sur place.
Plus bas dans la vallée, à Villaroger, place au « fromage blanc d'Eddy » – tel que le cite le chef Antoine Gras dans un dessert à la carte de « La Table de l'Ours » – et aux délicieux fromages de chèvre de la ferme du Planay, où ils sont élaborés suivant une méthode traditionnelle. Vente à la ferme et visite gratuite possible sur réservation.
Affaire familiale depuis trois générations, la Fruitière des Perrières, dans la station des Gets (Haute-Savoie), travaille en circuit court, avec du lait venant de Verchaix, des Gets ou d'Avonnex : elle regroupe une fromagerie, un restaurant et un magasin de fromages. Visite commentée gratuite (sur réservation).
Enfin, avec sa conserverie artisanale de montagne, le chef étoilé Laurent Azoulay propose, à Méribel, des bocaux gourmands, 100 % naturels et sans conservateur, à base de lait de montagne : crème caramel, au chocolat noir ou praliné amande-noisette. On retombe en enfance !
laferme-de-ladroit.fr
www.hautetarentaise.fr/apidae/4932004/5360-la-ferme-du-planay-de-villaroger.htm
https://www.fruitiere-lesgets.com
azoulay-gastronomie.com/bokal
Marque de cosmétiques naturels des Alpes françaises, Exertier montre le bon exemple depuis son lancement en 2015. Enfant de la région, sa fondatrice Julie Exertier choisit des ingrédients emblématiques de sa montagne pour créer une offre engagée (formulée à partir de 98 % d'ingrédients d'origine naturelle). Aujourd'hui, la marque est l'une des rares maisons de beauté qui cultive, transforme et formule les actifs naturels au coeur des Alpes françaises : les ingrédients principaux sont cultivés à la Ferme de Losse, à Traize, en Savoie, par Elodie et David, audacieux agriculteurs du cru formés à la permaculture.
Même principe chez la papesse de la beauté naturelle autrichienne Susanne Kaufmann, qui tient son savoir de la région de Bregenzerwald où elle a grandi, nourrie par des générations qui lui ont inculqué les bienfaits des plantes d'alpage. Une philosophie locale, bio et alpine sous-tend la marque : thym et romarin sont cultivés à proximité et l'huile de sapin récolté dans la forêt autour du site de production. Sourcés avec soin, rose ou épilobe alpins, joubarbe, huile d'aiguilles d'épicéa, millepertuis ou miel proviennent également des alpes suisses ou autrichiennes. Un vrai bain de montagne.
exertier.fr et fr.susannekaufmann.com
Photo de Mathilde Gaussen extraite du « Livre de Val d'Isère ».© Mathilde Gaussen
Champion olympique de descente, Antoine Dénériaz a choisi de se reconvertir dans les skis haut de gamme, faits à la main. Une rencontre décisive avec Alain Zanco, ancien spécialiste en recherche avancée chez Rossignol, le pousse à se lancer. Ensemble, ils décident de perpétuer un savoir-faire. Une levée de fonds permet à Antoine Dénériaz de racheter les presses détenues par Alain Zanco en 2018 : depuis, cinq jeunes participent à l'aventure et se forment aux côtés du maître.
Dans l'atelier, à Doussard, les meilleures essences sont choisies pour fabriquer un noyau bois en lamellé-collé qui répond à différentes pratiques sportives. Si le noyer crée un amorti confortable, le frêne est plus réactif et le bambou, léger par essence, est idéal pour le ski de randonnée (700 g/ski). Les skis se doublent également de fibre composite carbone pour une structure optimale. Aujourd'hui, la collection compte dix modèles, du ski de compétition (géant ou slalom) au ski de piste, en passant par le ski de haute montagne.
A partir de 1.900 euros. Showroom-concept store : 646 route du Couardet, 74210 Doussard. www.deneriaz-ski.com
Sylvothérapie, spa, randonnée… y'a pas que le ski à la montagne !
Ski : 6 chalets d'exception pour s'évader
Clara Le Fort
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